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21-12-2013
Mots clés
Social
Société

Pourquoi le nombre de stages a-t-il doublé depuis 2006 ?

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Pourquoi le nombre de stages a-t-il doublé depuis 2006 ?
(Crédit photo : fedephoto.com pour Génération précaire)
 
Le nombre de stages en milieu professionnel aurait plus que doublé en six ans. Qui, parmi les étudiants stagiaires, les entreprises et les établissements, a le plus à y gagner ?
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« Back on stage. » Voilà sans doute ce que se disent, dans un soupir un rien grinçant, les jeunes diplômés qui, à la fin de leur cursus, ne trouvent pas de boulot, mais des stages, des stages et encore des stages. C’est pour limiter les excès que la députée socialiste Chaynesse Khirouni doit présenter au début du mois de janvier une proposition de loi pour mieux encadrer les stages étudiants en milieu professionnel. Et il y a urgence : le nombre de stages a explosé entre 2006 et 2012, d’après les chiffres du Conseil économique social et environnemental (Cese). Il serait passé de 600 000 à 1,6 million par an. Comment expliquer cette hausse vertigineuse ? [1]

Un tiers des étudiants sont stagiaires au moins une fois par an

Pourquoi ? Plusieurs raisons à cela : la loi LRU, relative aux libertés et responsabilités des universités et promulguée en août 2007, a ajouté aux missions du service public de l’enseignement supérieur l’insertion professionnelle des futurs diplômés. Pour répondre à cette mission, « tous les cursus supérieurs se sentent obligés d’envoyer leurs étudiants en stage, qui est vu comme l’outil idéal pour préparer au monde professionnel. Et comme les établissements se comparent les uns aux autres et se concurrencent, ils imposent toujours plus de stages », explique le sociologue du travail Dominique Glaymann, qui a co-écrit Le stage – Formation ou exploitation ? (Presses universitaires de Rennes, 2013).

Dans les faits, le ministère de l’Enseignement supérieur relève que, en 2012-2013, 32% des étudiants à l’université ont effectué au moins un stage. S’ils ne sont que 3% en première année de licence, leur pourcentage grimpe à 63% en master 2. Dans les écoles d’ingénieur, ce sont neuf étudiants sur dix qui partent en stage chaque année, soit autant qu’en deuxième année de DUT (diplôme universitaire de technologie). Une situation qui arrange bien les établissements, explique le sociologue : « Dans une période de pénurie budgétaire, le recours aux stages est un moyen de pallier les insuffisances de budget : pendant que les étudiants, qui ont payé une inscription annuelle, sont en stage, ils ne sont pas dans les locaux, ce qui engendre de moindres frais pour leur établissement. »

Qui tire profit du stage ?

Pour les étudiants, ce passage à la pratique, qui n’existait pas il y a vingt ans, est désormais perçu comme un incontournable. « Ils ont intériorisé le fait que les stages vont faciliter leur insertion professionnelle. » Mais dans les faits, « les études montrent que, cinq ans après l’entrée sur le marché du travail, on ne mesure pas d’effet bénéfique des stages au global », rappelle Dominique Glaymann. Pire selon lui, « l’inflation de stages aboutit à la multiplication de stages sans contenu ou de stages d’exploitation, qui détruisent des emplois junior. Car la tentation est grande de substituer des salariés mal payés par des stagiaires très mal payés (30% du Smic, soit 406 euros par mois après deux mois pour des stages de plus de deux mois, ndlr), qui font tout ce qu’on leur demande parce qu’ils sont notés à la fin ». Le rapport du Cese confirme ce point : « La croissance du nombre de stages étudiants [...] résulte également du chômage des jeunes diplômés prêts à accepter des stages, faute de mieux. » Jeunes diplômés qui vont jusqu’à payer des inscriptions fictives à la fac ou en école uniquement pour pouvoir obtenir des conventions de stage...

« La vérité c’est que les entreprises sont assaillies de demandes de stage, alors même qu’elles ne cherchent pas forcément de stagiaire ! », réagit Jean-Christophe Sciberras, président de l’association nationale des directeurs des ressources humaines (ANDRH). « Il faut s’occuper d’un stagiaire, l’accompagner, le gérer et ça prend du temps. Généralement, si on accepte d’en prendre un, c’est parce qu’il nous a été recommandé par un collaborateur ou par quelqu’un de notre réseau », poursuit-il. En somme, les stagiaires seraient accueillis pour rendre service et non pour rendre des services...

Entre stagiaires, CDD et intérimaires, la concurrence est rude

Quant au raisonnement qui consiste à dire que « comme il coûte moins cher qu’un jeune diplômé, les employeurs se jettent dessus, il est faux », martèle le DRH. Car l’intérêt d’une entreprise, quand elle embauche, est bien de faire un investissement de long terme, ajoute-t-il. Pour autant, Jean-Christophe Sciberras reconnaît qu’il peut y avoir des « détournements par les employeurs », « mais pas tant sur des postes de jeunes diplômés que sur des CDD ou des missions d’intérim. Le recours à un stagiaire peut en effet, dans certains secteurs comme la manutention, la logistique ou l’administration, être préféré ». D’autres secteurs comme la communication, l’édition et le journalisme, ne sont pas en reste.

« La demande croissante de stages par les étudiants et leurs établissements crée pour les entreprises un effet d’aubaine qui, en période de crise, joue à plein », souligne Dominique Glaymann. « C’est bien contre ce travail masqué, ces stages où l’on exige d’être opérationnel tout de suite et de prendre des responsabilités, comme si on était salarié, que nous nous battons », indique Isabelle – l’une des porte-parole de Génération précaire. Le collectif milite pour que les stages s’ancrent dans un parcours pédagogique, que l’établissement de formation s’implique dans le suivi du stagiaire, en lien avec l’entreprise ou l’association qui l’accueille, et que le stagiaire acquière un vrai statut.

Une fois n’est pas coutume, les militants précaires et l’ANDRH sont, sur ce point précis, sur la même longueur d’onde. Jean-Christophe Sciberras lui aussi souhaite que « des garanties minimales soient données aux stagiaires comme le respect des horaires, la prise en charge des frais de transport, l’accès aux titres restaurant, etc. ». Des dispositions qui devraient figurer dans la proposition de loi socialiste, soutenue par le gouvernement et qui devrait passer sans difficulté lors de son examen, mi-février, à l’Assemblée, pour une entrée en application en septembre 2014.


Faut-il des quotas de stagiaires ?

C’est certainement le point qui sera la plus discuté à l’Assemblée – et qui devrait d’ailleurs être tranché par décret. Le collectif Génération précaire milite pour que le nombre de stagiaires soit plafonné à 10% des effectifs de l’entreprise. Les TPE de moins de dix salariés sont contre. Pour le président de l’ANDRH, imposer des quotas serait très mal vu : « D’un côté le ministère de l’Education nous demande d’accueillir toujours plus de stagiaires, de l’autre le ministère du Travail nous dit qu’on risque d’avoir des pénalités si on dépasse un certain quota. Attention, à continuer ainsi, les entreprises vont être dissuadées d’accepter les stages qui sont utiles aux étudiants ».

[1] En préalable, un point sur ces chiffres : ils sont forcément imprécis, car les stagiaires ne sont pas recensés par le ministère de l’Enseignement supérieur. Ils ne sont pas inscrits à l’Urssaf, n’apparaissent pas dans le registre unique du personnel des entreprises. Aucune instance n’est en charge de contrôler les entreprises, les inspecteurs du travail s’occupant des salariés. De plus, les chiffres du Cese incluent les stages en entreprise des lycéens professionnels, et les stages effectués par les futurs enseignants en écoles de professorat. Malgré ce flou dans le nombre exact de stagiaires étudiants, la tendance est claire : la hausse est nette.

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