Presqu’île de Lough Erne, en Irlande du Nord. Des étendues sauvages dans le comté rural du Fermanagh accueillent, ces 17 et 18 juin, les dirigeants des huit pays les plus puissants de la planète. Une rencontre au sommet sur une presqu’île encerclée pendant deux jours par quelque 8 000 policiers. C’est ainsi que David Cameron espère éviter les débordements, comme à Gênes en 2001. Censés accueillir des discussions autour des enjeux politiques et économiques de la mondialisation, les G8 coûtent une petite fortune. Voici quelques exemples, qui font, ou ont fait parler d’eux :
- Irlande 2013 : lifting d’une terre de misère
Des devantures repeintes et nettoyées dans le comté de Fermanagh, non loin de la luxueuse résidence de Lough Erne où se déroule actuellement le G8. C’est ce que décrit The Irish Times. Selon le quotidien, ces travaux de rénovation adviennent dans une localité particulièrement touchée par le chômage et la misère. Ironie de l’histoire, les opérations – dont le coût s’élèverait à 300 000 livres sterling (350 000 euros) – sont intégralement financées par le fonds de rénovation, lui-même alimenté par le ministère de l’Environnement et du Développement social.
Mais ce n’est pas tout. Pour payer l’organisation de l’événement lui-même, les Britanniques ont – c’est une première – demandé à leurs invités de mettre la main à la poche. Chaque délégation étrangère a été appelée à payer, comme l’indique le quotidien italien La Repubblica. 1 000 livres (1 200 euros) par personne, exception faite du chef de la délégation et de son sherpa. Pour le correspondant du Figaro, « business is business au Royaume-Uni » : les journalistes ont dû aussi s’acquitter d’un écot de 300 euros par nuit et régler 180 euros pour être accrédités. Du jamais vu. Mais il n’y a pas de petites économies lorsque la facture du G8 s’élève à 60 millions d’euros.
- Canada 2010 : lac artificiel et centre de villégiature
En temps de crise, les économies font belle figure auprès des contribuables. Les dirigeants britanniques l’ont bien compris. Les Canadiens, eux, se souviennent probablement des dépenses faramineuses du mois de juin 2010. A cette date, l’Etat avait déboursé pas moins de 980 millions de dollars canadiens (715 millions d’euros) pour l’organisation des G8 et G20, dont 70% avaient été consacrés à la sécurité (676 millions de dollars ou 498 millions d’euros).
Objet du scandale outre-Atlantique : une facture frisant les 2 millions de dollars (1,5 million d’euros) pour la rénovation d’un luxueux centre de villégiature à Muskoka destiné à accueillir les leaders mondiaux du G8. Dénoncée aussi la construction d’un lac artificiel dans le centre des médias de Toronto pour 1,9 million de dollars canadiens (1,4 million d’euros). Outre ces deux « gaspillages », comme les ont qualifiés les libéraux, les autres frais engagés ont été dévoilés trois mois après la tenue des deux sommets : 80 millions de dollars (59 millions d’euros) pour les hôtels et les repas, 17 millions (12,5 millions d’euros) pour les véhicules, 13 000 (9 500 euros) pour les calepins des policiers ou encore – last but not least – 439 000 (323 000 euros) pour les toilettes portables.
- France 2011 : « dix fois moins cher que le Canada »
A peine clos le G8 canadien, Nicolas Sarkozy, alors président de la République, annonçait « un sommet dix fois moins coûteux ». L’année suivante, la France organisait donc elle aussi les G8 et G20. 31 millions d’euros pour le premier, 28 millions d’euros pour le second. Tout le monde applaudit ? Pas tant que ça. Car initialement, le G8 ne devait coûter « que » 20 millions d’euros. Une estimation revue à la hausse notamment à cause du renforcement de la sécurité suite à la mort de Ben Laden et l’attentat de Marrakech. Si le G8 cette année-là n’a pas trop fait scandale, c’est l’organisation du G20 qui a été bien davantage critiquée, avec notamment des rumeurs quant à la facture des nuitées des dirigeants. Un article du quotidien britannique The Sun chiffrait à 35 000 euros la nuit d’hôtel pour le président Obama et 37 000 pour le président français.
- Italie 2009 : sur les décombres de L’Aquila
« Economie, sobriété, aide. » Trois arguments avancés par Silvio Berlusconi, le président du Conseil italien d’alors, pour justifier le déménagement, à la dernière minute, du G8. De la Maddalena (Sardaigne) à L’Aquila (Abruzzes).
23 avril 2009. Dix-neuf jours très exactement après le tremblement de terre qui a fait 307 morts à L’Aquila, la capitale des Abruzzes bénéficie encore de cet intérêt spasmodique qui fait suite à toute catastrophe naturelle. Grandiloquent, Silvio Berlusconi indique alors que le sommet international se tiendra à L’Aquila.
L’occasion pour lui de voir entrer des fonds étrangers dans le financement de la reconstruction des monuments, symboles de la cité médiévale. Et puis, quoi de mieux qu’un sommet dans une ville dévastée pour faire des économies ? 220 millions d’euros épargnés par rapport au sommet luxueux prévu en Sardaigne, selon le Cavaliere.
Trois mois après le tremblement de terre du 6 avril, c’est donc la caserne qui avait temporairement accueilli les cadavres des victimes, qui recevait les dirigeants des huit pays les plus riches du monde.
La réalité est bien loin des projections... Le couple Obama avait promis 4,5 millions d’euros pour la reconstruction de l’Eglise Santa Maria di Paganica. Une somme qui a dû se perdre dans les décombres... Etrangement, le seul pays à avoir tenu sa promesse est le Kazakhstan qui a bien versé le 1,7 million promis pour la reconstruction de l’Eglise San Biagio di Amiternum.
En fait, c’est aux Italiens qu’est revenu le gros de la facture. En voilà quelques détails chiffrés : 194 000 euros versés pour l’installation « A city to listen to », œuvre d’art en hommage aux victimes de L’Aquila, presque 2 millions d’euros pour la restauration des autorités, sherpas, journalistes et personnels, 10 millions pour l’organisation et la décoration, 95 000 euros pour les tenues du personnel, y compris les uniformes de la protection civile. Et ne parlons pas des 130 000 euros déboursés pour payer les 735 frigos, des 65 000 euros de fleurs ou des 10 000 euros versés pour acheter 1 000 bouilloires... Bouclons la boucle de l’ironie, 6 000 livres sur le tremblement de terre distribués lors du sommet ont couté aux Italiens 126 000 euros.
Au total 184 897 674,92 euros ont été très précisément dépensés à L’Aquila soit 99 125 821,08 euros de moins que ce qu’aurait coûté le G8 à la Maddalena, selon les chiffres officiels. Et ce juste pour l’organisation. En 2009, au moment du G8, 45 000 habitants de L’Aquila étaient toujours sans toit.
Mais au fait, c’est quoi le G8 ?
Création : 1975
Les membres : Etats-Unis, Japon, Allemagne, France, Russie, Royaume-Uni, Canada, Italie
Les objectifs : réflexions sur les grands enjeux géopolitique de la sécurité et de la mondialisation
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