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1-04-2014
Mots clés
Climat
Monde
Interview

Pourquoi le changement climatique ne ruinera pas notre PIB

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Pourquoi le changement climatique ne ruinera pas notre PIB
(Crédit photo : Images_of_Money - flickr)
 
Un réchauffement de 2,5°C n'entraînerait qu'une baisse de 0,2% à 2% du PIB selon le dernier rapport du Giec. Une broutille ? Non, à en croire l'économiste Stéphane Hallegatte, qui rappelle les limites de l'évaluation économique de l'impact.
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L’économiste Stéphane Hallegatte a participé au chapitre « économie de l’adaptation » du deuxième volet du nouveau rapport du Giec (Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat) diffusé ce lundi.

Terra eco : Selon votre texte, un réchauffement à 2,5°C n’entraînerait qu’une perte de 0,2% à 2% du PIB. C’est peu, non ?

Stéphane Hallegatte : Ce sont des chiffres qui ont fait couler beaucoup d’encre pendant cette semaine au Japon. Ce sont effectivement des estimations très faibles. Simplement parce que les modèles que nous utilisons pour évaluer cette perte de PIB sont d’une simplicité enfantine par rapport à la complexité du problème. Par exemple, on ne prend pas en compte le rôle des catastrophes naturelles qui affectent le développement sur le long terme, alors que leur impact est extrêmement important. On se focalise aussi sur les conséquences d’un réchauffement sur certains secteurs comme l’agriculture parce que beaucoup de travail a été fait sur ce sujet. Mais d’autres secteurs sont négligés parce qu’on ne sait pas les mesurer. On manque notamment de données dans les pays en développement alors que ce sont justement les plus vulnérables au réchauffement. Les chiffres que nous donnons sont donc des estimations très partielles. Si on a fait énormément de progrès sur la compréhension de l’impact physique du changement climatique, je ne pense pas qu’on n’ait fait des progrès équivalents sur le volet économique. Je dirais même qu’on en sait à peine plus qu’il y a sept ans.

On est très loin des chiffres du rapport Stern, qui estimait que le changement climatique pourrait coûter jusqu’à 20 % du PIB ?

Oui mais ce n’est pas comparable : le rapport Stern évaluait le coût du changement climatique si rien n’était mis en place du point de vue politique. Il prenait donc des scénarios avec un réchauffement à 4, 5, 6°C ! Nous, nous estimons l’impact économique avec un réchauffement fixe, à 2,5°C.

Mais pourquoi avoir pris ce chiffre de 2,5°C, alors que les scénarios du Giec évoquent un réchauffement plus important ?

Oui, l’estimation à 2,5°C est extrêmement ambitieuse, plus ambitieuse que ce que l’on peut envisager aujourd’hui. Mais il est plus facile de réfléchir à l’impact d’un changement limité qu’à celui de changements importants. A partir des conséquences d’une année chaude sur l’agriculture, on peut déduire ce que serait une agriculture à 2°C. Mais pour un réchauffement à 4°C, c’est très différent. Extrapoler est difficile. C’est pour cela qu’à mon sens, les chiffres de Stern ne sont pas suffisamment robustes pour servir de base à des politiques. Il extrapolait à partir de notre situation d’aujourd’hui alors qu’un monde à 6°C est fondamentalement différent du nôtre. On est complètement désarmé pour faire une évaluation économique de ce monde-là. Au Japon, le débat a été rude sur ces chiffres de 0,2% à 2% du PIB qui peuvent être plus trompeurs qu’autre chose. La décision a finalement été de les garder mais il faut les prendre comme ils sont… 

Pourquoi les avoir conservés néanmoins ?

Le PIB reste un indicateur important pour le pilotage économique. Même si ce n’est pas ce chiffre qui doit être utilisé pour évaluer la politique climatique. Si on prend les 2 milliards d’habitants les plus pauvres de la planète, même s’ils étaient sévèrement affectés par le changement climatique, ça ne se verrait pas sur le PIB mondial. Tout ce qui pourrait tomber sur la tête de ces gens qui gagnent moins de 1 dollar par jour, serait complètement négligeable par rapport à un tout petit événement qui impacterait les Etats-Unis. C’est vrai que donner une fourchette de 0,2% à 2% du PIB peut donner une fausse impression, faire croire aux décideurs politiques qu’une action n’est pas nécessaire. Mais ne pas prendre de mesures, ça veut dire qu’on oublie l’impact sur les écosystèmes, les paysages, notre jouissance de la nature et qu’on passe sous silence ce qui arrive aux plus pauvres d’entre nous…

Le rapport ne chiffre pas en revanche le coût de l’adaptation ?

Non. Là, on a eu le même type de débat mais on a pris la décision inverse. Le groupe a estimé que la méthodologie appliquée et les hypothèses faites n’étaient pas suffisamment convaincantes. Et on ne voulait pas que ce chiffre, qui n’est pas d’une qualité suffisante, soit utilisé dans les négociations internationales qui se poursuivent aujourd’hui. Aussi le rapport se contente-t-il de dire qu’il faut poursuivre les études sur ce sujet important et qu’il y a un fossé entre les moyens dédiés à ces questions là et les mesures nécessaires. Les mesures nécessaires se chiffreraient plutôt en dizaines ou centaines de milliards de dollars et les moyens en dizaines ou centaines de millions.

Sur la question de l’adaptation, il y a néanmoins quelques avancées…

Oui, la grande avancée de ce rapport du point de vue économique c’est de ne pas voir la question de l’adaptation comme indépendante du développement. Beaucoup de gens parmi les plus vulnérables n’ont pas accès à l’assainissement, à de l’eau traitée pour être consommée, à des formes modernes d’énergie, à des soins de santé. En Europe, les infrastructures sont là, la question c’est : “Combien d’argent faut-il pour les adapter ?” mais en Afrique, elles ne sont pas là. La question n’est pas celle du surcoût mais de se demander comment on finance dès le départ une infrastructure résiliente au changement climatique, avec un impact environnemental limité, et plus accessible aux personnes à petits revenus. Aujourd’hui, on est face à un déficit de 1000 milliards de dollars en termes d’infrastructures. Or, le rapport fait très attention – et c’est sa nouveauté – à ce que la question du changement climatique soit bien lié à cette question de développement.

A lire aussi sur Terraeco.net :

Cinq choses à savoir sur l’alarmant rapport du Giec

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  • pour les grands travaux en période de crise,
    ne faudrait-il pas envisager un réseau de répartition de l’eau pour éviter les inondations et répartir les excédents d’eaux. On l’a déjà bien fait pour le gaz ?!!!

    4.04 à 02h51 - Répondre - Alerter
  • Est-ce que la personne qui a choisi le titre "Pourquoi le changement climatique ne ruinera pas notre PIB" a lu le corps de l’article ? Celui-ci dit totalement autre chose.

    1er.04 à 21h21 - Répondre - Alerter
  • En France nous sommes orientés sur des décennies, avec plus de sécheresses en été et plus d’inondations en hiver ; il faut donc investir sur la maîtrise des réserves d’eau (retenues diverses) et sur les réseau d’irrigation connectés à ces réserves ainsi que l’adoption d’une production agricole très économe en eau ... notre PIB doit passer des dépenses pour réparer et reconstruire, à des investissements pour modifier notre géographie actuelle, de même pour les réseaux d’énergie qui devront être capables de stocker une énorme quantité d’énergie à proximité des grands centres de consommation ( les pertes en ligne ne sont pas négligeables) .

    1er.04 à 10h29 - Répondre - Alerter
    • Le PIB n’a rien à voir avec le bon sens : il se base sur la mesure des bénéfices induits par le pillage des ressources naturelles des contrées étrangères aux pays qui en profitent et imposent mondialement leur vision d’1 économie capitaliste.
      Ok pour des petits bassins locaux de rétention d’eau, pas pour des barrages pharaoniques qui ne profitent qu’aux gaspilleurs et pollueurs.
      Au lieu de réviser le mode de consommation, vous préconisez donc la déportation de populations entières, la destruction de la biodiversité, et la continuité des pertes en ligne justement ! Vous savez ce que fait la France en Afrique pour rester aussi gloutonne ?!

      1er.04 à 10h48 - Répondre - Alerter
      • Les PIB de chaque pays de la planète n’est pas un sujet abordable en futurologie, c’est pourquoi j’ai précisé : en France, et pour maintenant, c’est à dire de 2014 à 2024. ( je ne parle pas de PNB )
        Vous parlez de déportation, je n’en parle pas car la France n’est pas concernée d’ici 10 ans ( si les précautions que je préconise sont immédiatement prises en compte dans nos budgets ( donc notre PIB )

        Pour d’autre pays, c’est trop tard les déportations dues aux sécheresses et inondations font actuellement des ravages, et la justice consiste à aider ces populations à migrer car nous ne pouvons lutter à court terme, contre les forces naturelles que nous avons déclenchées . Nous devons travailler sur deux époques : pour les 50 années qui viennent la cause est perdue et nous devons tenir compte des perturbations inévitables en étant solidaire des populations malmenées , pour les 50 années suivantes nous devons, dès maintenant, investir pour rester en dessous d’un réchauffement global de 2°C .

        1er.04 à 17h58 - Répondre - Alerter
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