Ça ressemble à un scénario hollywoodien, assez classique. Une catastrophe naturelle, un beau gosse rebelle et des bons sentiments. Dans la vie réelle : le séisme à Haïti de janvier 2010, l’acteur « bad boy » Sean Penn et son arrivée à Port-au-Prince avec un avion rempli de médicaments, six jours seulement après le drame. Ajoutez une belle image de « Sean le dur » avec un pistolet Glock à la ceinture. Puis une de « Penn l’humanitaire » assurant dans le magazine Vanity Fair vouloir aider les Haïtiens… avant d’évoquer sa rupture avec l’actrice Robin Wright. Un étrange goût reste au fond de la gorge à la lecture du script. Sauf que sous la couche de paillettes, quelque chose résiste.
D’abord Sean Penn n’est pas passé à Haïti, il s’y est installé. Hormis une tournée pour lever des fonds, assister à la soirée des Oscars, être auditionné au Sénat américain sur la situation à Haïti et quelques semaines de tournage, voilà onze mois que l’acteur américain vit dans un camp, sous une tente. Plus à Malibu. Rien à voir avec les visites express de Nicole Kidman, Shakira ou Demi Moore. Très vite après le tremblement de terre, il a monté une ONG, J/P Haitian Relief Organization–, avec l’aide de la jet-setteuse et philanthrope d’origine bosniaque Diana Jenkins. Depuis, sur l’ancien golf du quartier chic de Pétionville, en périphérie de Port-au-Prince, il administre un camp de 55 000 personnes. Soins médicaux, approvisionnement en nourriture et en eau, logistique…
Croisade personnelle
L’acteur, qui avait déjà participé aux secours à la Nouvelle-Orléans après l’ouragan Katrina en 2005, se révèle un bon gestionnaire. Et c’est (presque) sans surprise qu’il est officiellement nommé, par les autorités de l’ONU et les autres ONG, chef du camp au printemps. Lui-même a mis de l’eau dans son vin. Alors qu’il goûte peu les militaires – il s’était fermement opposé à la guerre en Irak –, il collabore avec les forces américaines sur place et a même demandé à Barack Obama de ne pas retirer les contingents du pays. A Pétionville, 50 personnes travaillent avec lui et 200 autres dans le pays. En 2011, son quotidien sera encore haïtien, promet-il. « Il faut aussi préparer le départ des gens du camp pour qu’ils bénéficient d’abris plus pérennes. Autant dire que je suis là pour longtemps », confiait-il, en novembre, à Libération. Bien sûr, cet engagement a des airs connus de croisade personnelle et de rédemption. Il n’était sans doute pas le mieux placé pour étriller l’éphémère candidature présidentielle du chanteur Wyclef Jean qui ne se déplaçait sur place qu’en 4X4 et sous escorte. Mais sa grande gueule est salutaire et il maîtrise sa fonction d’électron libre. En 2010, Sean Penn s’est sans doute trouvé. Son dernier film a beau s’intituler Fair Game, à Haïti, il ne joue plus. —
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