Le candidat Hulot agite les blogs

En moins de deux heures mercredi dernier, son nom est devenu l’un des principaux « trending topics » (sujet en vogue) sur le réseau social Twitter. Du relai de son annonce aux commentaires tantôt partisans tantôt potaches, aucun doute : l’annonce de la candidature de Nicolas Hulot aux élections présidentielles de 2012 est déjà un événement médiatique en soi. Sur le web, cinq types de réactions se distinguent.

Les réactions humoristiques

Commençons par les plus légères, incarnées par les petites phrases fort répandues sur Twitter, du type « Nicolas sort du bois, je répète, Nicolas sort du bois », « Nicolas bientôt sur orbite » (en référence à Gagarine), « la chasse est ouverte, Hulot part en campagne », « la fin des vacances pour M. Hulot » (en référence à Tati) ou bien encore « Eva Joly et Nicolas Hulot sont sur un vélo... » Certains retrouvent de vieilles vidéos des Inconnus : souvenez vous, « Si tu renonces, on ne t’en voudra pas Nicolas... » :

D’autres optent pour le dessin, tels Martin Vidberg du blog l’Actu en patates... : ... Deligne en Ligne : ... ou bien encore Chimulus pour Urtikan.net : Si cela vous intéresse, notez que David Abiker s’est amusé à passer le nom des candidats à la présidentielles au générateurs automatique d’anagrammes : pour Nicolas Hulot, cela donne un anagramme parfait, "chatouillons". Sans commentaires :)

Les anti-Hulot

Derrière ces réactions amusées, on trouve des réactions plus acerbes d’écologistes qui se méfient du parcours du candidat. Principale critique : Nicolas Hulot est le candidat des shampoings et du grand méchant capital, son parcours ne lui donne aucune légitimité, il va tuer l’écologie politique, ainsi que l’affirme Philippe de Tilbourg sur Danactu résistance :

« La candidature Hulot signe la mort de l’écologie politique. Elle annonce l’avènement d’une écologie soft, apostolique, qui fait le lit de l’oxymore « croissance verte » concocté par les think-tanks américains et que le Medef essaie de nous revendre. Une écologie débarrassée de cet horrible clivage gauche-droite qui fait tant de peine au petit cœur de boy-scout de Hulot. »

D’autres tel Eric de Mon Mulhouse Bio, le qualifient de « Bouffon vert » sans plus de détails, si ce n’est un lien vers le site du Pacte Contre Hulot. Ces attaques de forme sur les fonds financiers de la Fondation oublient souvent les justifications données par le candidat, ainsi que le rappelle Biosphère, qui revient sur ce sujet d’ailleurs afin de défendre le positionnement de Nicolas Hulot.

Les analyses partisanes

Sur intox2007, on reconnaît que les arguments de l’ancien présentateur de TF1 ne sont pas forcément « pollués », qu’il est possible de « migrer d’un bord politique à l’autre ». On attend donc ses propositions concrètes sur l’emploi, la redistribution des richesses, la croissance qualitative et sélective, les innovations et les investissements, les économies d’énergie et les ressources naturelles et la fiscalité...

« C’est là-dessus qu’on verra si Hulot est de gauche ou de droite, tordu ou droit. (...) Et si ce n’est pas le cas : coup de pelle. »

Ça ne rigole pas...

De son côté, Arnaud Gossement se lance dans une justification hasardeuse du positionnement d’Hulot sur laquelle on peut se questionner : est-ce que « centrisme » signifie vraiment « être au-dessus de la mêlée »... ? L’ex porte-parole de France Nature Environnement, proche de Corine Lepage, affirmait sur Terra Eco il y a quelques semaines que Nicolas Hulot ne se lancerait pas dans la campagne. En se présentant, il court le « risque de perdre son rôle et son utilité de vigie écologiste » estime l’avocat qui regrette « que Nicolas Hulot n’ait pas choisi de peser sur l’élection présidentielle en faisant pression sur tous les candidats. En se déclarant candidat tout en sollicitant le soutien d’Europe Ecologie Les Verts, il ne pourra faire pression que sur le candidat de... gauche ».

Dans les rangs écologistes, on a également souligné le flou autour de son avis sur le nucléaire... élément sur lequel Hulot est revenu le jeudi matin sur France Inter, et sur Terra eco.

Les commentaires enthousiastes

Sur le web, ils sont aussi nombreux à saluer la candidature de Nicolas Hulot. La journaliste Dominique Martin-Ferrari estime que cela ouvre la route à une troisième force : si elle ne voit pas Hulot Président de la République, elle n’y voit « pas Eva Joly non plus », ni d’autres « petits candidats qui s’agitent aujourd’hui ». D’ailleurs, interroge-t-elle :

« Quand Coluche s’est présenté, personne n’y croyait. Sa candidature de témoignage a cependant eu plus de sens et de durabilité que bien des petites candidatures à programmes négociables… Après tout , il ouvre à nouveau la route à une troisième force. S’il n’y arrive, ce sera quelqu’un d’autre. L’essentiel est qu’il aura travaillé à re-élargir le cercle de l’écologie à tous ses courants jusqu’à peut être permettre enfin la réalisation de ce groupe parlementaire indépendant entre les deux vieilles majorités ? »

Claude-Marie Vadrot ne cache pas non plus son enthousiasme. Pour lui :

« La candidature de Nicolas Hulot peut être une chance, non pas pour les écologistes, mais, ce qui est beaucoup plus important, pour l’écologie. (...) Il ne s’agit pas (pas encore) pour les écologistes d’accéder à la présidence de la République. Mais, plus simplement et plus efficacement, d’entraîner l’adhésion à un autre développement, à un autre monde (possible), d’une partie plus importante de la population. (...) La perspective de la candidature de Nicolas Hulot prouve que l’on peut changer et cesser d’être un chroniqueur d’un monde ancien pour convaincre l’opinion publique qu’il faut désormais le changer. »

Reste la course aux primaires au sein d’Europe Ecologie les Verts...

Les analyses neutres

... un sujet sur lequel revient Guillaume Malaurie sur son blog :

« C’est une pré-campagne pas facile pour Nicolas Hulot. Il court deux courses : un marathon, celui de la présidentielle elle-même, qui va durer un an. Et un sprint, celui des primaires qui s’achèvera avant l’été et pour lequel sa concurrente directe s’entraîne depuis trois ans. Eva Joly connaît bien et le stade, celui des Verts, et la piste passablement accidentée des qualifications. »

Le journaliste souligne que « l’homme est entier » et que « la démagogie n’est pas franchement son point fort ». Rappelant les engagements du candidat, il estime que celui-ci est passé du « scoutisme politique » à « l’engagement pro » dont l’objectif est de « convaincre aussi les milieux populaires » et « de donner un nouvelle assise sociologique à l’écologie politique qui jusque là ne mord vraiment que dans les centres-villes plutôt aisés ».

In fine, Baptiste, sur le blog des éco-sapiens, profite de ce ramdam médiatique autour de la candidature de Nicolas Hulot pour souligner les dièses et les bémols du candidat. Mais il rappelle surtout cette question, justement posée par le sociologue Bruno Latour dans Politique de la Nature :

« Que faire de l’écologie politique ? Rien. Que faire ? De l’écologie politique ! »

Ecologiser la politique ou politiser l’écologie ? Telle est en effet la question posée par les débats récurrents autour des candidatures écologistes aux présidentielles, et que la ministre de l’Ecologie a d’ailleurs repris à son compte sur l’antenne d’Europe 1 : « Nicolas Hulot va subir la pression des Verts, une pression qui consiste à politiser l’écologie, je pense au contraire qu’il faut écologiser la politique » a déclaré NKM.

L’avenir nous dira si les français apprécient l’engagement politique de Nicolas Hulot, mais une chose est sûre : l’homme a du mérite, et cet engagement forcera le débat sur un ensemble de questions que nous ne pouvons plus éviter de nos jours...

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