Y a-t-il un coin de « verdure » dans le paysage télévisuel chinois ? Rien n’est moins sûr, à en croire les spécialistes des médias. Sous tutelle de la Sarft, la toute puissante administration gendarme de l’audiovisuel, la télé chinoise se résume d’abord à un organe d’Etat, à l’exception des chaînes câblées de Hong Kong. Pas évident d’y dénicher une émission rafraîchissante sur un terrain glissant comme l’environnement. « La télé chinoise, c’est le maître qui parle à l’élève. Elle a du mal à se détacher de sa tradition propagandiste », résume Xu Tiebing, professeur à l’Université nationale de la communication, à Pékin.
En première ligne, les chaînes régionales qui se montrent on ne peut plus positives. « Pour le reste, ce sont surtout les journaux télévisés qui abordent la question, observe Hu Liu, professeur à l’Ecole de management des médias de Pékin. Les émissions 100 % vertes sont rares. » Même « Espace vert », diffusée chaque soir en prime time sur la chaîne scientifique CCTV-10, et qui entend « promouvoir le développement durable », s’attache surtout à la vie des bêtes. Liu Jun Zheng, ancienne actrice passée derrière la caméra pour réaliser des documentaires environnementaux, connaît le problème. « Nous pouvons difficilement aborder les sujets qui fâchent. C’est comme si l’on dansait sur des cactus. Du coup, la qualité des programmes est forcément moins bonne, l’audience stagne et la publicité ne rentre pas. »
Scandale en prime time
Alors, pas un brin de vert dans la télé chinoise ? Pas si vite. Comme le relève Hu Liu, « les organisations environnementales d’Etat utilisent la télé pour communiquer sur les énergies renouvelables, les technologies vertes et les voitures électriques ». La chaîne pour ados de Pékin diffuse ainsi une émission sur les économies d’énergie dans le bâtiment et CCTV-2 dresse, au compte-goutte, des portraits de citoyens lambda agissant pour l’environnement. Par exemple, un bricoleur du dimanche montre comment il a rendu sa machine à laver moins gloutonne en eau…Cette année, la Journée mondiale de la Terre ne pouvait pas se rater sur CCTV News qui a entièrement « verdi » ses émissions pour l’occasion. Des animateurs vedettes ont même posé, en prime time, des questions telles que : « Pourquoi les eaux du canal Sud-Nord sont-elles polluées ? » ou « Que faut-il craindre des pesticides ? » « Même si les scandales sont souvent déjà connus, remarque Bofei Li, journaliste de 28 ans, c’est rassurant de voir qu’on peut aborder ces thèmes à la télé. »
L’écologie s’invite aussi sur Phoenix TV, chaîne privée de Hong Kong, l’une des rares à oser demander à des personnalités de traverser le pays pour faire campagne contre le nucléaire… au volant d’une Jeep. C’est via ce canal que les réalisateurs de « Red Hot Green China », séries de documentaires sur les solutions vertes pratiquées en Chine, espèrent être diffusés. « 95 % de la couverture médiatique étrangère sur l’environnement est négative tandis qu’elle est 100 % positive en Chine, s’insurge Van Yang, qui participe à ce projet. Il faut arriver à trouver le juste milieu pour montrer les efforts réalisés par la Chine et que les Chinois y croient. » —
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