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24-05-2012
Mots clés
Agriculture
Economie
France

Epargne : ma vache est une vache à lait

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Epargne : ma vache est une vache à lait
 
Fini, les « subprimes » irresponsables : aujourd’hui, on met ses billes dans le local et le concret. Et pourquoi pas dans un cheptel ? Investisseurs et éleveurs s’y retrouvent et la crise conforte les pionniers du placement bovin.
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Ses petits-enfants hériteront d’un joli troupeau de vaches. Jean-Claude Janes, 72 ans, retraité du Val-de-Marne, peut dormir sur ses deux oreilles. Pourtant, en-dehors de ses souvenirs d’enfant chez ses oncles et tantes, le monde paysan n’avait rien à faire dans le sien, lui qui a longtemps travaillé dans l’automobile. Mais depuis qu’il a investi dans un cheptel, l’homme regarde la météo d’un autre œil. « Mon placement n’a rien à craindre des cours de la Bourse, s’amuse-t-il. J’ai plus à perdre avec la sécheresse ! »

Jean-Claude Janes est l’un des 1 000 petits investisseurs devenus propriétaires de têtes de bétail par l’intermédiaire de la régie Elevage et Patrimoine. Presque un oxymore pour qui n’a pas la fibre rurale. Installée à Meyzieu (Rhône), en banlieue lyonnaise, cette structure est la seule à proposer ce type d’investissement en France. Pour Pierre Marguerit, 62 ans, son directeur général, il s’agit pourtant d’un simple placement à 3,5 %, mieux que le livret A, « avec de l’éthique en plus ».

Le principe est simple. L’épargnant, au lieu d’apporter ses économies à une banque lambda qui les investira dans des centrales à charbon chinoises ou des subprimes toxiques, se porte acquéreur de vaches laitières hexagonales. Lesdites vaches sont confiées à un éleveur qui les loue contre une rémunération en nature. Le système descend du « contrat de gazaille » du XIIIe siècle, une association de bon aloi entre capital citadin et travail rural. En droit français, le « bail à cheptel » est d’ailleurs inscrit dans le code civil napoléonien. « Il suffisait de s’en souvenir », explique Pierre Marguerit, ancien gestionnaire de biens à la banque Rothschild, devenu il y a plus de trente ans le pionnier de l’investissement en cheptel.

« Mieux que l’immobilier »

A 1 350 euros l’animal en moyenne, l’épargnant se constitue un capital-troupeau bien vivant, en fonction de la taille de ses économies. La régie Elevage et Patrimoine s’occupe de la paperasse et confie l’achat et la gestion des vaches à la régie technique Gestel. Celle-ci trouve un éleveur qui souhaite louer son cheptel. Ensuite, on laisse faire la nature et on attend le vêlage. L’éleveur vend le lait et les jeunes mâles, conserve une partie des femelles pour renouveler son troupeau, et doit au propriétaire l’autre partie. Chaque année, l’épargnant peut recevoir un chèque, ou réinvestir en laissant croître ses génisses. « Impossible de spéculer : le processus naturel est trop lent », note Pierre Marguerit. Avec un taux de croissance moyen de 3,5 %, il faut un peu plus de vingt ans pour doubler un troupeau initial de dix vaches, ainsi que son épargne. Jean-Claude Janes a, lui, commencé par une dizaine de bêtes en 1981. « C’était mieux que l’immobilier, je n’avais pas besoin d’emprunter pour investir. » Son troupeau a fait des petits, et atteint aujourd’hui 80 têtes ! Parti avec l’idée de se constituer un complément de revenus pour sa retraite, il a finalement décidé d’épargner pour ses descendants. « Je ne sais pas ce que l’avenir leur réserve. Or, une vache, on l’oublie vite, et ainsi la pelote grandit tranquillement, à l’ombre. »

Sur les collines de l’Isère

Certaines sont peut-être en train de brouter sur les collines de l’Isère. A Saint-Victor-de-Cessieu, la Ferme des vaches heureuses est l’une des 800 exploitations à avoir opté pour un bail à cheptel. Richard Durand, 51 ans, loue un tiers de ses 100 têtes de bétail depuis plus de huit ans. En 2005, cet éleveur a décidé de s’agrandir en s’associant avec deux collègues, et de transformer lui-même une partie de son lait en produits frais. « Nous avions des emprunts de plusieurs centaines de milliers d’euros sur le dos », se souvient-il. Son calcul est vite fait : mieux vaut mettre son capital dans une fromagerie qui permettra de créer lait, beurre, yaourt et fromage blanc, des produits à valeur ajoutée, que dans un troupeau. « Mes parents sont restés endettés même après leur retraite, mais ne pas posséder les bêtes était inconcevable, assure-t-il. Louer nos vaches, c’est une révolution ! »

Aujourd’hui, la Ferme des vaches heureuses produit un million de litres de lait par an, dont un septième est transformé à domicile et distribué aux commerçants de la région. Cette activité représente plus de 40 % du chiffre d’affaires de la ferme. « Et ça a du sens : je m’adapte à la demande locale et je sais ce que devient mon lait ! », explique fièrement Richard Durand. Pour Pierre Marguerit, il est justement grand temps d’investir dans le local et le concret. La crise financière de 2008 l’a conforté dans son credo. « Les demandes d’information ont quadruplé », note-t-il. Selon l’ancien banquier, le monde cherchera bientôt de quoi se nourrir. Bien malins ceux qui auront mis leur oseille aux champs. Les autres pourront toujours se lamenter : « Adieu veau, vache, cochon, couvée. » —


Agriculteurs : la grosse dette qui monte, qui monte

En 2009, l’endettement moyen des exploitations agricoles s’élevait à 147 500 euros. Ce chiffre a triplé en trente ans. Il concerne plus particulièrement les grosses exploitations de plus de 150 hectares qui ne représentent qu’un quart des exploitations françaises, et cumulent plus de la moitié de l’endettement. Mais les moyennes exploitations peuvent également être dans le rouge, en particulier au moment de l’installation. L’endettement des exploitations gérées par des agriculteurs de moins de 40 ans s’élève en moyenne à 180 000 euros. En 2009, plus de la moitié des flux de trésorerie générés par l’activité agricole a servi à rembourser les dettes. —

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