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12-01-2016
Mots clés
Climat
France
Interview

Nature déboussolée : « Au sein de notre laboratoire, personne n’a jamais vu ça »

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Un magnolia aux Lilas (Seine-Saint-Denis), le 17 décembre. Photo envoyée par Laetitia Coryn.

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Une anémone prête à fleurir à Poiseul-la-Ville-et-Laperrière (Côte-d’Or), le 5 janvier. Photo envoyée par Florent Chatitat.

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Petit pois en fleur à Mas-Thibert (Bouches-du-Rhône), la dernière semaine de décembre. Photo envoyée par Patrick Flambard.

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Des primevères en fleurs au Sappey-en-Chartreuse (Isère), le 24 décembre. Photo envoyée par Axelle.

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Des primevères en fleurs au Sappey-en-Chartreuse (Isère), le 24 décembre. Photo envoyée par Axelle.

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Un narcisse à Châteaubriant (Loire-Atlantique), entre le 7 et le 10 décembre. Photo envoyée par Dominique Laporte.

 
Framboises, jonquilles et abeilles ont donné aux fêtes de fin d'année un goût printanier. D'où vient ce réveil précoce de la nature ? Pour quelles conséquences ? Réponses d'Isabelle Chuine, directrice de recherches au CNRS.
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ÉCOLOGIE SOCIÉTÉ ÉCONOMIE
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Floraisons anticipées, bourgeons prêts à éclore, insectes pollinisateurs qui oublient d’hiberner : aux quatre coins de la France, beaucoup ont constaté, et parfois immortalisé, les symptômes d’une nature déboussolée. Isabelle Chuine, directrice de recherches au CNRS (Centre national de la recherche scientifique), s’intéresse à la phénologie des végétaux, c’est-à-dire au lien entre les événements périodiques qui rythment la vie des espèces et les variations saisonnières du climat. Au sein de l’Observatoire des saisons, dont elle est la responsable scientifique, elle s’apprête à analyser les anomalies de décembre-janvier. Avant que les travaux scientifiques – qui s’appuieront sur les contributions d’observateurs bénévoles, notamment celles des lecteurs de Terra eco – nous livrent toutes les clés, la chercheuse donne un premier éclairage sur les causes et conséquences de ces phénomènes étranges.

Terra eco : Notre étonnement face aux iris en fleurs en décembre est-il partagé par les chercheurs ?

Isabelle Chuine : Oui, au sein de notre laboratoire de recherches, personne n’a jamais vu ça. La situation, marquée par des floraisons extrêmement précoces, est exceptionnelle. Des espèces à floraison hivernale, comme le mimosa et le noisetier, ont fleuri dès novembre. Pour d’autres, dont la floraison est normalement printanière – iris, jonquilles, forsythia et lilas –, cela a commencé en décembre.



Comment expliquer ces anomalies ?

Au début du mois d’octobre, nous avons connu une petite vague de froid qui a duré huit jours, suivie de températures extrêmement douces. Cet épisode a envoyé à certains végétaux le signal que l’hiver était passé. Les espèces dont les besoins en froid sont les plus faibles ont alors levé leur dormance et la croissance cellulaire a débuté.

Quelles conséquences cet éveil précoce aura-t-il sur la suite du cycle de vie des végétaux ?

Les floraisons qui ont déjà eu lieu risquent d’être fatales pour la reproduction des plantes. Celles-ci ne produiront vraisemblablement ni fruits ni graines. Certains pollinisateurs sont certes restés en activité mais, en cette période de l’année, les conditions sont loin d’être idéales pour que les fleurs soient fécondées. Et même si elles l’étaient, les conditions de températures, et notamment le gel qu’on attend pour la fin de cette semaine, feraient probablement avorter le processus en détruisant les fruits fécondés.

Ces plantes pourraient-elles refleurir au printemps ?

Pour beaucoup, notamment les espèces ligneuses, ce ne sera pas possible d’avoir une double floraison. Les bourgeons floraux se forment pendant l’été. Il faudra donc attendre la prochaine période estivale pour que les arbres initient de nouveaux bourgeons qui normalement écloront au printemps 2017. Pour les espèces herbacées, la situation est différente et beaucoup, comme les pâquerettes et les pissenlits, pourront refleurir au printemps. Quoi qu’il en soit, nous sommes unanimes pour dire que cela aura un impact sur la reproduction. Les plantes auront investi dans la reproduction, mobilisé du carbone et des nutriments pour rien. Cela a un coût pour elles. Si le phénomène se répétait chaque année, la végétation pourrait ne pas s’en remettre.

Doit-on craindre des conséquences sur l’agriculture ?

A part les amandiers, dans les vergers, les arbres n’ont pour le moment pas encore commencé à fleurir. Ils devraient donc être préservés. En fait, tout va dépendre des conditions météorologiques des semaines à venir.

Vous attendez-vous à voir le phénomène se répéter dans les années à venir ?

Ces floraisons précoces sont le fruit de la juxtaposition inédite de deux phénomènes : vague de froid précoce à l’automne puis températures anormalement douces. Celles-ci sont la conséquence à la fois d’un épisode d’el Niño qui a débuté en 2014 et que l’on peut associer à la variabilité naturelle du climat, et du réchauffement global qui a débuté il y a environ un siècle. Les conditions climatiques que nous connaissons cette année devraient devenir la norme à partir de 2050. A cette même échéance, on voit apparaître, dans les projections de nos modèles, des problèmes de développement pour les espèces tempérées dans les régions méridionales de France.

Collecter des données sur le phénomène en cours est donc crucial ?

Oui. Nous vivons une expérience grandeur nature inédite, qui pose de nombreuses questions mais peut aussi apporter des réponses. Il y a, par exemple, un débat de longue date au sein de la communauté scientifique autour de l’influence de la photopériode – la durée du jour – sur le déclenchement de la floraison. En ce moment, des espèces fleurissent en plein solstice d’hiver. Cela suggère qu’elles n’y sont pas du tout sensibles. On sait également peu de choses sur les besoins en froid de chaque espèce. Leurs réactions au phénomène météorologique actuel nous permettent d’avancer. C’est pourquoi nous avons besoin de multiplier les observations. Comme nous sommes très peu de chercheurs à travailler sur ces questions, les sciences participatives sont un formidable outil.

Si vous avez constaté des anomalies et voulez contribuer par vos observations aux recherches de l’Observatoire des saisons, n’hésitez pas à envoyer une photographie de la plante, avec la date et le lieu de l’observation à contact@obs-saisons.fr


- A voir aussi notre diaporama participatif

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