publicité
haut
Accueil du site > Actu > Le marketing expliqué à ma mère > Quand les marques se la jouent caméléon
Article Abonné
27-03-2008
Mots clés
Marques, Marketing

Quand les marques se la jouent caméléon

Taille texte
{#TITRE,#URL_ARTICLE,#INTRODUCTION}
 
Comment un seul produit peut-il séduire des millions de consommateurs aux habitudes de vie et d’alimentation si différentes ? En faisant imaginer qu’il n’a été conçu que pour eux. Voici la recette internationale d’un marketing local.
SUR LE MÊME SUJET

Quel est le point commun entre un Tié Bou Dien dégusté à Dakar, un Feijoada brésilien et un boeuf bourguignon ? Réponse : un petit bouillon cube qui se mijote à toutes les sauces et se vend à près de 8 milliards d’unités dans le monde. Cette recette de marketing international réussie est signée Maggi. Charles Croué, enseignant et chercheur en marketing, la résume ainsi : « A l’heure de la globalisation, de la course à la croissance et de la pression sur les coûts imposée par les actionnaires, le marketing compense en donnant l’impression au consommateur de chaque pays que le produit a été fabriqué uniquement pour lui. »

Lancé à l’heure de l’industrialisation de la vielle Europe par un minotier Suisse, Maggi a été propulsé à l’international par Nestlé, dont il fut l’une des premières acquisitions en 1947. Sa stratégie caméléon, en forme d’immersion culturelle et gastronomique, s’oppose au modèle américain, symbolisé par le Coca-Cola, au goût unique et planétaire. Mais la standardisation de masse héritée du taylorisme n’a plus la cote. Même McDonald’s a abandonné ses steaks pour des blancs de volaille en pays musulman et proposé des menus tartiflette en France cet hiver. Car, dans l’agroalimentaire, s’adapter aux papilles locales est une condition sine qua non pour s’implanter. Au Sénégal, où Nestlé a ouvert une usine en 1973, Maggi se fond totalement dans le décor : « En donnant des noms wolofs à ses arômes pour spécialités culinaires locales, en adoptant un packaging propice à la vente à l’unité, Maggi s’est “ sénégalisé ”. La marque a aussi intégré à sa publicité les codes culturels locaux, souhaitant par exemple un “ bon N’Dogou ” au moment de la rupture du jeûne », commente Marjolaine Blanc, professeur de marketing à Dakar.

Maggi sponsorise même Destins croisés, une telenovela culte, et figure au top 5 des annonceurs télé de l’agence de marketing locale Omédia. Sans oublier le hors-média : concours, festivals, podiums sur les marchés et parrainage des innombrables échoppes qui portent ses couleurs. En Côte-d’Ivoire, la marque a même soutenu les débuts du groupe de musique Magic System ! Danone a, lui aussi, très tôt investi pour diversifier ses produits : au Brésil, les laitages sont plus colorés et parfumés à la mangue. En Chine, les yaourts à boire sont élaborés sans lactase (lire aussi ci-dessous).

Des partenariats peu avouables

Longtemps, le degré zéro du marketing international a consisté à se mettre à portée des pays émergents – marchés au faible pouvoir d’achat mais au fort potentiel – en appauvrissant discrètement les produits, en baissant leur niveau de gamme. Ainsi, nul besoin d’exporter les modèles d’appareils photo numériques les plus performants, trop chers, en Afrique ou en Amérique du Sud, où Volkswagen a recyclé ses Coccinelles jusque dans les années 1990 ! « Mais le sous-produit ne marche plus et les entreprises doivent ruser, comme Renault avec la Logan : cette voiture à bas coût possède une identité propre, mais emprunte ses éléments à des modèles antérieurs, ce qui permet d’amortir les coûts de conception. A conditions de sécurité égales, elle n’utilise que 1 400 composants contre 4 000 en moyenne. Enfin, elle est transformable à l’envi en berline, 4x4 ou pick-up, selon les goûts », détaille Charles Croué. Désormais, lancer une marque hors de ses frontières nécessite une prospection de longue haleine, puis une infiltration du marché. Ceci entraîne parfois des partenariats peu avouables : « Aux Etats-Unis, Nestlé Waters s’est d’abord appuyé sur le réseau de distribution de Coca-Cola. Comme cette alliance aurait pu ternir son image en Europe, le groupe n’a commencé à communiquer qu’une fois que ses eaux minérales ont été positionnées sur le marché et que la joint-venture avec Coca a été dissoute », révèle Eliane Karsaklian, enseignante en marketing et chercheuse.

Sociologues et ethnologues à la rescousse

Du simple changement des voix off d’un clip télévisé, à la réalisation de clubs clients ou de sites Internet couleur locale, la communication à l’international emprunte toutes les voies. A Hollywood, les studios Disney se sont même spécialisés dans la réalisation de films d’animation commerciaux, mais seulement pour les pays où la mise en scène de femmes ne fait pas scandale. Au sein des cellules marketing des multinationales, des ethnologues ont rejoint les psychologues et les sociologues. Les campagnes de pub s’y élaborent dans un constant va-et-vient entre les maisons mères et leurs filiales.

Pour chaque marché et chaque produit, des fact books, sorte de bibles marketing, récapitulent les chiffres clés, études d’impact et spécificités nationales. Un solide enracinement local et une connaissance fine des modes de consommation sont ainsi au coeur de la stratégie de L’Oréal. Après avoir expérimenté ses nouvelles gammes ethniques sur les minorités des Etats-Unis, elle est partie à la conquête de l’Asie. Depuis 2005, son centre de recherche « cheveux et peaux », basé à Shangai, s’appuie sur l’expérience des marques cosmétiques locales rachetées et dépense sans compter pour la formation des employés locaux. Parce que les Chinois aussi le valent bien ! —


Danone : fin du supplice chinois Depuis 1997 et sa prise de participation de 51 % au capital de Wahaha, le leader chinois de l’eau minérale, Danone réalisait 10 % de son chiffre d’affaires global en Chine, soit 1,4 milliard d’euros. Mais, en 2005, Danone découvre que son partenaire fait profiter d’autres entreprises des réseaux de distribution et de la marque commune. Ne parvenant pas à reprendre le contrôle de Wahaha par un rachat total, la firme engage en 2006 une bataille judiciaire internationale. Des procédures mises en sommeil en décembre 2007. Coïncidence ? C’est à cette époque que le chef de l’Etat français, accompagné d’une forte délégation de chefs d’entreprises, s’est rendu en Chine pour négocier de gros contrats commerciaux.

Sources de cet article

Marketing international, un consommateur local dans un monde global, Charles Croué, édition De Boeck (2006), 46,50 euros.

Marketing international Stratégie locale, campagne globale, Eliane Karsaklian, Editions de l’organisation (2007), 25 euros.

Faites réagir vos proches, diffusez l'info !
Vous aimez Terra eco ? Abonnez-vous à la Newsletter
TOUS LES COMMENTAIRES
COMMENTAIRES SÉLECTIONNÉS
RÉPONSES DE LA RÉDACTION
Trier par : Plus récents | Plus anciens
Affichage : Voir tout | Réduire les discussions
Soyez le premier à réagir à cet article !
PUBLIER UN COMMENTAIRE

Un message, un commentaire ?

  • Se connecter
  • Créer un compte

publicité
1
publicité
2
    Terra eco
    Terra eco
publicité
3
SPIP | squelette | | Plan du site | Suivre la vie du site RSS 2.0
publicité
bas