Objectif ? « Combler le fossé qui s’est creusé entre les citoyens et la justice », selon Sébastien Huyghe, rapporteur UMP du texte à l’Assemblée. Des « citoyens assesseurs » pourront donc participer au jugement des délits punis d’une peine égale ou supérieure à cinq ans d’emprisonnement. Oui mais pas tous les délits. Les députés ont mis de côté - notamment - les atteintes à l’environnement – pourtant introduites par le Sénat - de la liste des infractions concernées. La preuve que les autorités font peu de cas des affaires d’environnement, selon Stéphane Cottineau, avocat spécialisé dans le droit de l’environnement.
Terra eco : Que pensez-vous du retrait des atteintes à l’environnement de la liste des infractions examinables par les jurés populaires ?
Stéphane Cottineau : Une chose au préalable. Je ne suis pas, sur le principe, favorable à l’introduction des jurés populaires au tribunal correctionnel. Je pense que ça va compliquer une justice qui n’a déjà pas beaucoup de moyens. Déjà, les dossiers traînent, l’administration est débordée. Avec les jurés populaires, on risque d’ajouter en complexité. C’est dommage, à mon sens, d’engager des moyens là-dessus.Ceci étant, le fait que les députés essayent de faire échapper les infractions au code de l’environnement de cette réforme n’est pas une bonne nouvelle. La volonté d’introduire ces jurés avait, d’après le législateur, pour objectif une meilleure prise en compte des victimes. Si les atteintes à l’environnement sont exclues, cela voudrait dire que les députés ne souhaitent pas plus de sévérité à l’égard de ces infractions. C’est cette philosophie qui m’inquiète. D’autant qu’elle est en corrélation avec le discours du gouvernement sur l’environnement depuis quelques temps.
Terra eco : Les infractions environnementales sont-elles moins prises au sérieux ?
Oui, aujourd’hui, nous avons du mal à les faire poursuivre. Il y a beaucoup de peines alternatives. Les affaires passent plutôt par des procédures de médiations pénales ou de de CRPC,comparution sur reconnaissance préalable de culpabilité« plaider-coupable à la française ». Ce sont de bonnes procédures dans l’absolu, mais pour les petits délits. le problème c’est qu’on renvoie des dossiers très importants vers ce type de procédure. Moi, je traite beaucoup de dossiers de pesticides et je me souviens d’une affaire d’intoxication d’une salariée agricole avec des préjudices de santé importants.Or, on est arrivé à la plus petite réponse répressive : la composition pénale. En clair, si nous n’avions pas réagi, elle se serait retrouvée dans un bureau devant un délégué du procureur mais pas à une vrai audience. C’est l’encombrement judiciaire qui est en partie responsable. Mais il me semble aussi que les affaires environnementales sont soit plus facilement renvoyées vers des procédures alternatives que d’autres. Or, c’est le pouvoir du parquet que de poursuivre ou pas, de choisir la procédure en suivant une politique pénale fixée par le Garde des Sceaux. vraiment
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