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innovation politique

Par Rodrigue Coutouly
20-03-2011

Comment financer les énergies renouvelables ?

Après la crise nucléaire japonaise, alors que le débat sur les énergies renouvelables paraît relancé, de fortes interrogations demeurent sur la capacité de celles-ci à substituer au nucléaire. L'une des principales interrogations provient de leur coût élevé : comment financer des moyens de production renouvelables alors que leur coût est plus élevé que celui du nucléaire ?

Ainsi, suite à mon article intitulé le choix du nucléaire en question, un lecteur fidèle m’écrit :

"Un autre aspect est votre idée de contribution incitative. Cette notion me semble plus intéressante que le coup par coup démesuré que l’on a pratiqué ces dernières années, mais est-ce que ce sera suffisamment incitatif ? Vous parlez de quelques dizaines de centimes...bien, si chaque Français paie 1 euro de plus, cela fera 65 millions d’euros...on ne va pas loin avec cela. Il faudrait que vous fassiez un bilan chiffré de vos incitations et une simulation sur 10 ans pour qu’on comprenne mieux." .... Ma conclusion est donc : idée intéressante mais à creuser pour en vérifier l’impact réel possible."

Donc, faisons cette simulation. Reprenons la démarche des contributions incitatives et appliquons-la à la production d’électricité. Si les énergies renouvelables ont la réputation d’être chères, comment les financer ?

Rappelons la démarche des contributions incitatives appliquées aux énergies renouvelables :

1-taxer de manière très légère (quelques dizaines de centimes sur une facture les premières années) toute l’électricité produite à partir de sources non renouvelables.

2-Utiliser entièrement cette taxe pour financer les investissements nécessaires pour acheter et installer des capteurs (éolienne, solaire, hydraulique).

3-Augmenter cette taxation au fur et à mesure que le potentiel du renouvelable prend de l’importance.

1-La récolte des fonds :

La première année, la contribution demandée sera d’environ 1 euro par français et par an. Soit l’équivalent de 65 millions d’euros pour l’année pour l’ensemble des ménages. Cette somme apparaît symbolique au regard des enjeux : il s’agit de participer au financement d’un système énergétique qui assure l’indépendance du pays. L’année suivante, cette somme est doublée (2 euros), puis elle passe à 3 euros. Au bout de 10 ans, la somme par français a atteint 10 euros par an.

Cette somme n’est pas forfaitaire mais dépend de la consommation. Elle participe donc à la recherche de sobriété par une augmentation prévue des tarifs.

Cette augmentation est planifiée au départ, elle est connue, son accroissement n’est pas négociable et elle s’applique à tous : aux ménages mais aussi aux entreprises et aux administrations.

Cette contribution n’est pas répartie de manière uniforme : elle est demandée quand la production porte sur des ressources non-renouvelables. Elle n’est pas demandée quand il s’agit de kilowatts produits de manière durables et renouvelables (hydroélectricité, éolien, solaire, biomasse, ...). C’est donc le ratio entre la production renouvelable et non-renouvelable de l’entreprise qui commercialise l’électricité qui détermine le niveau de la contribution demandée.

Au total, au bout de 10 ans, ce système de contribution doit permettre de récolter environ 1300 millions d’euros par an. Sur 10 ans, cela représente environ 6,5 milliards. C’est insuffisant pour financer toute la filière renouvelable mais suffisamment conséquent pour participer à sa mise en place.

2-L’utilisation des fonds :

L’argent récolté est provisionné sur des comptes gérés par la caisse des dépôts. Il y en a trois : l’un pour les ménages, l’autre pour les entreprises, le dernier pour les administrations. Les fonds récoltés pendant une année sont utilisés l’année suivante pour participer au financement des installations renouvelables sous forme de subventions d’aides à l’investissement.

Ainsi, chaque particulier, chaque entreprise peut déposer un projet d’installation d’éolienne ou de panneaux solaires, (avec plan de financement, projet technique, devis, prêt bancaire) pour une année donnée. La subvention allouée dépendra du nombre de projets déposés par rapport aux sommes disponibles dans le fond concerné.

Ainsi, pour le fond particulier, qui aura récolté 65 millions d’euros la première année, si il y a 65 000 dossiers déposés, chaque déposant devrait toucher, en principe, mille euros. Mais la subvention donnée dépendra aussi du niveau de revenu de chacun : les contribuables les plus riches devraient toucher en proportion beaucoup moins que les autres.

Les subventions vont varier aussi selon le type de projets : installation individuelle sur sa maison de panneau solaire, participation à un projet d’éolienne participatif, achats de parts d’une société investissant dans l’énergie renouvelable...

Ce système de subvention et de contribution va se substituer, pour les nouveaux investissements, à l’ancienne taxation fiscale qui accordait des tarifs d’achats privilégiés (CSPE pour le photovoltaïque) et qui faussait le marché. Les différentes énergies renouvelables seront donc ramenés à la réalité de leur coût de revient, sans distorsion liée à des politiques fiscales biaisées.

Le fond entreprise financera tous les projets des entreprises, le fond administration les projets des services publics et le fond particulier celui des ménages.

3-Dynamique du mécanisme incitatif :

Ainsi conçu, ces contributions incitatives permettent un nouveau mode de financement des énergies renouvelables qui préservent les mécanismes du marché. L’augmentation programmée et connue de la production électrique fossile (nucléaire et hydrocarbures) par rapport aux tarifs de l’électricité "renouvelable" (ENR) permet à tous les acteurs de se positionner clairement.

Pour une entreprise de production d’électricité, cela permet de continuer l’exploitation de ses centrales nucléaires mais les obligent à investir dans les ENR. Pour l’acheteur d’électricité, celui-ci sera attentif au poids de la contribution incitative sur sa facture et son évolution future en fonction des projets de l’entreprise auprès duquel il s’approvisionne.

Pour l’investissement dans les ENR, toutes les catégories d’acteurs auront intérêt à s’impliquer : les ménages comme les administrations. Le niveau des subventions dépendra de la quantité des dossiers de demandes. Il n’y aura donc pas de déficits possibles. Les entreprises du secteur du renouvelable ne pourront plus profiter d’effets d’aubaine. Les tarifs subventionnés et garantis ne seront plus un coût pour la collectivité puisque le seul différentiel portera sur la contribution incitative.

Malgré tout, les sommes redistribuées au profit des investissements dans les ENR sont assez importantes pour inciter au développement du secteur : 6,5 milliards en 10 ans, c’est l’équivalent du coût de construction d’un millier de grandes éoliennes de 5 MW. Ces sommes permettront de créer un différentiel avec les anciennes énergies. Elles autoriseront une accélération des investissements dans ce secteur. Son développement sera garanti par l’augmentation prévue de la contribution sans créer de mécanismes artificielles et coûteux.

Le travail d’Olivier Danielo, ou le scénario Négawatt l’ont montré : il est possible de continuer nos modes de vie sur le long terme, tout en apprenant à nous passer du nucléaire et des énergies fossiles. Ces scénarios sont en place, il reste une volonté politique forte qui prendra la forme d’actions cohérentes. Cette proposition de contribution incitative ENR permet un cadre fiscal volontariste.

COMMENTAIRES ( 7 )
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  • Bonjour,

    Ci-joint une lettre que j ai envoyée à NKM avec copie au President qui propose quelques pistes pour developper les renouvelables, je viens de recevoir une reponse comme il avait lu celle ci avec interêt ?

    Madame la Ministre de l’Environnement

    En tant que père de famille responsable, et citoyen qui a le droit de s’exprimer, je me permets de suggérer humblement quelques pistes de réflexion, concernant la lutte contre le dérèglement climatique :

    En remplacement de l’Impôt Sur la Fortune :
    Avec la disparition ou l’allègement programmé de l’Impôt Sur la Fortune, pourquoi ne pas exiger en remplacement ( ou inciter fiscalement ), que les personnes dont le patrimoine dépasse une certaine limite, possèdent une résidence principale labellisée BBC ? Les personnes à gros revenus et/ou patrimoine, par leur consommation ostentatoire, ont souvent un bilan carbone beaucoup plus mauvais que les foyers à revenus modestes. Une résidence de 300 m2 avec piscine a un bilan carbone bien plus catastrophique qu’un appartement F4 mal isolé. Il est par ailleurs choquant qu’une personne qui possède un 4x4, une piscine et des revenus très confortables affirme ’’ je ne mets pas de panneaux solaires, ou je n’isole ma maison, ce n’est pas rentable ’’, affirmation que j’ai pu entendre de la part de personnes connues pour avoir un gros patrimoine personnel. Si les citoyens les plus aisés, qui sont souvent les plus instruits ne montrent pas l’exemple, il est peu probable que le reste de la société change ses habitudes.
    Concrètement, serait-il acceptable, au nom de l’intérêt général et de celui des générations futures, que l’on oblige un foyer qui a un capital global d’environ 1 millions d’ € (souvent beaucoup plus) de dépenser 100000 € ( isolation extérieure + toiture + triples vitrages + VMC double flux ) afin que celui-ci transforme sa résidence principale en Bâtiment Basse Consommation, sachant que ces travaux valoriseraient le bien du foyer, et que tout ou partie des sommes dépensées seraient récupérées dans les 15 années suivantes ..., il me semble que la réponse pourrait être ’’oui’’. Cette idée pourrait être déclinée de plusieurs autres façons en installant par exemple une sorte de taxe carbone pour les ’’riches’’, en taxant davantage les consommations d’électricité de leurs habitations, ou en faisant des tarifs d’électricité en fonction des tranches d’imposition. Ces mesures seraient facilement justifiables, en effet, le dérèglement climatique est essentiellement causé par les ’’riches’’ de notre monde, et les premières victimes en seront les pays pauvres et les pauvres de notre pays.

    La promotion du bénévolat et du service civil :
    Une deuxième idée concerne l’encouragement du bénévolat en faveur du développement durable. Je propose d’encourager fortement le bénévolat afin de diminuer le coût des énergies renouvelables. Ce bénévolat aurait pour but de baisser le prix de revient de ces dernières. Il n’aurait pas pour but de se substituer aux subventions de l’état qui ne sont d’ailleurs pas suffisantes mais de s’associer à elles afin de baisser le plus possible le coût de celles-ci, et de s’approcher le plus possible du coût des énergies fossiles voire de les mettre à un coût inférieur. Le combat contre le réchauffement climatique sera gagné lorsque les énergies renouvelables seront moins chères que les énergies fossiles, à nous de faire que ce jour arrive le plus tôt possible, ’’si on veut, on peut !’’. Il convient de cumuler toutes les mesures et astuces financières administratives et techniques possibles et imaginables afin que les énergies renouvelables aient un coût le plus bas possible et supplantent au plus vite les énergies fossiles. Ce bénévolat ne risquerait pas de faire de la concurrence déloyale aux entreprises du secteur car il s’agirait uniquement de rendre accessible à des familles des travaux qu’elles n’ont pas les moyens de se payer. Je me déclare personnellement d’accord pour travailler bénévolement une demie journée par semaine dans une usine de panneaux solaires, s’il y en avait une proche de mon domicile, à condition bien sûr, d’avoir l’assurance et les preuves régulières que la baisse du coût de production correspondant, se retrouve intégralement dans le prix de vente des panneaux et que cette baisse permet de faire des prix préférentiels pour les foyers à revenu modeste.
    Ce concept pourrait être plus pertinent encore, s’il est appliqué aux travaux d’isolation extérieure pour lesquels la main d’oeuvre représente une part importante du coût de la rénovation thermique. Des chantiers participatifs pourraient être organisés pour isoler par l’extérieur les immeubles des banlieues. Le service civil qui fut un temps débattu et qui ne vu jamais le jour, pourrait également être un moyen supplémentaire de baisser le coût de tout ce qui a trait au développement durable. Tout cela permettrait de combattre efficacement la précarité énergétique qui progresse dans notre pays. Des bénévoles du service civil pourraient également être affectés à la collecte ou au tri de déchets recyclables sachant que justement cette opération qui souvent grève la rentabilité du recyclage des déchets.

    Je sais bien qu’il est facile d’avoir une idée, et beaucoup plus difficile de résoudre tous les détails de mise au point nécessaire à sa réalisation. Je vous souhaite beaucoup de courage et de pédagogie dans vos combats qui sont aussi les miens. Ce sont des combats passionnants, une aventure unique, qui rendra notre Monde meilleurs à bien des égards. Souhaitant que ces idées soient étudiées par vos services ou à défauts, par vos adversaires politiques, je vous prie d’agréer Madame la Ministre mes salutations distinguées.

    23.05 à 21h59 - Répondre - Alerter
  • Il existe déjà des moyens collectifs et citoyens pour financer directement des projets énergétiques comme par exemple
    http://www.energie-partagee.org/

    ou même les CIGALES,
    http://www.cigales.asso.fr/

    EF

    16.04 à 18h15 - Répondre - Alerter
  • Monsieur COUTOULY, je trouve que vous avez là de super-bonnes idées que vous devriez soumettre au nouveau candidat Nicolas HULOT ! et si vous l’avez déjà fait et qu’il renâcle, merci de nous en informer car vraiment il ne mériterait pas qu’on vote pour lui... ce serait un très bon test et calmerait le jeu de ceux qui prétendent qu’il "roule" pour le nucléaire (à condition bien sûr qu’il adopte vos idées).

    15.04 à 11h45 - Répondre - Alerter
  • Je pense qu’il faut laisser le marché libre de créer les incitations :
    - laissons se développer les centrales nucléaires, la source actuelle la plus intéressante pour la production d’électricité ;
    - favorisons, en conservant les taxes sur l’essence, le développement des véhicules électriques ; ils deviendront vite une source de revenus à l’exportation ;
    - si les énergies renouvelables deviennent rentables grâce aux progrès technologiques, aidons-les par des taxes réduites.
    Le solaire n’est pas prêt à devenir une production de masse : cessons les subventions ruineuses. Laissons cette énergie aux sites inaccessibles.

    15.04 à 10h22 - Répondre - Alerter
    • Je suis d’accord avec le raisonnement de Christophe 1007.
      Il faut être réaliste et pragmatique, même s’il est bon d’avoir une part d’idéalisme.
      Personnellement, je pense que le développement des énergies renouvelables, sous toutes leurs formes, s’effectuera par les entreprises multinationales en place qui maitrisent déjà les énergies fossiles, (Total, Aréva, EDF etc..en France, et par d’autres dans le monde).
      La plus grande partie du financement des énergies renouvelables transitera, par ces dernières, n’en déplaise
      à la plupart d’entre nous.Ces multinationales connaissent les évolutions du marché mieux que quiconque, et sauront donc s’adapter en conséquence.

      15.04 à 22h53 - Répondre - Alerter
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