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La femme écolo-digitale

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La femme écolo-digitale
 
Chez Nathalie Kosciusko-Morizet, la mémoire est vive. Elle n'a rien oublié de son passage au ministère de l'Ecologie, son terrain de jeu naturel. Elle, qui vivra à distance le sommet de Copenhague, ne peut s'empêcher d'inonder de vert son secrétariat à l'Economie numérique.
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« Nom féminin. Excitation anormale de la mémoire » (Larousse). Dans son ouvrage Tu viens paru fin octobre, Nathalie Kosciusko-Morizet se dit victime d’une « hypermnésie pesante ». Pas une maladie grave, juste l’accumulation des souvenirs, l’impossibilité de faire table rase. « J’ai le vertige de l’oubli, des choses qui disparaissent », dit-elle à demi allongée, habillée tout en noir sur son canapé blanc, dans son bureau du secrétariat d’Etat à l’Economie numérique et à la prospective. « Je suis très “ racines ” : j’ai tendance à beaucoup lier les choses à l’histoire, à des événements… Des lieux, des figures qui m’ont marquée. »

Il y a d’abord un deuil difficile, celui de son ancien ministère, l’Ecologie. On est à quelques jours du sommet de Copenhague, et elle n’y sera pas. Elle qui, à Bercy, sous le gouvernement Jospin, travaillait déjà à la préparation du protocole de Kyoto, ne participera pas à cette grand-messe du climat. « Je ne le vis pas mal du tout. J’étais à Buenos Aires, à Johannesburg avec le président Chirac… Et là je n’y suis pas, qu’est-ce que vous voulez. » Et puis, « vous savez, les négociations internationales sont à la fois des moments passionnants et très frustrants, kafkaïens ». Enfin, sur un ton plus sourd, comme à moitié convaincue : « Il faut aussi savoir faire d’autres choses. » Mais c’est du climat dont elle parle sans pouvoir être interrompue. « La stratégie de Jean-Louis Borloo d’aller chercher les pays du Sud est bonne. A Kyoto, les grands absents, c’étaient eux. L’Europe, les Etats-Unis et le Japon se sont focalisés sur la question : taxe ou permis d’émissions ? Les pays du Nord, partant du principe qu’ils étaient les seuls à négocier des objectifs contraignants, n’ont pas travaillé cette articulation avec le Sud. » Quant à l’idée de Borloo d’instaurer une taxe sur les marchés financiers : « C’est une idée qui court depuis longtemps et que je soutiens. On a le plus grand mal, sur la base des financements traditionnels, à associer les pays du Sud, il faut imaginer des choses nouvelles. »

« Ruser avec l’ordre établi »

Son poste à l’Economie numérique, NKM y a sans doute été reléguée pour insolence. Le « concours de lâchetés » dont elle accusa Jean-Louis Borloo, son ex-ministre de tutelle, et Jean-François Copé, lors du Grenelle lui valu de se plier à des excuses publiques. C’est peut-être ça, ce qu’elle appelle dans son livre (1), « ruser avec l’ordre établi pour, finalement, être entendue (…). La place des femmes dans la galerie des prophètes [étant] encore suffisamment incertaine ». Elle pose à chacune de ses grossesses dans Paris-Match, fait la bise à José Bové, impose un moratoire sur les OGM, refuse d’abord de conduire la liste de l’Essonne aux régionales – avant d’y être contrainte par Nicolas Sarkozy. La gauche en redemande. Il faut dire que celle qui participait à des soirées rallyes quand elle était jeune fille, écrit dans son bouquin tout un couplet sur ces slogans alter ou rouges (« Le monde n’est pas une marchandise », « Nos vies valent plus que leurs profits ») qui lui « parlent ». Les caciques de droite, eux, tiquent. En janvier 2009, donc, exit vers le numérique.

« J’ai dû faire ce ministère à ma main », dit-elle avec une légère mine aristocratique. Celle qui brode et joue de la harpe s’inscrit sur Facebook. Elle blogue, elle twitte (l’annonce de sa grossesse, notamment). On l’entend peu sur les sujets qui fâchent : sans jamais rompre la solidarité gouvernementale, elle s’est débrouillée pour laisser entendre aux militants anti-Hadopi (2) qu’elle ne croyait pas à la loi. On l’entend davantage sur le lancement des « ateliers de l’élu 2.0 », où elle forme des parlementaires aux joies du réseau. « Vous devriez venir voir, ce n’est pas un gadget ! » Surtout, dès qu’elle le peut, elle parle de « verdure technologique », commande sous sa casquette « Prospective » des rapports sur le statut des réfugiés climatiques ou le prix de la biodiversité, glisse des experts en écologie au beau milieu des discussions sur le grand emprunt… « Je me tiens très informée du green business : j’ai préfacé des livres, je vois toujours des contacts très anciens, parfois devenus de vrais amis comme Nicolas Hulot et Cécile Ostria, la directrice de sa Fondation, Allain Bougrain-Dubourg ou Serge Orru du WWF. »

« Emmerdeuse »

La femme aux souvenirs indélébiles plaide pour un « droit à l’oubli numérique », une législation qui garantirait que les données personnelles, les traces laissées sur le Net, puissent être effacées. A contrario, son livre, publié à son retour de congé maternité, est plus riche en références qu’une dissertation de Science-Po : Alexandre le Grand, Saint-Augustin, Simone de Beauvoir, Visconti, Emmanuel Mounier… Il se lit aussi comme un plan com destiné à se rappeler au bon souvenir des Français, du Président. Elle est ambitieuse, « une emmerdeuse » – aurait dit Chirac, selon la légende –, « une garce » – dixit Boloo, selon une légende plus proche. Elle est aussi spirituelle. « Elle a un certain sens de la dérision », témoigne Serge Orru. Au détour d’une conversation, elle dit sur un ton détaché : « Un journaliste m’a demandé un jour ce que je pensais du Parti socialiste. Un sujet plutôt facile, encore qu’il faille trouver à développer. »

Il y a enfin sa généalogie. « La tarte à la crème de mes portraits : le père, le grand-père, l’arrière grand-père et le trisaïeul. » Respectivement maire divers droite de Sèvre, ambassadeur – gaulliste – de France à Washington, sénateur maire PCF puis SFIO de Billancourt, politicien en Pologne puis aux Etats-Unis. « Si on pouvait, on remonterait jusqu’à Adam et Eve. » Car si elle est « très racines », NKM cherche surtout à ne pas faire « fille de ». « Ma famille a une particularité, nous ne faisons jamais de politique au même endroit, nous n’avons pas de fief. » Côté racines, elle a pris la suite d’une lignée d’hommes. Côté filiation, son mari a cédé : c’est elle qui a légué son nom à ses deux fils. —

(1) Paru aux éditions Gallimard  : www.tuviens.fr

(2) La loi Hadopi ou loi « Création et Internet » sanctionne le partage de fichiers en pair à pair en tant qu’infraction au droit d’auteur.


EN DATES ET EN GESTES

1973 naissance à Paris

2002 députée de l’Essonne

2004 rapporteur de la Charte de l’Environnement devant l’Assemblée

2007 secrétaire d’Etat à l’Ecologie

2008 maire de Longjumeau, secrétaire générale adjointe de l’UMP

Janvier 2009 secrétaire d’Etat chargée de la Prospective et du développement de l’Economie numérique

Son geste vert : Elle cultive des orchidées dans son bureau du ministère, jamais de fleurs coupées.

Photo : Lionel Charrier -M.Y.O.P

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