La transi quoi ?

« Projet de loi relatif à la transition énergétique pour la croissance verte ». Il ne faut pas moins de douze mots pour désigner ce qui fut présenté au moment de la prise de fonction de François Hollande, comme l’un des textes majeurs de son quinquennat. Douze mots pour traduire l’intensité des travaux herculéens qui attendent la France afin que cette dernière puisse instaurer un nouveau modèle énergétique, capable de réduire notre facture énergétique et produire notre énergie de manière plus durable, tout en luttant contre le dérèglement climatique.

L’ambition est grande et nécessaire pour quiconque se pencherait deux minutes sur la question en essayant de faire preuve d’un peu de bon sens. Pourtant, la question a du mal à se frayer un chemin jusqu’aux oreilles des Français. Selon le baromètre Energie-Info 2014 publié par le médiateur national de l’énergie, la transition énergétique souffrirait d’une méconnaissance ou d’une incompréhension auprès des citoyens plutôt inquiétante. D’après l’étude, « seuls 18% des ménages savent réellement de quoi il s’agit et 22 % en ont entendu parler mais n’ont pas bien compris ce que c’était ». Des statistiques qui semblent donc inversement proportionnelles à l’importance que cette révolution verte est supposée rencontrer.

Sur les ménages qui ont entendu parler de la transition énergétique, 40 % d’entre eux ont une vision positive du projet puisqu’ils retiennent principalement « les bénéfices collectifs de la transition énergétique : protection de l’environnement (86%) et création d’emplois (73%) ». Les résultats sont par ailleurs plus faibles quand il s’agit d’appréhender les bénéfices individuels puisqu’ils sont 61% à penser que « la transition leur permettra de réaliser des économies d’énergie » alors que 57% redoutent une hausse des prix.

La révolution ne peut se faire toute seule

La transition énergétique a beau faire le débat, notamment sur la question du nucléaire, elle n’en reste pas moins un sujet politico-écolo-technique qui a du mal à passer le mur lui permettant d’atteindre le grand public et mobiliser ainsi l’ensemble des Français. Les 20 % de personnes au fait du programme ne suffiront pas à rendre possible un tel chantier.

Si la transition énergétique répond avant tout à des problématiques environnementales, elle a néanmoins une portée sociétale évidente et doit engager chaque citoyen à modifier ses habitudes. Cette transition comportementale ne peut avoir lieu que si les Français ont pleinement connaissance des enjeux. Or, aucune communication n’est véritablement pensée en ce sens et seuls les spécialistes ou les fervents défenseurs de l’environnement sont à même de s’intéresser et déchiffrer les mesures prévues et les engagements nécessaires pour concrétiser ce qui n’est pour l’instant qu’au stade de projet.

Par ailleurs, les dangers des émissions de gaz à effet de serre paraissent quelque peu abstraits pour bon nombre de Français et il semblerait qu’il faille davantage les toucher au porte-monnaie, plus qu’à leur conscience écologique, pour les voir s’intéresser au futur de notre très chère planète.

Linky, star de la transition énergétique ?

Le nouveau modèle énergétique est donc loin d’occuper en masse les conversations de monsieur et madame Tout-le-Monde. Pour corriger le tir et veiller à accroître cette notoriété déficiente, le gouvernement aurait tout intérêt à capitaliser sur la popularité du boitier Linky, le compteur intelligent étant connu de plus de 40 % de la population française. Ce compteur nouvelle génération développé par ERDF a le mérite de concerner tous les ménages, qui vont voir débarquer très prochainement cette nouvelle machine dans leur foyer. Du concret donc.

Linky présente de plus un bénéfice direct plutôt attractif puisqu’il permettra de garder un œil sur sa consommation d’électricité et d’ajuster ses habitudes en fonction, pour au final adopter un comportement énergétique plus éco-responsables. Résultat : une baisse du montant de la facture et une hausse du pouvoir d’achat. Autant de notions qui intéressent les Français et qui leur permettent d’avoir une vision pratique de ce que peuvent signifier les mots « transition énergétique ».

« En l’état, sans un affichage de la consommation dans le logement, le consommateur n’aura aucun moyen pratique de suivre et donc de réduire efficacement ses consommations ; voilà pourquoi je plaide avec constance pour que les compteurs soient équipés d’un afficheur en euros, et en temps réel, dans chaque logement », déclare le médiateur national de l’énergie. Des ajustements sont donc encore à prévoir pour optimiser cet instrument et le rendre davantage attractif mais l’intention est bien présente.

Le gouvernement peut donc compter sur Linky pour faire une campagne pro-transition énergétique auprès du grand public mais il aurait tort de se reposer uniquement sur cet argument pour mener à bien son entreprise. La rénovation énergétique des bâtiments est également une carte à jouer et les efforts mis en place par les pouvoirs publics pour rendre accessibles les travaux en question traduisent la volonté d’en faire une véritable locomotive. Encore faudrait-il que les aides prévues à cet effet soient connues des Français. Or, près de la moitié des Français ignore encore les aides aux économies mises en place par l’État. Une ignorance qui n’empêche cependant pas 26 % des Français de vouloir rénover leur logement, selon l’association Promotelec. Pas encore de plébiscite mais ces chiffres sont encourageants pour la suite des événements.