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23-07-2013
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Sciences

Lac Vostok : y a-t-il de la vie sous 4 km de glace ?

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Lac Vostok : y a-t-il de la vie sous 4 km de glace ?
(Crédit photo : U.S. National Oceanic and Atmospheric Administration - Wikimedia Commons)
 
L'immense lac Vostok est emprisonné sous les glaces du continent antarctique. Depuis des années, des chercheurs tentent d'y débusquer des traces de vie. Des Américains disent en avoir trouvé. Est-ce plausible ?
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C’est le genre de lieu improbable qui aurait fait bouillonner l’esprit fertile de Jules Verne. Imaginez un peu : un lac emprisonné sous une couche de glace épaisse de près de 4 km, de l’eau vieille de 30 millions d’années, des conditions de pression extrêmes et, malgré tout, de la vie.

C’est du moins ce qu’affirme une équipe de chercheurs américains, qui font leurs recherches sur les eaux douces mais néanmoins hostiles du lac Vostok. Ils ont analysé des échantillons de glace d’accrétion (l’eau du lac Vostok gelée au contact de la calotte glaciaire qui la surplombe, voir schéma ci-dessous) du plus grand des 400 lacs sous-glaciaires du continent Antarctique. Et y ont détecté pas moins de 3 500 ADN différents.

L’espoir d’une vie extraterrestre relancé

Effacez d’emblée de votre esprit tout scénario à la Spielberg, avec ses monstres marins enfouis dans les profondeurs glacées. Pensez petit : ADN de micro-organismes, de mollusques, de crustacés, d’anémones de mer ont été repérés dans les échantillons. Autant de preuves qu’un écosystème complexe siège dans le lac Vostok. De quoi relancer le rêve : si la vie a perduré dans ce milieu a priori invivable, pourquoi ne se développerait-elle pas sur d’autres planètes ? Les astrobiologistes sont encore sur leur petit nuage depuis la publication de ces résultats, au début du mois de juillet, dans la revue scientifique à comité de lecture Plos One.

Mais ce qui est à peine pensable est-il bien vrai ? Ce n’est pas la première fois que des scientifiques annoncent que les limites de l’habitable ont été repoussées. Jusqu’ici, tous se sont rétractés, admettant après coup que la présence des bactéries identifiées était probablement due à la contamination de l’échantillon lors du prélèvement de la glace ou de l’analyse. Cette fois-ci, l’équipe de biologistes emmenée par Yury M. Shtarkman a déployé des moyens considérables pour scruter d’éventuelles traces de vie emprisonnées dans l’eau gelée du lac. Elle a passé 36 millions de données au crible d’un super calculateur, pour identifier à ce jour 1 632 bactéries et organismes.

Echantillon pur ou contaminé ?

« C’est un inventaire à la Prévert qui me dépasse », soupire Jean-Robert Petit, le spécialiste français du lac Vostok qui a lui aussi analysé des échantillons de glace d’accrétion du lac, prélevée en 1998 à 3 540 mètres sous le glacier. « Les moyens techniques les plus en pointe ont été utilisés pour ces recherches. Mais les Américains ont fait une erreur dès le début : la glace du lac est extrêmement pure, il faut donc l’analyser dans des chambres sans poussières, ce que les biologistes n’ont pas fait. Ils ont travaillé dans un labo à l’atmosphère déjà saturée d’ADN multiples. » D’où une forte probabilité que l’ADN trouvé provienne d’autres sources que le lac Vostok...

« On n’a pas de preuve absolue que ces organismes ne sont pas en fait une contamination de l’eau du lac liée au forage. Tout reste à démontrer », abonde Paul Tréguer, océanographe qui a publié La vie sous la glace. Une oasis au Pôle sud (avec Laurent Chauvaud, Quae, 2013).

« Tout laisse à penser qu’il n’y a rien »

Et ce d’autant plus que « les eaux du lac sont stériles », ajoute Jean-Robert Petit, directeur au CNRS, le Centre national de la recherche scientifique, et membre du Laboratoire de glaciologie et géophysique de l’environnement de Grenoble (Isère). Les eaux du lac contiennent 300 fois plus d’oxygène qu’une eau douce de surface. Il n’y a pas de carbone, indispensable à la vie. « Tout laisse à penser qu’il n’y a rien. Le glacier lui aussi est complètement stérile. Il n’y a donc à mon sens pas d’autre signature ADN que celle d’une contamination », explique le chercheur. A une exception près : les Américains ont trouvé une bactérie thermophile capable de vivre dans les profondeurs de la terre en complète autarcie, et qui se nicherait non pas dans les eaux mais dans les sédiments du lac. Trouvaille qui n’en est pas vraiment une, puisque Jean-Robert Petit l’avait déjà identifiée il y a quelques années.

Il reste toutefois encore un espoir de découvrir un jour de la vie dans l’eau de Vostok elle-même. Le 5 février 2012, les Russes ont pour la première fois, et après vingt-trois ans de tentative, réussi à percer les 3 769 mètres de la calotte glacière (neige glacée + glaces d’accrétion) pour atteindre directement la surface du lac. A -2,6°C en moyenne, l’eau y est maintenue liquide sous l’effet de la pression (350 bars, soit grosso modo 350 fois celle de l’atmosphère) mais aussi grâce à la chaleur qui s’échappe de la Terre et qui reste bloquée sous la chape de glace.

Le trou créé par le forage a créé un phénomène d’aspiration : de l’eau de Vostok est remontée dans le puits, dégageant, paraît-il, une odeur de vase. Elle n’a été prélevée que quelques mois plus tard, gelée. L’étudier prendra des années.

Une image du lac Vostok. Le forage est situé à l’extrémité sud du lac. National science foundation - Wikimedia Commons


Un des plus grands lacs du monde

Le lac Vostok doit son nom à la base scientifique que les Russes ont installée en surface en 1957, dans l’un des endroits les plus hostiles de la planète, à 3 800 mètres d’altitude. Il y fait nuit quatre mois par an. C’est là qu’on a enregistré le record de température la plus basse : - 89°C ! Dans ces conditions, difficile d’imaginer que, 3 769 mètres sous les pieds emmitouflés des scientifiques, de l’eau à l’état liquide est emprisonnée. On soupçonne pourtant sa présence dès les années 1970 mais ce n’est qu’en 1993 qu’un satellite européen cartographie le lac. Et révèle son immensité : avec ses 250 km de large, ses 60 km de long et ses 400 à 1 200 m de profondeur selon les endroits, le lac Vostok est l’un des plus grands et des plus profonds de la planète. L’équivalent de 30 lacs Léman emprisonnés sous l’épaisse couche de glace ! Atteindre le lac est une prouesse que les Russes ont mis vingt-trois ans à réaliser. Au fil des années, les carottes de glace qu’ils remontent à la surface, pour des études paléoclimatiques, ont permis de reconstituer le climat sur 420 000 ans.
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