Un nouveau monde |
Par Pierre JAPHET |
21-09-2012
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Les véritables limites à la croissance |
Pour la majorité d’entre nous, les vacances sont déjà loin... Comme moi, vous en avez peut-être profité pour lire un pavé qui trônait depuis plusieurs mois sur votre table de chevet ? Le mien, c’était Les limites à la croissance (The limits to growth). Pas exactement un roman de plage, je vous l’accorde. Mais je ne suis presque pas allé à la plage, alors...
Plus connu sous les intitulés "Rapport du Club de Rome" ou "Halte à la croissance", cet ouvrage de Donella et Dennis Meadows et de Jorgen Randers est paru pour la première fois en 1972. Il est considéré à juste titre comme la première sonnette d’alarme adressée à la communauté internationale concernant les dégâts environnementaux et humains causés par un développement industriel incontrôlé et par les dérives d’une société de consommation débridée. Inutile de vous dire que l’ouvrage reste d’actualité, et ce d’autant plus qu’il vient d’être mis à jour et, cherry on the cake, traduit en français !
Le propos du livre est simple : nous ne pouvons pas poursuivre une croissance illimitée de notre économie mondiale dès lors que cette croissance repose sur une consommation toujours plus importante de ressources naturelles qui sont, de fait, disponibles en quantité limitée. Rien de très original ? Certes aujourd’hui, mais en 1974 ils furent parmi les premiers à le dire. Et surtout ce qui rend l’exposé passionnant, c’est qu’il s’appuie sur une modélisation mathématique du monde réalisée par les auteurs. Leur modèle "World 3" permet en effet de simuler les évolutions du bien être, de l’espérance de vie et des ressources naturelles en fonction de notre adaptation aux limites de la planète et surtout de notre réaction aux signaux qu’elle nous envoie. Je ne vous surprendrai pas en vous disant que les scénarios les plus plausibles ne sont pas brillants brillants...
Mais au fait quelles sont ces limites à la croissance ? On pense bien sûr aux ressources non renouvelables comme le pétrole, le charbon ou le gaz. Tous les minerais également. Mais surtout, il y a l’eau, les terres fertiles, la forêt, les plantes, les poissons, etc. Ce sont des ressources dites renouvelables, mais encore faut-il leur laisser le temps de se renouveler et/ou se dépolluer, ce que nous ne faisons globalement pas.
Pourtant, en refermant ce livre, je me disais qu’il y a une limite à la croissance qu’il n’aborde pas et qui n’est évidemment pas modélisée dans World3. Cette limite dont je veux parler, c’est celle de l’absurde.
Cette limite de l’absurde, cela fait longtemps que nous l’avons atteinte et dépassée. Et c’est peut-être elle qui finira par nous faire changer de cap, alors que nous atteignons d’autres limites, plus physiques. Car les prises de conscience et les solutions alternatives se multiplient partout dans le monde : systèmes d’échanges locaux (SEL), monnaies fondantes, villes en transition, permaculture, bio-dynamie, commerce équitable, amap, crowdfunding, économie de fonctionnalité, économie circulaire, slow food, slow cities, mouvement des indignés,... Autant de manifestations d’une transformation lente mais profonde, qui cherche à redonner du sens et à remettre l’économie au service de l’humain, et non l’inverse.
D’ailleurs, même les auteurs des Limites à la croissance en parlent à leur manière, en fin de compte. En effet, après leur brillant exposé scientifique, ils n’hésitent pas une seconde à conclure en disant qu’une des solutions à ces limites, c’est l’amour. Plus d’amour. Tout simplement. Autant vous dire que j’ai passé de bien belles vacances.
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Maire adjoint (EELV) du 11e arrondissement de Paris, Chargé des Transports et des Déplacements |
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