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Naomi Klein : « Il faut renoncer à notre désir de dominer la nature »

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Naomi Klein : « Il faut renoncer à notre désir de dominer la nature »
(Légende : des pélicans récupérés en Louisiane après la marée noire de 2010. Crédit photo : MindfulWalker/Flickr)
 
Après la tyrannie des marques puis l’avènement d’un capitalisme du désastre, la journaliste canadienne s'attaque à un nouveau fléau : l’entêtement de l’homme à vouloir épuiser ses ressources. Rencontre.
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Invitée à s’exprimer sur la scène de TED Women, grand rendez-vous des têtes pensantes de ce monde, Naomi Klein a prononcé ce 8 décembre à Washington un discours passionné et alarmiste. Selon l’égérie de l’altermondialisme, il est nécessaire d’adopter le principe de précaution avant d’autoriser les industriels à piller les ressources de la planète avec pour seule motivation la recherche du profit. Selon elle, la catastrophe écologique dans le golfe du Mexique devrait servir de leçon. Après une semaine passée en mer sur les lieux en compagnie de scientifiques chargés d’étudier l’impact de la marée noire sur l’écosystème, Terra eco l’a rencontrée dans les coulisses de l’événement.

Terra eco : Lorsque la fuite a été colmatée dans le golfe du Mexique, les médias ont véhiculé l’idée que l’impact de la marée noire ne serait pas aussi significatif que ce que l’on aurait pu craindre, une grande partie du pétrole s’étant dissipée. Quelle est la réalité sur le terrain ?

Naomi Klein : Le pétrole est toujours présent, tapi dans les profondeurs. L’utilisation de dispersants par BP pour le faire disparaître en surface était bien évidemment une stratégie. Le chef de l’expédition scientifique du bateau sur lequel je me trouvais a expliqué le phénomène en ces termes : nous avons évité un désastre « top-down » (du haut vers le bas, ndlr) et le haut de la chaîne alimentaire du golfe a survécu, mais nous sommes encore à la merci d’un désastre de type « bottom-up » (du bas vers le haut) car c’est le bas de la chaîne alimentaire qui va être le plus affecté : le phytoplancton. Evidemment, on a tendance à moins s’intéresser au sort du phytoplancton car il est moins photogénique que les mammifères marins mais l’histoire mérite d’être racontée.

Vous dénoncez la foi humaine en la technologie. Selon vous, le salut de la planète dépend de la capacité de l’homme à renoncer à son désir de dominer la nature…

Nous avons une telle foi en la technologie que nous avons l’impression qu’elle viendra nous sauver du désastre. Nous avons aussi l’impression que les ressources naturelles sont illimitées. La réalité est toute autre. L’ère des combustibles fossiles à portée de main n’est plus. Nous avons épuisé les ressources accessibles. Nous sommes désormais dans l’ère de “l’énergie extrême” : forages en haute mer, exploitation des sables bitumineux, etc. Prenez l’exemple de mon pays, le Canada : l’exploitation des sables bitumineux de la forêt boréale (comme source de pétrole, ndlr) est une aberration écologique. Elle nécessite d’énormes quantités d’eau et d’énergie et cause pollution et déforestation.

Le principe de précaution est-il l’arme la plus efficace contre le changement climatique ?

Aux Etats-Unis, les climato-sceptiques sont parvenus à convaincre une partie de l’opinion publique que le changement climatique était un complot pour les forcer à se débarrasser de leur 4x4 et engager une redistribution des richesses. Le message que j’ai cherché à véhiculer sur la scène de TED Women est le suivant : nous devons prendre conscience qu’il est impossible de dominer complètement la nature. Et quelle que soit l’exactitude de la science du climat, il existera toujours une partie de la population qui la considérera comme une menace pour l’« American way of life ». Nous devons nous rendre compte que nous ne pourrons jamais résoudre la crise climatique sans changer notre mode de vie et sans une redistribution des richesses.

Au lieu d’attendre un consensus sur le changement climatique, il faut appliquer le principe de précaution et adopter un cadre réglementaire strict pour protéger l’environnement. La décision récente de l’administration Obama d’interdire l’ouverture de nouvelles zones d’exploration gazière et pétrolière en haute mer est une bonne nouvelle. Rappelons que la marée noire de Santa Barbara en 1969 (au large de la Californie du sud, ndlr) a sensibilisé l’opinion publique et les élus sur la nécessité d’adopter un cadre environnemental législatif rigoureux (L’EPA, l’Agence de protection de l’environnement, avait vu le jour l’année suivante, ndlr).

Je pense que le public n’oublie pas non plus les leçons de la marée noire dans le golfe du Mexique. Chaque fois que je me rends dans des meetings réunissant les représentants des communautés affectées par des projets d’exploitation et les représentants de l’industrie pétrolière, j’assiste au même débat. Les industriels promettent que leurs technologies sont au point mais les membres des communautés locales évoquent systématiquement le désastre BP et disent qu’ils ne sont pas prêts à prendre les mêmes risques. Le principe de précaution s’applique donc sur le terrain via une action directe émanant des populations potentiellement affectées par ces projets. Et ce même débat a lieu à travers le monde.

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Correspondante de « Terra eco » en Californie, Anne Sengès est l’auteur de « Eco-Tech : moteurs de la croissance verte en Californie et en France », paru en novembre 2009 aux éditions Autrement.

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