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Avec la briquette congolaise, la déforestation part en fumée

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Avec la briquette congolaise, la déforestation part en fumée
(Crédit photo : Emilie Iob)
 
Près du Parc national des Virunga, en République démocratique du Congo, les villageois fabriquent un combustible à base de déchets de papier et de sciure. De quoi ringardiser le charbon !
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ÉCOLOGIE SOCIÉTÉ ÉCONOMIE
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Dans un petit village niché au pied des volcans qui forment le Parc national des Virunga, un groupe de femmes s’active autour d’une presse en bois. L’une malaxe une pâte qu’elle introduit dans un tube de plastique, l’autre actionne le balancier, la troisième extrait les briquettes rondes, ainsi formées une à une, et les met à sécher sur une grande table de bambou. Le geste est sûr, le système rodé. Cela fait environ deux ans que plusieurs centaines de villageois du Nord-Kivu, dans l’est de la République démocratique du Congo, se sont lancés dans la production de briquettes de biomasse.

Sanctuaire des gorilles

Fabriqué à partir d’un mélange de déchets de papier, d’eau et de sciure de bois, ce combustible offre une alternative écologique au charbon. « Cela cuit très bien les aliments », assure Immaculée, jeune mère de trois enfants. « Mais je suis surtout contente de ne plus devoir aller chercher du bois dans la forêt car il arrivait que nous soyons agressées, et même violées. » Dans cette région pauvre et très peuplée (400 habitants au km2), le charbon – ou « makala » en swahili – est la principale source d’énergie pour la population. Tous les jours, des dizaines de camions surchargés de sacs de braises affluent en direction de Goma, la plus grande agglomération de la province.

Au cours des dix dernières années, sa population a triplé pour atteindre près d’un million d’habitants. L’immense majorité n’a pas accès à l’électricité et il n’y a pas suffisamment de bois à brûler disponible pour répondre à leurs besoins. Les fabricants de charbon se tournent donc vers les forêts protégées, à l’intérieur des Virunga, le plus vieux parc national d’Afrique et l’un des derniers sanctuaires des gorilles de montagne. Selon les autorités du parc, divers groupes armés encore en activité dans cette région instable sont impliqués dans ce trafic lucratif, qui représenterait environ 27 millions d’euros par an.

« Nouveau charbon »

La déforestation est, avec le braconnage, une des plus grandes menaces pour la biodiversité et la survie des gorilles. « Si nous n’avions pas réagi, le parc était condamné à disparaître », affirme Gilbert Dilis, l’officier de sécurité. « Depuis 2009, nous avons réussi à réduire la carbonisation en mettant en place des patrouilles fréquentes et en formant près de 300 rangers. » Un métier dangereux : onze d’entre eux ont perdu la vie en 2011. « Nous essayons de faire comprendre aux populations que le parc et la pratique du tourisme en son sein peuvent représenter une source de revenus », explique Cai Tjeenk Willink, chargé du développement. Mais pour une réponse plus immédiate, les autorités tentent aussi d’offrir des sources d’énergie alternatives. Le projet « makala ya sasa » (« nouveau charbon ») est le fruit d’une collaboration entre le Parc et l’Institut congolais pour la conservation de la nature. Environ 500 machines permettant de confectionner les briquettes de biomasse ont été installées dans divers villages, et une formation à cette nouvelle technique a été donnée aux habitants. « Nous privilégions la formation des femmes, qui sont souvent les plus impliquées dans le transport du charbon », commente Balemba Balagizi, chargé du programme à l’Institut. Pour stocker les briquettes, rien de plus simple : les sacs utilisés lors des distributions alimentaires dans les écoles ou les camps de réfugiés sont recyclés en emballage. Le programme est 100 % écolo !

Manque de débouchés

Un sac d’environ 50 kg coûte 12 dollars (9 euros) alors que le prix de la même quantité de charbon oscille entre 25 et 30 dollars (entre 19 et 23 euros). Un gain non négligeable alors que 80 % de la population congolaise vit avec moins d’un dollar (0,78 euro) par jour. Et pourtant, les fabricants de briquettes de biomasse se plaignent du manque de débouchés pour leur production. Dans l’entrepôt d’un village prenant part au projet, à une trentaine de kilomètres au nord de Goma, les sacs de « makala ya sasa » s’entassent.

« Les femmes continuent d’en fabriquer tous les jours, mais plus personne n’est venu les chercher depuis six mois », déplore le chef du village, David Abanone. « Si l’on n’utilise pas un four spécial, les briquettes produisent de la fumée. Les familles ne peuvent donc pas les utiliser à l’intérieur de la maison, ce qui pose un problème », reconnaît Balemba Balagizi. Des foyers ont été distribués dans des écoles, des camps de déplacés ou encore à la prison de Goma. Mais pour que l’initiative touche tous les ménages congolais, il faudra encore du temps.

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Née en Belgique et diplômée de l’Institut de journalisme de Bordeaux Aquitaine, Patricia Huon a toujours eu la bougeotte et aime découvrir de nouvelles contrées. Depuis fin 2009, elle est installée en Afrique du Sud et parcourt le continent africain pour plusieurs titres de la presse francophone, dont La Libre Belgique, La Tribune de Genève, Marianne, L’Actualité, etc. Ses reportages portent principalement sur des sujets politiques et de société.

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