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La voie sinueuse du recyclage des bois toxiques

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La voie sinueuse du recyclage des bois toxiques
 
Où finissent les vieilles traverses de chemins de fer et les poteaux électriques ou téléphoniques qui ont été traités avec des produits chimiques ? Dans les cimenteries bien souvent, quand ce n'est pas dans le champ ou le barbecue du voisin...
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ÉCOLOGIE SOCIÉTÉ ÉCONOMIE
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La France compte 50 millions de traverses de chemin de fer en bois, 12 millions de poteaux téléphoniques et un nombre incalculable de poteaux électriques en bois (même ERDF ne sait combien il y en a…). Des matériaux traités à la créosote (issue du goudron) et pour certains au CCA (chrome, cuivre et arsenic). « Cela permet de tenir 40 ou 50 ans et de sécuriser le réseau électrique. Si on mettait des produits courants du commerce ils faudrait retraiter les poteaux tous les 10 ans, ce qui représenterait un coût supplémentaire pour les clients », justifie Richard Lejeune, responsable du développement durable chez ERDF. « L’équation est simple : une moins forte efficacité, ce serait l’obligation de changer les traverses plus souvent, c’est-à-dire diminuer le nombre de train en circulation », glisse Samuel Burnet, chargé de mission environnement à Réseau Ferré de France (RFF).

Charbon de bois à la créosote

Problème : ces produits sont toxiques (voir ci-dessous). Pour les nouveaux poteaux posés, le béton remplace de plus en plus le bois. France Telecom a abandonné la créosote en 2000 et l’arsenic en 2006. Mais ERDF n’a laissé de côté que l’arsenic et RFF, qui n’employait pas de CCA, traite toujours ses traverses à la créosote. Les entreprises publiques assurent mener des recherches pour des alternatives, pour l’instant sans succès du point de vue technique et économique. « La créosote de type C utilisée actuellement est beaucoup plus raffinée et contient donc moins de benzo-a-pyrène », ajoute cependant Samuel Brunet.

Ce qui ne résout pas le problème pour les vieux poteaux et traverses mis au rebut, et qui finissaient historiquement en piquets de clôtures agricoles, contours de boulodrome voire de potager. Une situation dénoncée depuis plusieurs années par Robin des bois, qui rappelle qu’il s’agit de déchets classés comme dangereux, dont la réutilisation est limitée à des cas précis et la vente interdite aux particuliers.

Mais c’est surtout la mise en lumière par l’association de la réutilisation des traverses comme charbon de bois - 18 000 tonnes ont ainsi été « recyclées » en 2008 - qui a mis le feu aux poudres et abouti à la signature en juillet 2010 d’une charte sous l’égide du ministère du Développement durable.

Vieilles habitudes

« Il y avait une sorte de tradition de revente aux particuliers, admet Samuel Burnet. Nous avons arrêté toute cession en 2008 et 2009 pour les grossistes et professionnels. La signature de la charte a acté un processus d’amélioration déjà enclenché ». Des types de pratiques que l’on retrouve aussi chez les collectivités, propriétaires des réseaux d’électricité basse et moyenne tension : « Les agriculteurs voisins demandaient de les récupérer pour faire des clôtures. Pour eux, cela constituait une matière première gratuite et parfois même une compensation pour les désagréments des travaux », reconnaît Daniel Belon, directeur adjoint délégué au développement durable de la Fédération nationale des collectivités concédantes et régies (FNCCR).

Depuis, même si la charte n’exclut pas la possibilité d’une réutilisation avec garantie de reprise, « les retours des adhérents montrent que c’est très compliqué à mettre en place et que cela n’offrirait pas forcément beaucoup de garanties car les nouveaux propriétaires n’y penseraient pas forcément, ce qui incite à la destruction ». Si la FNCCR sait que « certains syndicats ont passé des marchés de retraitement », impossible de savoir combien précisément sur les 2 000 à 3 000 tonnes déposées chaque année par ses adhérents, la Fédération ayant pas encore fait le point.

Fin de vie en cimenterie

Chez les structures centralisées comme RFF, France Telecom et ERDF, la situation est plus claire. Quoique. ERDF, qui met à la casse 2 000 à 3 000 tonnes de poteaux par an, en cède encore à des agriculteurs. « On prend évidemment beaucoup de précautions. On remet une notice qui indique de ne pas scier, brûler et que l’on s’engage à reprendre les poteaux en fin de vie », assure Richard Lejeune.

Le reste est envoyé, en attendant les résultats d’un appel d’offres, dans l’Allier, sur le site de la Société de Recyclage des Bétons (SRB), qui s’apprête à doubler sa capacité. Broyés, les poteaux finissent en combustibles dans les fours de cimenteries, avec les 9000 tonnes annuelles de France Telecom et 25 000 tonnes de traverses de RFF. Ce dernier a également lancé un appel d’offres et évoque la piste de la production d’électricité et de chaleur dans des centrales de cogénération. Mais transformait encore tout récemment des traverses en charbon de bois, solution critiquée par Robin des Bois et qui serait en voie d’être écartée.

L’association estime en outre à 100 000 tonnes la production de déchets de RFF, bien plus que les chiffres livrés par la compagnie. Mais Jacky Bonnemains, président de Robin des bois se montre patient : « On revient d’une situation où il y avait tellement peu de comptabilité, dépourvue de traçabilité, que cela ne va pas se rétablir d’un coup de baguette magique. Je pense qu’il faudra au moins 2 ans. »

Annonces sur Internet

Autre problème : « la charte n’empêche pas les importations de traverses. C’est une filière que l’on a beaucoup de mal à maîtriser, et le gouvernement aussi semble-t-il. Il va falloir faire un effort prochainement sur cette question », ajoute Jacky Bonnemains.

Les paysagistes et aménageurs de jardins friands de bois de récup’ peuvent donc toujours se fournir. En 30 minutes, nous avons dégoté sur Internet des dizaines d’annonces. Et pour les particuliers ? « Depuis juillet 2010 nous ne [leur] vendons plus de traverses de réemploi », nous indique l’un des annonceurs, qui nous propose des traverses neuves « traitées écologiquement aux sels ne contenant ni chrome ni arsenic ». Ce qui n’est pas le cas de tout le monde…

Mais les risques pour Médor et la nappe phréatique, et la perspective de se retrouver à l’avenir avec un déchet dangereux sur les bras nous a refroidi… Pour ceux qui ont construit leur terrasse en traverses SNCF, Robin des Bois indique la marche à suivre pour limiter les risques et se retourner contre le vendeur. Inutile de dire que le barbecue est déconseillé...


Créosote et CCA : les risques

La créosote, obtenue à partir de la distillation du goudron, est constituée de centaines de composés chimiques, dont des hydrocarbures aromatiques polycycliques (HAP) et le benzo-a-pyrène (BaP). Des substances qui lui valent un classement comme cancérogène de catégorie 2 (forte présomption de danger pour l’homme). Le principal risque étant les cancers de la peau, ce qui explique son interdiction totale dans les jouets, les parcs, meubles de jardin etc. Elle reste cependant autorisée à de faibles concentrations pour un usage professionnel, bien que le comité scientifique européen de la toxicité, de l’écotoxicité et de l’environnement ait rendu un avis inquiétant à ce sujet.

L’arséniate de cuivre chromé (CCA), contient, comme son nom l’indique, de l’arsenic, cancérogène de catégorie 1 (danger certain pour l’homme). Son utilisation est interdite depuis 2007, mais pour les produits antérieurs à cette date le réemploi de bois traité est autorisé pour un certain nombre d’applications, comme les piquets de clôtures. Avec un risque de mauvaise information du détenteur final...

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Journaliste, collaborateur régulier pour Terra eco.

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