Et voilà. Ça n’a pas raté. Lundi matin, vous êtes arrivé au bureau, avec une heure de retard. Et vous avez été reçu. « Le changement d’heure, c’est pas fait pour les chiens », vous a (délicatement) glissé votre patron. Non, en effet, le changement d’heure c’est plutôt fait pour le portefeuille et – virage écolo oblige - pour la planète.
Décidé au lendemain du choc pétrolier de 1974, son objectif était d’économiser de l’énergie. Comment ? « En faisant correspondre au mieux les heures d’activité avec les heures d’ensoleillement pour limiter l’utilisation de l’éclairage artificiel », justifie encore aujourd’hui le site du ministère de l’Écologie. C’est simple. En hiver, un réveil plus tardif évite d’allumer les lampes en arrivant au bureau. En été, quitter la couette plus tôt permet de bénéficier du soleil jusqu’à une heure tardive. Convaincante, la mesure s’est généralisée à l’Europe en 1980 et fut synchronisée aux quatre coins de l’UE à partir de 1998.
Mais voilà. A Terra eco, on ne se contente pas de belles paroles. On veut des preuves ! Le changement d’heure permet-il vraiment de faire des économies d’énergie et donc d’épargner (un peu) la planète ? C’est le moment de ressortir notre bonne vieille calculette.
Effet minime sur la conso électrique...
L’économie réalisée, c’est un groupe de travail réunissant le ministère de l’Industrie, EDF et l’Ademe qui l’a mesurée. En 1995, elle s’élevait à 1,2 Twh – soit la consommation de la ville de Bordeaux à l’époque. En 2003, elle était revue très légèrement à la hausse : 1,3 Twh. Avec le changement d’heure en 2003, c’était donc 168 000 tonnes de CO2 épargnés à l’atmosphère grâce à une simple manip sur son radio-réveil.Mais voilà, si les Français s’éclairent grosso modo autant qu’en 2003, leur consommation globale d’électricité a augmenté. Déjà minime, l’économie due au changement d’heure a donc proportionnellement rétréci. Je m’explique. En 2003, 1,3 Twh d’éclairage en moins représentait 0,29% de moins au compteur de la consommation d’électricité globale. Aujourd’hui le même chiffre ne pèserait plus que 0,27% sur la balance française.
Et entre temps, les ampoules basse consommation ont débarqué dans nos logis. A elles seules, celles là devraient permettre aux Français de consommer 8 Twh de moins par an à l’horizon 2016. C’est l’Ademe qui le dit. Nos 1,3 Twh économisés de départ font désormais pâle figure.
Les économies d’énergie réalisées par le passage à l’heure d’été sont donc dérisoires, pis, celui-ci pourrait faire carburer les compteurs. En 2008, le Bureau national de recherche économique américain a plongé dans les foyers de l’Indiana. Et noté que la petite modification bi-annuelle, conduit en fait à une augmentation des besoins en chauffage le matin au début du printemps et en climatisation les soirs d’été. Résultat : une surconsommation de 1%. Bigre. On n’est plus tout à faire sûr d’adhérer au changement d’heure.
... mais effets indésirables sur l’environnement
Surtout s’il a des effets directement néfastes sur l’environnement. Selon un rapport du Sénat, paru en 1995, « la pointe de circulation coïncidant avec les heures les plus chaudes de la journée augmente les concentrations d’ozone par phénomènes de photo-oxydation ». En clair, en prenant sa voiture à l’heure où le soleil tape encore, on empoisonnerait davantage l’atmosphère. Citant l’étude d’une agence pour la qualité de l’air réalisée en 1986, le Sénat précise que le passage à l’heure d’été entraîne une « augmentation de la concentration maximale en ozone, d’en moyenne 10% et plus pour la ville de Paris. » Et le rapport de souhaiter « l’abandon de ce dispositif artificiel » pour revenir à « un déroulement plus naturel du temps. »Mais la Commission européenne n’est pas décidée à vous épargner les humiliations du lundi matin. Certes, « les économies effectivement réalisées sont difficiles à déterminer et, en tout cas, relativement limitées », soulignait-elle dans un rapport en 2007. Mais « le régime actuel ne constitue pas un sujet de préoccupation dans les États membres de l’UE ».
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