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29-11-2009
Mots clés
Climat
Grande-Bretagne
Portrait

La côte anglaise s’érode sur la toile

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La côte anglaise s'érode sur la toile
 
Comment visualiser les traces du changement climatique des siècles passés ? Grâce aux peintures. C’est le pari d’un ingénieur de sa Gracieuse Majesté.
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ÉCOLOGIE SOCIÉTÉ ÉCONOMIE
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(Envoyée spéciale à Londres)

Il y a l’avant et l’après. D’un côté, une aquarelle figurant les falaises de l’île de Wight, au sud de l’Angleterre, en 1809. De l’autre, la photo de ces mêmes rivages, effondrés, deux cents ans plus tard. Entretemps, l’érosion a fait son travail, avec lenteur mais assurance (voir ci-dessus). « Les processus naturels se poursuivent et s’accélèrent », lâche simplement Robin McInnes. Ingénieur côtier de formation, ce Britannique a pressenti, il y a quelques années, le potentiel caché des peintures endormies aux murs des musées locaux ou dans le salon de quelques amateurs. Des centaines de mètres d’histoire contant le passé et capables de prédire l’avenir du paysage côtier britannique soumis à l’érosion naturelle et au changement climatique.

En 2008, il décroche une bourse auprès du Musée national maritime de Greenwich et du Crown Estate, l’organisme chargé de gérer les biens de la Couronne britannique, dont une grande étendue de terrains côtiers. Son étude portera sur l’île de Wight et les côtes voisines du Hampshire, une région riche par son instabilité – glissements de terrain, inondations, érosion – et largement illustrée par les peintres des siècles passés.

Le béton grignote la mer

« A la fin du XVIIIe siècle, à cause de la Révolution française puis des guerres napoléoniennes, les gens ne pouvaient plus faire de grands tours d’Europe. Ils ont alors exploré les parties les plus intéressantes du Royaume-Uni comme l’île de Wight. A chaque départ de vacances, ils voulaient rapporter des souvenirs. La photographie n’existait pas encore, alors ils commandaient des peintures. » D’où une myriade d’œuvres « photographiant » l’île sous tous les angles.

Janvier 2008. Sa bourse en poche, Robin McInnes se lance à l’assaut des catalogues des musées, traquant les œuvres réalisées entre 1770 et 1920, repérant ici un village noyé par les flots, là une côte bien éloignée du tracé d’aujourd’hui (voir page 77). Il y a 20 000 ans, le manteau glacier du nord du pays fondait. Depuis, c’est le changement climatique qui a pris le relais. « Le Sud de l’Angleterre coule tandis que le Nord se surélève. Des zones comme le Hampshire et la côte du Sussex sont particulièrement vulnérables. » Mais si les zones côtières sont souvent gagnées par les eaux, c’est aussi parce que le béton a grignoté l’espace dévolu à la mer ou que les marais salants ont disparu peu à peu. Autant d’évolutions repérables en comparant le présent avec les peintures d’antan. « Les premières photos datent de 1860 mais avec les peintures, on peut encore remonter de cent ans. Or, pour être significative, l’évolution des côtes doit être étudiée sur la plus longue période possible », souligne l’ingénieur.

Mais recenser quelques changements ne lui suffisait pas : l’homme a fait de sa découverte un outil. Il se souvient : « Entre 1997 et 2000, j’ai dirigé un vaste programme européen d’étude des côtes, avec des paléontologues et des archéologues. Ils avaient développé un système de classement pour identifier la fiabilité des repères archéologiques. Alors je me suis dit que je pouvais faire la même chose avec l’art. » En clair, il a noté, en fouillant dans les archives, qui, des artistes et des périodes, des techniques et des courants, étaient les plus fidèles à la réalité. « A la fin du XVIIIe siècle, les artistes avaient plutôt tendance à exagérer le trait pour reproduire les sensations des grandes expéditions en Europe. Mais sous la période victorienne (1837-1901, ndlr), ils ont approché de près la réalité car les gens voulaient des “peintures souvenirs”, capables de leur rappeler les paysages qu’ils avaient vus. »

Filer vers le sud

Au terme de son classement, il a retenu les trente artistes les plus pertinents pour l’histoire côtière de la zone. Un bel outil pour guider les ingénieurs côtiers ou les géologues. « S’il y a des décisions difficiles à prendre concernant la protection des côtes les plus vulnérables face à l’érosion et au changement climatique, cette technique peut aider. (…) L’art est un outil qualitatif qui peut être utilisé aux côtés des méthodes scientifiques pour donner un autre angle sur l’évolution côtière. »

Pour l’heure, Robin McInnes a développé son outil pour le sud Hamsphire et l’île de Wight. Mais relancé par le Crown Estate, il achève aujourd’hui une étude dans le Suffolk du Nord, à l’est du pays, histoire de sélectionner les artistes les plus fiables pour cette région. Et ensuite ? Il aimerait bien continuer vers le nord, suivre pas à pas le contour des côtes britanniques ou filer vers le sud et la France. A quand La falaise d’Etretat de Gustave Courbet au service des scientifiques ? —

View of Sandown Bay in 1800 par Richard Livesay. La partie de terre coloriée de bleu montre le profil de la côte aujourd’hui.

Aquarelle de cape Point près de Brighstone par Charles Tomkins en 1809.

Photo du même lieu aujourd’hui signée Robin McInnes.

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