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20-10-2010
Mots clés
Biodiversité
Monde
Chronique

Comment ça, j’ai une tête de vermine ?

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Comment ça, j'ai une tête de vermine ?
(Crédit photo : Fritz Geller-Grimm)
 
Grande première sur « Terra eco », nous accueillons un chroniqueur invertébré : un grand capricorne. A l'occasion de la Conférence sur la biodiversité de Nagoya, il est furieux et tient à revendiquer l'utilité des insectes. Attention, ça pique !
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ÉCOLOGIE SOCIÉTÉ ÉCONOMIE
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Cette semaine, vous êtes des milliers de représentants du genre Homo (genre constitué d’une seule espèce, laissez moi rire un bon coup, parce que nous les insectes, question diversité, c’est autre chose…) à vous réunir à Nagoya, au Japon, pour la Conférence des parties de la Convention sur la diversité biologique. Vous y parlerez, entre autres sujets très importants, de l’économie des écosystèmes et de la biodiversité, le fameux rapport TEEB (The Economics of Ecosystem and Biodiversity) de l’économiste indien Pavan Sukhdev.

L’objet de ce rapport est d’évaluer la contribution de la biodiversité à l’économie, à travers notamment ce que vous appelez les « biens et services rendus par les écosystèmes ». Et donc, une fois que vous aurez calculé combien ça rapporte, vous pourrez en déduire les dégâts que causerait à l’économie mondiale l’érosion – l’effondrement ? – de la biodiversité. C’est pour cela qu’on appelle parfois la TEEB le « rapport Stern » de la biodiversité : le but est de chiffrer le coût de l’inaction, au lieu de simplement chiffrer le coût de l’action. Parce qu’évidemment, protéger la biodiversité, ça a un coût. Et si modeste soit ce coût, en temps de crise, ce sera toujours trop cher. Mais si en face du coût de la protection (mettons, pure hypothèse de travail, 1% du PIB), le coût de l’inaction – laisser la biodiversité partir en quenouille – s’avère cinq, six, ou sept fois plus cher que le coût de l’action, vous faites quoi ? Vous agissez, bien sûr. Enfin, ce n’est même pas si sûr, parce qu’il faut s’attendre, comme toujours avec vous, à un déferlement de scepticisme, orchestré par des gens qui mettent leur talent et leur efficacité rhétorique au service du doute, de la peur et de l’inaction… Mais c’est un autre débat.

Revenons pour l’instant sur ces fameux « services rendus par les écosystèmes ». Les économistes à l’œuvre sur la TEEB se sont largement inspirés d’un autre travail, colossal, réalisé sous l’égide de l’ONU en 2005 : le « Millenium Ecosystem Assesment » ou « évaluation des écosystèmes pour le millénaire ». Et dans ce rapport, apparaissait une classification de ces fameux services. Y sont notamment distingués :

- des services d’approvisionnement : nourriture, fibres, matériaux, combustibles issus de la biomasse, ressources biochimiques ou génétiques
- des services de régulation : régulation locale ou globale du climat, épuration des eaux, recyclage des déchets, pollinisation, fixation des sols et lutte contre l’érosion, lutte contre les ravageurs de l’agriculture, etc.
- des services culturels, récréatifs, spirituels
- des services de soutien : la production primaire de matière organique (notamment grâce à la photosynthèse) et le recyclage des nutriments essentiels à la vie.

Tous les êtres vivants participent de ce travail d’équipe à l’échelle planétaire : de la bactérie au séquoia géant, en passant par les coraux ou les requins. Mais, et ce n’est pas pour faire du corporatisme, permettez-moi de regarder d’un peu plus près le travail que nous, les insectes, réalisons pour vous. Et vous verrez, c’est du lourd !

La pollinisation : c’est nous… Le seul travail des abeilles est estimé à 110 milliards d’euros. Plus du tiers de l’agriculture mondiale en dépend directement. Le traitement et le recyclage des déchets, c’est, avec les champignons et les bactéries, encore nous : nous sommes les Veolia et les Suez de la nature. Pas un tronc d’arbre, pas une feuille, pas une déjection, pas un cadavre d’animal qui ne soit traité, décomposé, enfoui et recyclé par nous. Pas d’agriculture, pas d’élevage, pas de foresterie possible sans nous. La lutte contre les ravageurs, c’est encore nous : carabes, coccinelles, syrphes et autres insectes carnassiers sont les protecteurs de vos légumes, de vos fraises, de vos vignes ou de vos arbres fruitiers… Les services récréatifs ou culturels ? Que serait la Provence sans les cigales ? Que serait un jardin sans papillons, sans cétoines dorées, ou la forêt sans grand capricorne, votre serviteur ?

Alors, vermine, excusez moi. Si l’apparence de nos larves (ben oui, nos jeunes à nous, les insectes), que vous confondez souvent avec des vers, vous rebute, pensez un peu à ce que notre travail vous rapporte, ça vous évitera peut-être un coup de bêche ou de talon malencontreux…

Et dans l’immédiat, chers délégués, travaillez bien à Nagoya : il y va de votre économie, mais aussi et surtout de notre destinée commune. A nous, insectes ; à vous, humains ; et à celle d’une bonne partie de ce qui vit sur Terre.


Cerambyx cerdo est ambassadeur des coléoptères sur le web. Vous pouvez retrouver ses autres chroniques ici

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