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Amanins : l’écologie de pied ferme

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Amanins : l'écologie de pied ferme
(Crédit photo : Cécile Cazenave)
 
Voilà une « école » pas comme les autres. On y vient quelques jours pour apprendre comment concilier économie et agriculture. Immersion dans ce centre fondé il y a cinq ans dans la Drôme par le penseur Pierre Rabhi.
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ÉCOLOGIE SOCIÉTÉ ÉCONOMIE
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Elle n’a rien d’une soucoupe volante, mais c’est un bel ovni qui s’est posé dans cette vallée de la Drôme. La ferme des Amanins, à La Roche-sur-Grâne, vient de célébrer ses cinq ans et son autonomie alimentaire enfin atteinte. Avec 55 hectares de pâturages, de céréales et de maraîchage, 35 brebis, 15 chèvres et quelques poules et cochons, les Amanins peuvent désormais nourrir, en bio, 80 personnes. Une communauté baba cool façon post-soixante-huitarde ? Foin de tipi ! Personne n’y vit. Les 15 employés de la ferme sont à la fois producteurs et professeurs. La vocation du lieu est d’accueillir du public pour quelques jours de vacances pas comme les autres. Les Amanins se veulent une école d’écologie pratique et de « sobriété heureuse ».

A quelques pas du corps de ferme traditionnel, en épaisses pierres de taille claires, des dortoirs fraîchement inaugurés sentent bon l’enduit de terre crue et la paille qui habille l’ossature en bois des murs. Sur le toit, panneaux solaires et herbes folles. Dans les douches, réducteurs de débit pour y aller mollo sur les inondations et au petit coin, toilettes sèches. Pour recharger le téléphone portable qui nous colle à la poche, deux prises dans la salle commune, pas plus, histoire d’apprendre que l’électricité ne tombe pas du ciel, sans pour autant s’en passer.

Du champ à l’assiette

Entre deux coups de truelle, Dominique, ébéniste de métier, se fait un plaisir d’expliquer les principes de l’écoconstruction et vante les mérites de l’isolation naturelle. En contrebas, c’est l’heure de la fournée. Vincent, électricien et boulanger, commente la température de son four à bois tout en sortant les pains croustillants prévus pour le déjeuner. Sous la serre, on récolte fissa la commande d’oignons pour Sylvain, le chef cuistot qui s’active aux fourneaux. « Chacun peut suivre notre production du champ à l’assiette : les repas sont un excellent outil pédagogique. On mange le résultat d’une démarche et d’un travail, c’est une écologie gustative ! », lance Houari, le gérant de l’entreprise. Au menu : soupe de courge au curcuma, gratin de rutabaga à la tome de brebis et flan à la cannelle.

Tout à fait du goût d’André, le maraîcher qui relève ses manches pour faire tourner cette micro-usine bio. Orge et seigle pour les animaux, blé pour la farine, blé dur pour les pâtes et le boulgour. Un verger et une quarantaine de variétés de légumes complètent les repas. Les trois quarts des cultures produisent 8 tonnes à l’hectare, à coups de fumier de brebis. « Nourrir des hôtes, ça nécessite un calendrier élaboré : en fonction du nombre de visiteurs qui viennent passer un séjour, je fais un rétroplanning de cultures sur lequel je règle mes dates de semis », explique-t-il, face aux rangées de courgettes. Au printemps dernier, l’intersaison, avant les premières récoltes, a failli tourner à la famine : il était temps que les carottes et pois gourmands montrent leur nez.

Les hôtes des Amanins peuvent payer leur hébergement et leurs repas et faire ce qu’ils entendent : donner un coup de main ou se contenter de regarder. Buller même s’ils le désirent ! Yona, elle, fait partie des « woofers » – souvent des étudiants – qui doivent travailler contre le gîte et le couvert. A 25 ans, elle est venue d’Utrecht aux Pays-Bas pour passer trois semaines à la ferme et faire une pause dans ses études d’anthropologie. Elle plonge les mains dans la terre pour la première fois : « C’est méditatif ! », lâche-t-elle, accrochée à un radis noir récalcitrant.

Désherber pendant deux heures

Eric, 37 ans, manager dans un groupe pharmaceutique, usé par « l’absence de valeurs humaines » dans sa boîte, rêve maintenant de cultiver un lopin de terre. Lui qui ne sait, pour l’instant, que faire pousser des fraises sur son balcon de banlieue parisienne est venu « pour confronter son utopie avec la réalité ».

Faire participer pour inspirer, telle est la vocation des Amanins. « Quand tu as désherbé à la main pendant deux heures, l’écologie n’est plus un concept, c’est concret. Les gens se rendent compte que c’est du travail et beaucoup d’efforts », précise Houari, attablé sous la véranda où producteurs et visiteurs partagent le repas. Combien en repartiront convaincus qu’un autre mode de culture, de consommation et de vie est possible ? Beaucoup, espèrent les deux fondateurs Pierre Rabhi, militant et penseur écolo, et Michel Valentin, un entrepreneur de la région qui voulait réconcilier économie et paysannerie. Le premier a apporté son souffle. Le second a financé l’achat du domaine et mis en route l’œuvre collective.

« L’efficacité d’une entreprise »

« Les Amanins sont une alternative d’envergure, suffisamment importante pour prouver que nous ne sommes pas des marginaux qui bricolons dans notre coin, explique Pierre Rabhi, cinq ans après le début de l’aventure. Il nous faut l’efficacité d’une entreprise, c’est décisif si on veut être crédibles. » Organisés en Scop (Société coopérative de production), avec des employés au salaire unique de 11 euros brut de l’heure (contre 9 pour le Smic horaire), les Amanins espèrent atteindre leur équilibre financier cette année. D’ici là, la ruche continue à polliniser ses visiteurs de quelques jours. « Dans ce prototype sont rassemblés les éléments essentiels d’une démarche générale écologique et humaine : s’il en inspire d’autres, il aura joué son rôle », conclut Pierre Rabhi. —

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  • Bonjour,
    L’initiative est belle et Piere Rabhi un homme sage dont on devrait écouter plus souvent la parole... Je souhaitais faire un petit focus sur le wwoofing : c’est un mode de voyage/découverte de plus en plus utilisé par les jeunes mais aussi les moins jeunes pour être au contact de fermiers bio (à l’origine, en Angleterre). Maintenant, on peut tout faire en wwoofing ! De l’éco-construction, du maraîchage, vivre avec des familles ayant choisi l’autonomie énergétique et/ou alimentaire... C’est une expérience que je recommande.

    Ma femme et moi-même avons réalisé un voyage autour du monde de 18 mois (2009/2010), quasiment uniquement en wwoofing. C’est la plus belle expérience qu’il m’ait été donné de faire. Des bons moments, des mauvais aussi(qui font apprécier les bons)... Mais aussi et surtout une réelle prise de conscience sur ce qu’il nous faut dans la pratique pour manger, se chauffer, ou pour notre énergie électrique... Notions qu’on perd de plus en plus.

    Un livre est en train de sortir sur le sujet (le 8 avril prochain), plutôt un guide pour ceux qui voudraient se lancer dans l’aventure : wwoofing, le guide. Voicil’adresse du site internet qui en parle.

    17.02 à 20h01 - Répondre - Alerter
  • Merci pour cet article sur les Amanins. J’y suis allée deux fois et je retrouve dans votre article ce que j’ai ressenti en allant là-bas : ce n’est pas une ferme de baba cool où les gens sont renfermés dans leur petit monde. C’est un endroit ouvert, dans un très beau cadre, où on peut rencontrer d’autres personnes qui partagent aussi cette idée d’humanité, du partage des ressources, de la chaleur humaine, de la sobriété heureuse... On découvre aussi la vie autonome, le cycle de la vie. Et on fait notre fromage, notre pain, on va chercher les fruits et légumes qu’on mangera le soir, on découvre l’éco-construction, la phytoépuration, l’école des Colibris, on partage avec les "salariés" : Houari, Dominique, Sylvain, Philippe, Nathalie, Vincent et tous les autres... Et ces repas, quel régal !!! On part avec une petite boule dans la gorge, mais avec un apaisement au cœur, plein de bons souvenirs et l’envie d’y retourner !! Nous avons d’ailleurs gardé contact avec des "séjournants" rencontrés aux Amanins...
    Alors faites un tour sur le site Internet des Amanins et programmer vos futures vacances !!
    Zveta

    10.02 à 13h31 - Répondre - Alerter
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