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7-10-2004
Mots clés
Social
France

La beauté du geste

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A Tours, une "esthéticienne sociale" dispense ses soins auprès des personnes les plus démunies. Elle veut redonner dignité à des femmes pour qui la féminité est un luxe et créer un lieu privilégié de paroles. Portrait.
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Ca se passe dans une petite salle, à l’arrière d’un centre d’aide à la réinsertion par le vêtement dans la banlieue tourangelle. Allongée sur un fauteuil pliant, Madina se laisse aller à la douceur du massage, dépose, une heure durant, son "poids de vie" entre les mains expertes de l’esthéticienne. Elle arrive de Tchétchénie. Et, comme le reste des employés de cette association du réseau Active, elle est une réfugiée politique en contrat CES ou CEC. Comme les autres, immigrées du Rwanda, d’Afghanistan, de Georgie ou d’Ukraine - douze nationalités y sont représentées -, elle ne pouvait guère imaginer s’abandonner un jour aux soins luxueux d’une esthéticienne, entourée des vapeurs des lotions, épilée, maquillée. Il faut dire que l’esthéticienne qui gravite autour de son corps endolori n’est pas ordinaire. Pour 1,50 euro - "Le geste minimum pour ne pas sombrer dans un rapport d’assistance" -, elle s’attache à rendre féminité et dignité.

"Née dans la générosité"

Elle, s’appelle Brigitte Montagné. Est esthéticienne sociale. Son objectif ? Offrir son savoir-faire à ces femmes en souffrance familiale, financière, corporelle qui fuient les miroirs depuis trop longtemps, niant leur droit à se sentir belle et à jouir de l’agréable. "Tout le monde ne sait pas ce que veut dire se détendre, avoir droit au repos", explique Behnaz, la responsable de l’association. Dans une autre vie, Brigitte Montagné était infirmière auprès des malades du sida, en milieu palliatif notamment. "Je suis née dans la générosité", ironise-t-elle. Elle se lasse de l’ambiance mortuaire, touche les limites de cette fonction trop "technique", qui conduit à une simple "réparation clinique". Alors, "plutôt que de se contenter de faire des piqûres" pour soulager la douleur du corps, elle décide d’intervenir en amont et de se tourner vers les vivants et les consciences, là où elle peut encore infléchir le cours d’une existence. Elle se dote alors d’une philosophie de vie, adopte et diffuse le concept de résilience, cette capacité pour les humains de résister aux chocs et de rebondir, breveté par le psychologue Boris Cyrulnik.

"Merci pour ce petit peu"

A 52 ans, elle se lance dans un CAP d’esthéticienne. Parachève sa formation au Codes [1] de Tours et décroche un diplôme mention sociale. Mais, contrairement à ses collègues qui se tournent vers les hôpitaux ou cliniques, elle choisit la rue et sa misère sociale. Frappe à la porte des associations pour proposer ses services, bénévolement d’abord. Tisse peu à peu son réseau, affermit ses appuis. Elle croise le chemin de la mairesse de Saint-Pierre-des-Corps, dans la banlieue de Tours, Marie-France Beaufils. Séduite par le concept, celle-ci décide de lui allouer une subvention municipale qui lui permet de travailler auprès de plusieurs associations de la ville. De poser un moment son fauteuil, offert par un dentiste mécène, au pavé d’un centre d’accueil. De mettre un terme à l’itinérance permanente, pourtant son rêve au départ.

"Pâte humaine"

Car Brigitte avait d’abord pensé installer ses quartiers dans un camion. Mais s’installer à son compte - sans le biais d’une association - aurait nécessité de se déclarer au statut libéral. "Les femmes auraient eu à me payer directement de quoi vivre. Et je ne veux pas leur demander plus". Et puis, les associations lui offrent la médiation indispensable dans cette univers de précarité où la timidité et le silence règnent en maîtres. La voici donc partageant son temps entre une association d’aide à la réinsertion, un centre pour jeunes adultes handicapés moteurs, un point accueil pour la recherche d’emploi, etc. Partout, le même enthousiasme. Dans un livre d’or tenu au Sac à malices, l’une des associations au sein de laquelle elle travaille, les témoignages de gratitude se succèdent. Comme celui de Babeth : "Je suis arrivée, je me sentais comme une fleur fanée et les mains magiques de Brigitte m’ont transformée en une jeune fleur qui vient d’éclore. Merci pour ce petit peu qui est grand en ce jour". Un remerciement pour l’empathie distillée simplement par l’esthéticienne qui ajoute : "On est de la même pâte humaine, seul notre parcours diffère."

[1] Codes (Cours d’esthétique privé à option humanitaire et sociale) - CHR de Tours - 2, boulevard Tonnellé - 37 044 Tours - 02 47 47 47 47

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