« La gestion de l’eau est en première ligne »

Terra eco : Avec le réchauffement climatique, des épisodes de sécheresse comme celle qui sévit actuellement en France risquent de devenir de plus en plus fréquents. L’agriculture française s’y prépare-t-elle ?

Christiane Lambert : En effet, il faut s’attendre à une hausse des températures de 0,5 à 1,5°C d’ici à 2050, à un allongement des périodes estivales sèches, à une alternance plus marquée des sécheresses et des inondations. Il y a aussi le problème de la hausse du niveau de la mer, qui pourrait toucher le Languedoc-Roussillon notamment. Il n’y a donc pas une, mais des solutions à trouver. Ceci dit, la réflexion avance vite. La sécheresse actuelle a relancé le travail dans le cadre du Plan national d’adaptation au changement climatique. Début juin, Nicolas Sarkozy a annoncé un plan quinquennal de création de retenues d’eau pour faciliter l’irrigation...

Justement, la FNSEA s’est prononcée en faveur de plus d’irrigation. Est-ce la principale solution envisagée face au réchauffement climatique ?

En effet, la gestion de l’eau est en première ligne. Mais on ne parle plus de l’irrigation comme il y a 15 ans. L’utilisation est plus précise, plus règlementée, avec des techniques comme le goutte-à-goutte dans l’arboriculture. Aujourd’hui, seules 14% des surfaces cultivées sont irriguées en France. Pour les maraîchers, c’est pourtant une condition sine qua non de la survie de leur exploitation. Donc soit on fait en sorte d’augmenter la disponibilité en eau, soit on va perdre des cultures et des emplois. Il faut stocker l’eau quand elle tombe en abondance, l’automne et l’hiver. Mais aussi dévier des rivières dans des lacs de retenue. Et organiser des réseaux collectifs, car tous les agriculteurs ne pourront pas assumer ces investissements.

A part l’irrigation, réfléchissez-vous à d’autres solutions ?

Tout dépend des régions : quand il n’y a pas de problème d’accès à l’eau, il n’y a pas de raison de stopper des cultures gourmandes comme le maïs. Mais sinon, des fermes expérimentales testent d’autres variétés fourragères comme le trèfle, la luzerne ou la vesce, qui pousse en hiver. C’est ensuite une question de réglementation : il faudrait pouvoir récolter plus tôt quand la sécheresse menace, ou resemer nos champs quand les plantes sont jaunies. Autre casse-tête : les A.O.C. Dans le vin surtout, on va devoir revoir les cahiers des charges pour attribuer ces appellations, car les vendanges plus précoces modifient le taux de sucre et d’alcool dans le vin. Enfin, que faire des abricots ou des nectarines qui, récoltées trois semaines plus tôt, arrivent en même temps que les fruits d’Espagne et subissent une rude concurrence ? Là, il n’y a pas vraiment de solution... Pas question de faire comme avec le muguet, qu’on a mis au frigo car il avait fleuri avant le 1er mai !

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