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15-06-2012
Mots clés
Energies
France
Interview

Suspension des forages en Guyane : « Une sage décision »

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Suspension des forages en Guyane : « Une sage décision »
(Crédit photo : hakonthingstad - flickr)
 
Le ministère de l'Ecologie a suspendu mercredi 13 juin les permis d'exploitation pétrolière de Shell au large du département d'Outre-mer. Deux ans après la marée noire dans le golfe du Mexique, les habitants et les écologistes sont rassurés.
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Christian Roudgé est coordinateur de l’association Guyane Nature Environnement.

Le groupe Shell s’est dit « stupéfait » face à la décision de Nicole Bricq de suspendre l’exploitation pétrolière en Guyane. Ce choix vous paraît-il justifié ?

Bien sûr. Nos craintes ont enfin été entendues. Nous sommes très heureux mais aussi très surpris. A la veille du lancement des travaux, c’est un coup de théâtre. (Shell n’attendait plus jeudi 14 juin que deux arrêtés préfectoraux complémentaires délivrés par les autorités de Cayenne, ndlr). Le gouvernement a pris une décision qui nous paraît sage, celle de dire « on va prendre le temps d’avoir un cadre juridique » avant d’autoriser un quelconque forage. Cela ne veut pas dire que l´avenir de l’industrie pétrolière en Guyane est à jamais arrêté. Il est simplement suspendu.

La ministre de l’Ecologie avançait comme argument qu’il n’y a pour l’heure « aucune garantie ». Quelles lacunes voyez-vous dans ce projet pétrolier ?

Les projets de prospection et d’exploration d’hydrocarbures sont régis par le code minier. Mais ce code ne prévoit rien ! (Il date du 21 avril 1810, ndlr). Depuis le début (les gisements de pétrole ont été découverts le 9 septembre 2011 à 150 km au large de la Guyane, ndlr), nous exigeons qu’avant toute attribution de permis, il y ait une enquête publique. Mais il n’y en a eu aucune. C´est anticonstitutionnel. Pourtant l’article 7 de la charte de l’environnement révisé en 2005 stipule que la population peut « participer à l’élaboration des décisions publiques ayant une incidence sur l’environnement ». En Guyane, la population est concernée à 100% mais n’a jamais été concertée. Nous réclamons aussi une garantie face aux risques de catastrophes. Nous n’avons pas vraiment d’inquiétudes face aux incidents mineurs, comme des rejets de fioul en mer. Ce que l’entreprise a déclaré dans son dossier d’ouverture des travaux nous paraît suffisant en termes de moyens et d’organisation. Mais pour ce qui est des accidents graves du type marée noire, Shell n’a jamais dit comment elle réagirait.

Vous avez rencontré les dirigeants de Shell. Ces échanges ne vous ont pas rassurés ?

Pas du tout. Il y a eu un dénigrement de la part de l’entreprise. Je suis très ferme là-dessus. Nous avons discuté avec le président de Shell France, Patrick Roméo, à Cayenne. Ses réponses étaient hallucinantes, en porte-à-faux avec le contenu de son dossier sur les impacts environnementaux. Il prétendait qu’en cas d’incidents graves, les nappes de pétrole n’atteindraient jamais nos côtes. Ses études disaient le contraire. Il s’est même contredit en ajoutant que si le fioul arrivait sur le continent, la nature n’aurait aucun problème à se régénérer car les mangroves étaient autonettoyantes. On va où là ?

Voir la vidéo ci-dessous : Patrick Roméo lors d’une réunion publique à Cayenne explique que les risques de pollution sont faibles, voire nuls.

Le risque zéro n’existe pas. Quel serait l’impact d’une marée noire sur un territoire aussi fragile que la Guyane ?

Ce serait terrible. L’écosystème local est un des dix plus riches au monde. La biodiversité est exceptionnelle. On compte trente espèces de cétacés, dont la baleine bleue, cinq espèces de tortues, dont la tortue Luth (inscrite sur la liste des espèces en voie de disparition, ndlr), 933 espèces de poissons et des invertébrés endémiques. Sur la côte, les fonds vaseux sont une zone de reproduction qui héberge des centaines d’animaux, du crabe au caïman. La Guyane héberge une partie de la plus grande mangrove du monde qui s’étend du Brésil au Vénézuela. L’environnement local est extrêmement riche, mais aussi très fragile.

Au-delà des risques environnementaux, l’industrie pétrolière serait une nouvelle ressource économique, dans un département où le taux de chômage atteint 21%. Comment réagit-on sur place ?

Les Guyanais oscillent entre deux réactions. D’un côté, oui les forages pourraient créer des emplois et certains regrettent la suspension des permis. Mais de l’autre, les gens sont très sensibles à leur environnement et les propos de Shell n’ont pas rassuré. Les habitants sont méfiants, car ils ne perçoivent pas uniquement la marée noire comme un désastre environnemental. Ici, cela signifie la fin des deux principales industries locales : le tourisme et la pêche.

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Née au bout de la Loire, un pied dans l’Atlantique, l’autre embourbé dans la terre, elle s’intéresse aux piafs et aux hortensias, observe ses voisins paysans et leurs élevages bovins. Elle enrage devant les marées noires. Licenciée en lettres, elle sort diplômée de l’Institut pratique du journalisme de Paris en avril 2012. Elle scrute les passerelles qui lient les hommes à leurs terres. Parce que raconter la planète, c’est écrire au-delà des pommes bio et du recyclage de papier.

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  • Bonjour
    sincèrement, Christian Roudgé a du mal lire le communiqué de Nicole Bricq ! Car une lecture attentive permet de comprendre que les motivations de cette remise à plat n’étaient pas environnementales mais uniquement… économiques !
    Car que dit la suite de ce communiqué ? Les réserves pétrolières de Guyane « pourraient permettre d’assurer à la France un approvisionnement important en hydrocarbures, à coût réduit par rapport au prix du marché » et « l’exploitation des gisements guyanais contribuera à libérer des marges de manœuvre budgétaires pour le financement de la transition énergétique. »
    Preuve que cette vraie fausse remise à plat ne dérange personne et surtout pas les pétroliers, Shell s’esf fendu aujourd’hui d’un communiqué pour encourager à la recherche d’une solution satisfaisante sur ce dossier. Il est vrai que dès hier, Nicole Bricq et Arnaud Montebourg avait jugé utile de préciser que "conformément au principe de continuité et de respect des engagements de l’État, il n’est pas envisagé de remettre en cause les permis déjà octroyés pour la recherche de pétrole et de gaz conventionnel".
    Décidément, du nucléaire au pétrole guyanais, avec Hollande, l’environnement, ça commence déjà à bien faire !

    15.06 à 17h24 - Répondre - Alerter
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