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22-06-2012
Mots clés
Environnement
France

Nicole Bricq victime du pétrole de Guyane ?

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Nicole Bricq victime du pétrole de Guyane ?
(Crédit photo : Sénat)
 
Déclarations contradictoires, millions de dollars versés et éviction de ministre. Le projet de forage pétrolier au large de la Guyane est le premier accrochage vert de l'ère Hollande.
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ÉCOLOGIE SOCIÉTÉ ÉCONOMIE
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C’est une affaire en eaux profondes et à rebondissements qui se déroule au large de la Guyane. Le 13 juin dernier, le ministère de l’Ecologie jetait un pavé dans la mare, en annonçant une suspension des forages pétroliers en construction dans la région à pas moins de six kilomètres de profondeur. Nicole Bricq, nouvelle ministre de l’Ecologie, souhaitait refondre le Code minier – un code qui date de 1810 et dont les exigences environnementales restent très faibles - en préalable à tout nouveau forage, comme le souhaitent les associations environnementales.

Dix ans de recherches pétrolières stoppées net

Un coup dur pour Shell, dont les affaires sont très avancées dans la région. Avec Total et Tullow Oil, l’entreprise a lancé ses premières recherches pétrolières - des études sismiques - dès mai 2001. Les résultats étant prometteurs, le conglomérat a poursuivi la prospection jusqu’à construire un premier puits de forage d’exploration en mars 2011. Avec succès : en septembre dernier Shell annonçait des « résultats concluants ». En clair, il y a bien du pétrole en quantité suffisante dans ce puits. Les énormes investissements consentis par les pétroliers - le coût d’un seul puits d’exploration est estimé à 100 millions de dollars (76 millions d’euros) tandis qu’une seule étude sismique coûte environ 10 millions d’euros – sont tout près de porter leurs fruits. Ne reste plus ensuite qu’à obtenir la signature de deux arrêtés préfectoraux complémentaires, le 14 juin dernier, pour lancer quatre nouveau forages d’exploration.

C’est là que le ministère de l’Ecologie s’interpose. Shell assure n’être au courant de rien, et dénonce alors l’attitude du gouvernement. L’entreprise assure perdre un million d’euros par jour d’immobilisation. Très vite, le vent semble tourner. Plusieurs communiqués émanant du ministère de l’Outre-mer et du ministère de l’Ecologie et insistant sur l’intérêt économique du projet pour la Guyane le confirment. Shell annonce même dès vendredi 15 juin s’attendre à une « solution satisfaisante ».

« Toute puissance d’une multinationale »

La décision tombe finalement mercredi 20 juin. Les parlementaires guyanais annoncent, après une rencontre avec le ministre des Outre-mers, Victorin Lurel, que le préfet de Guyane a eu « l’autorisation de signer les arrêtés préfectoraux », dernière étape avant la nouvelle campagne d’exploration pétrolière dans les eaux guyanaises.

Contactées ce jeudi, les ONG dénoncent un « rétropédalage ». « Le gouvernement fait marche arrière, ce qui montre la toute puissance du lobbying d’une multinationale comme Shell », s’alarme Christian Roudgé, coordinateur de Guyane Nature Environnement. « Il n’y a eu ni enquête publique ni véritable étude d’impact. On ne sait pas ce que ferait Shell en cas de marée noire, alors que l’écosystème local est l’un des dix plus riches au monde ! ». Le même jour, Arnaud Gossement, avocat spécialiste du droit de l’environnement se veut toutefois moins pessimiste : « Le processus de recherche était engagé, le gouvernement ne pouvait tout simplement pas retarder la signature des arrêtés ». Celui-ci espère que la réforme du Code minier « aura bien lieu dans les semaines qui viennent » et se réjouit que « Nicole Bricq travaille sur le sujet dès le début de son mandat ».

Est-ce que Shell a demandé sa tête ? C’est possible »

Nouveau coup de théâtre dans la soirée de ce jeudi 21 juin. A 21h, l’annonce du remaniement ministériel tombe. Delphine Batho, jusqu’alors ministre déléguée à la Justice remplace Nicole Bricq qui devient ministre du Commerce extérieur. Plusieurs élus écologistes ainsi que Mediapart y voient immédiatement un lien avec le rétropédalage de la semaine écoulée. « J’ai l’impression que Nicole Bricq a perdu son ministère à cause de son arbitrage sur les forages en Guyane. Elle a perdu face au lobby de Shell. D’ailleurs Shell avait dit quelque temps avant qu’il avait rencontré l’État et qu’il était rassuré. Mais sur quoi ? Est-ce que Shell a demandé sa tête ? C’est possible », s’interroge Benoît Hartmann, porte-parole de France Nature Environnement. « La réalité des faits, c’est quand même une trahison par rapport aux principes de l’écologie parce que Nicole Bricq avait à juste titre refusé de signer des autorisations de forages en eau profonde au large de la Guyane, ce qui a entraîné une bronca », s’avance même Chantal Jouanno, sénatrice UMP et ancienne secrétaire d’Etat à l’Ecologie.

Quelle attitude va adopter le gouvernement après l’éviction de Nicole Bricq, chef de file des défenseurs d’une réforme de la législation en la matière ? Ni le ministère de l’Ecologie, ni celui de l’Outre-mer n’était disponibles pour répondre à cette question. La construction des prochains puits d’exploration en Guyane semblent en tout incontournable. A moins que le recours juridique qu’entendent déposer les associations environnementales ne soit accepté.

Et pour les autres recherches pétrolières, notamment au large de Marseille ? Et pour d’éventuels forages d’exploitation cette fois ? « Avant toute chose, il faut lancer deux débats publics pour réformer le cadre juridique qui n’est pas du tout adapté à ces activités. Le premier débat doit porter sur l’exploitation de notre sous-sol, en particulier pour la recherche d’hydrocarbures. Le second doit poser la question de l’attitude de la France face aux ressources fossiles. Pourquoi devrait-t-on refuser le pétrole du large de la Guyane et accepter celui venant des côtes africaines, souvent exploité dans des conditions déplorables ? », défend Arnaud Gossement. Un discours auquel était sensible Nicole Bricq. Reste à connaître la position de Delphine Batho en la matière.

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Non, nous n’avons pas à « sauver la planète ». Elle s’en sort très bien toute seule. C’est nous qui avons besoin d’elle pour nous en sortir.

13 commentaires
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  • Or Bleu Contre Or Noir : Non aux hydrocarbures en mer en Guyane

    Le collectif citoyen et apolitique “Or bleu contre Or noir”, siégeant à Cayenne, Guyane Française, s’élève contre ce projet. Nous demandons la suspension des activités pétrolières en cours, au large de nos côtes et un moratoire sur l’attribution de permis de recherche en mer, sur l’ensemble de la ZEE française. http://or-bleu-contre-or-noir.org/

    28.06 à 19h17 - Répondre - Alerter
  • Le projet réunit Shell (45%), Total (25%) et Hardman Petroleum (27,5%)
    "Selon les chiffres de Shell, l’exploitation du bassin pétrolier guyanais, à 6 000 mètres de profondeur, pourrait produire 300 millions de barils. De quoi diminuer en partie la facture énergétique française en diminuant les importations d’or noir. Le coût du projet, de l’exploration à l’exploitation, a été évalué entre 5 et 10 milliards de dollars", selon Le Monde.

    Donc, si je ne suis pas trop con (mais je ne doute pas qu’un expert faux-nez de l’industrie pétrolière vienne rapidement me prouver le contraire !) :

    constantes utilisées :
    - pour rappel : un baril, c’est loin d’être une montagne d’or noir, ça fait 159 litres...
    - consommation mondiale journalière de pétrole : 85 millions de barils
    - Prix actuel du baril : 62€ (80$)

    ce qui nous donne :
    - "Productivité" : 300/85 = 3 jours et demi de consommation mondiale
    - Coût d’extraction du baril (échelle basse) : 5 000 000 000/ 300 000 000 = 16,67$
    - Coût d’extraction du baril (échelle haute [1]) : 10 000 000 000/ 300 000 000 = 33,33$
    [1] ne jamais croire aux échelles hautes des pétroliers !
    - Coût pour l’environnement et les biotopes sous-marins guyanais et les services rendus gratuitement par iceux à l’homme : non communiqué...

    ... et les bénéfices suivants au cours actuel pour le consortium :
    - base échelle basse : 80-16,67*300 000 000 = 19 milliards de $
    - base échelle haute [2] : 80-33,33*300 000 000 = 14 milliards de $
    [2] ne toujours jamais croire aux échelles hautes des pétroliers et intégrer le fait que le prix du pétrole va exploser, inexorablement !

    Je ne prends même pas la peine de ramener les chiffres au niveau de la consommation française de barils (environ 1,8 millions de barils par jour), vu que Shell ne s’est jamais franchement avéré francophile et encore moins philanthrope :p Mais bon, grosso modo, 300 millions de barils, ça ne fait même pas six mois de consommation nationale... Ah ! et l’argument principal déployé, c’est le renforcement de l’indépendance énergétique française...

    25.06 à 12h10 - Répondre - Alerter
  • Seule la colère de la Terre en personne, pourra remettre à leur place, ces humanoïdes qui se prennent pour des dieux avant m^me de mériter d’être humains !
    Incapables de gratitude, juste pressé(e)s de vendre jusqu’à leur âme respectif. Le temps des vrais comptes à rendre, est arrivé !

    25.06 à 10h35 - Répondre - Alerter
  • en un mot comme en cent, honteux ! D’autant que le renoncement majeur sous-jacent à cette éviction, à savoir une révision en profondeur de l’obsolète aberration qu’est le code minier français, rouvre la porte à la sinistre litanie du recours continu aux énergies fossiles ! Vous verrez que ré-émergeront gaz et pétrole de schistes et autres joyeusetés du même baril !

    Quant au lobbying ayant conduit au débarquement de Mme Bricq, je ne pense pas qu’il soit le seul fait de Shell, mais bien de l’ensemble des toutes-puissantes oil sisters, et qu’il a été gentiment relayé par M. Obama lors de ses rencontres récentes avec M. Hollande.

    Enfin, vu les enjeux écologiques majeurs en jeu dans ce dossier, ça ne laisse rien présager de bon pour ce qui concerne des dossiers sous moratoire (aéroport de Nantes) ou [presque] enterrés par Mme Bricq (annulation de la concession à Vinci pour le GCO de Strasbourg.)

    On ne prend pas les mêmes mais on recommence, en somme ! > :(

    25.06 à 10h32 - Répondre - Alerter
  • Combien de fonctionnaires français pour surveiller le chantier : 2
    Combien de fonctionnaires anglais pour les puits en mer du Nord (deep water) : une centaine.
    Que le gouvernement fasse des offrandes pour qu’il n’y ait pas de problème sur le chantier...

    25.06 à 10h20 - Répondre - Alerter
  • Ecoeurant !
    Le nouveau président n’a pas de courage. Les chiffres de perte annoncés par les pétroliers sont dérisoires par rapport à leurs profits et par rapport aux dégats colossaux que leur activité génère. En plus Shell, c’est l’entreprise la plus polluante au large des cotes africaines. Détruire les mangroves c’est leur 3° spécialité après les profits et le lobbying...

    25.06 à 08h50 - Répondre - Alerter
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