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21-06-2013
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« La conférence sociale ne laisse pas d’espace aux nouvelles solutions »

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 « La conférence sociale ne laisse pas d'espace aux nouvelles solutions »
(Marie-Lan Nguyen - wikipedia)
 
En marge de la conférence sociale, qui se termine ce vendredi, le collectif Roosevelt a mené une grève de la faim. Son objectif ? Provoquer un sursaut contre le chômage et l'austérité. Explications avec Pierre Larrouturou.
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ÉCOLOGIE SOCIÉTÉ ÉCONOMIE
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Une grève de la faim pour défendre des idées nouvelles. Au deuxième et dernier jour de la conférence sociale - qui réunit depuis jeudi syndicats, patronat et gouvernement pour parler retraites, emploi et pouvoir d’achat - le collectif Roosevelt, créé en 2012 par Stéphane Hessel, Edgar Morin et Bruno Gaccio va encore plus loin pour faire bouger les lignes. Toute la semaine, l’économiste Pierre Larrouturou, l’un des membres fondateurs du collectif, a campé devant l’Assemblée nationale sans s’alimenter. Devant un verre d’eau coiffé d’une rondelle de citron, il explique son engagement à Terra eco.

Terra eco : Pourquoi lancer une telle action maintenant ?

Pierre Larrouturou : Parce qu’il y a urgence. En avril, la France comptait 40 000 nouveaux chômeurs. Le même mois, on estime qu’ils étaient environ 80 000 à avoir été radiés des listes de pôle emploi. Régulièrement, on nous annonce que la crise est finie, pourtant près de 10 millions de français vivent sous le seuil de pauvreté. Le mot crise est d’ailleurs mal choisi, il suppose, après de grands bouleversements, un retour à la situation antérieure. Or, ce n’est plus possible, on a atteint un point de non-retour. Depuis sa création en 2012, le collectif Roosevelt propose des idées concrètes pour changer de modèle. En vain. Nous avons été reçus 15 fois à l’Élysée, 8 fois à Matignon, sans qu’aucune discussion ne soit suivie d’effets. La conférence sociale qui se termine aujourd’hui représente pour nous une nouvelle occasion de faire entendre nos propositions.

Pourtant vous n’y participez pas...

Non, nous n’avons pas été invités. Pas plus que le mouvement national des chômeurs et précaires (MNCP). Pourtant, dans la société, notre message trouve un écho. Notre appel a recueilli 100 000 signatures et cette semaine, partout en France, 1600 personnes ont jeûné pour nous soutenir. Compte tenu de la portée de notre mouvement, nous pourrions au moins être auditionnés. Bien sûr, les partenaires sociaux sont déjà présents. Le problème c’est que chaque année on prend les mêmes et on recommence. Cette conférence ne laisse pas d’espace pour ceux qui proposent de nouvelles solutions.

Quel message aimeriez-vous faire passer ?

Rappeler que la justice sociale n’est pas une variable d’ajustement mais le premier levier d’action. Depuis l’élection de François Hollande, l’austérité et la croissance sont présentées comme les seules alternatives. Or aujourd’hui miser désespérément sur le retour de la croissance constitue une grave erreur de jugement. En France, la croissance plonge en continu depuis cinq décennies. Il faut arrêter de se bercer d’illusions. L’austérité aussi est une fausse solution. La période que nous traversons n’est pas une crise de l’État-providence mais une crise du néolibéralisme.

Parmi les 15 mesures que vous proposez, quelles sont les plus urgentes ?

Notre hypothèse c’est que nous sommes à la veille d’une nouvelle crise, sans doute plus grave que celle de 2008. Nous ne sommes pas les seuls à le penser. Olivier Blanchard, le chef économiste du FMI et le gouverneur de la banque d’Angleterre établissent le même diagnostic. Dans ces conditions la priorité c’est de se protéger.La séparation des banques d’affaires et de dépôt constituerait une première mesure pour limiter les répercussions en cas de tsunami financier. Pour protéger les individus, nous souhaitons également que les indemnités versées aux demandeurs d’emploi soient prolongées. Ce serait un cercle vertueux car les personnes qui ont le moins de pouvoir d’achat dépensent la plus grande partie de leurs revenus. Cet argent serait donc directement réinjecté dans l’économie.

Si le comité Roosevelt avait le pouvoir, quel plan d’action sortirait de la conférence qui se tient actuellement ?

On mettrait en place un nouveau contrat social. Celui-ci reposerait sur une réduction forte du temps de travail. En Allemagne ou au Québec, les entreprises en difficulté utilisent déjà le temps de travail comme une variable d’ajustement pour éviter les licenciements. L’idée c’est de passer à la semaine de quatre jours. Contrairement aux 35h, la réduction du temps de travail serait alors réelle. Les salaires diminueraient de 30%. Cela permettrait aux entreprises de soulager leurs finances, voire de créer de l’emploi même sans croissance. Pour que les salariés ne soient pas pénalisés, l’État compenserait cette différence. Au final, les employés percevraient 95 % de leur revenu.

Avec quel argent ?

Celui qui quitte l’économie réelle pour aller vers les marchés. Depuis 82, 150 % du PIB des pays de l’OCDE est parti dans la finance. C’est autant d’argent qui aurait pu servir au peuple, sous forme de salaires ou pour alimenter la sécurité sociale, les caisses de retraite. C’est pour cela que nous sommes largement favorables à une taxe sur les transactions financières, pour récupérer une part cet argent. Il faudrait également taxer plus les bénéfices des entreprises, en France cet impôt est plus faible qu’aux États-Unis, pour l’État ce manque à gagner est important. Par ailleurs, si les banques de dépôt ne peuvent plus spéculer, leurs investissements vont créer de l’emploi. Les 34 milliards des fonds de retraite, par exemple, pourraient servir à la construction de logements. Nous souhaitons également qu’un pacte européen Énergie-Climat-Pouvoir d’achat soit mis en place. Celui-ci serait financé par un droit de tirage auprès de la BCE : chaque pays aurait droit à 1% de son PIB chaque année, soit 20 milliards d’euros pour la France, sous forme de prêts ou de dons. Selon nos estimations, cet investissement, dans l’isolation, les énergies renouvelables ou d’autre mesures de protection de l’environnement, pourrait créer 6 millions d’emplois en Europe tandis que l’amélioration de l’efficacité énergétique permettrait à chaque foyer d’économiser 1000 euros par an. Ce qu’il faut c’est un nouveau Bretton Woods, prendre trois semaines et tout remettre à plat.

Comme Roosevelt en 1933, vous préconisez l’adoption massive de réformes, ne craignez-vous pas que le Parlement soit dépassé ?

Ces changements ne passent pas forcément pas la loi. On dispose déjà d’une marge de manœuvre importante par simples décrets. Roosevelt qui était face à des défis de taille comparable, a agit en trois mois. Et de toute manière nous n’avons plus choix. Cette crise multi-facettes nous entraîne tout droit vers une crise de civilisation. La monté du parti Aube Dorée en Grèce, du Front national en France en sont l’expression. Si nos sociétés ne changent pas de direction, les hommes vont perdre toute dignité.

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  • écouté ce matin vos propos tenus sur France Culture. Merci.

    "Que faites-vous au Parti socialiste ?", vous a-t-on demandé, je crois , Pierre ?
    Cette question mes amis me la posent aussi régulièrement.
    Il y a des jours où , effectivement , je doute de l’utilité d’y apporter une parole iconoclaste .

    Je crains comme vous de grandes désillusions à venir.

    Et je tente toujours de mettre en garde contre le Front National...
    Ne pas en avoir peur mais lutter contre son programme me semble être la meilleure stratégie.

    24.06 à 10h15 - Répondre - Alerter
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