publicité
haut
Accueil du site > Blogs > Les blogs > énergies des 2 mains > Fukushima : le "risque zéro n’existe pas"

énergies des 2 mains

Par LeG-Guil
20-03-2011

Fukushima : le "risque zéro n’existe pas"

... et autres arguments fallacieux

Une série d’arguments est mise en avant pour mesurer les risques inhérents au nucléaire, révélés à Fukushima-Daiichi, à l’aune de l’ampleur du désastre géologique qui a touché le Japon.

« Il n’existe pas de risque zéro », entend-on dans les commentaires des décideurs politiques français. Arrêtons-nous un peu sur cet argument, tautologique, qui fait office de doctrine médiatique de la filière nucléaire française.

« Aucune technologie n’est sans risque », affirmait ainsi Henri Proglio, le PDG d’EDF, dans une tribune au Monde le 18 mars. Le « risque zéro » inexistant inondait chaque intervention des responsables politiques non EELV à propos du drame de Fukushima.

On oublie presque que, si la statistique du risque d’accident peut être infinitésimale, elle est multipliée par des conséquences de la survenue d’un accident considérées comme « infiniment » inacceptables.

On oublie les pans entiers de territoire qui doivent être délaissés et ce, pour des durées qui iront vraisemblablement au-delà de notre propre civilisation.

On oublie, en répétant que le risque zéro n’existe pas, que le risque nucléaire n’est pas de la même nature que les autres risques auxquels on le compare.

Face à l’ampleur des événements au Japon et alors que la dispersion des rejets radioactifs dans l’atmosphère à l’échelle globale est tout à fait édifiante, il faut remettre ce « risque » en perspective.

Un événement nucléaire catastrophique, décrit de façon nécessairement imprécise par les autorités, est donc de nature à empêcher la vie en tous points de la terre, en l’espace de quelques années.

Il faut donc rappeler aux partisans acharnés du « risque zéro qui n’existe pas » que la statistique infinitésimale multipliée par un risque nucléaire inacceptable ne garantit pas un risque faible de l’ensemble. Et qu’il est même tout à fait possible que le risque de l’ensemble soit très élevé.

« Fukushima a résisté au séisme, mais pas au tsunami »

Le consensus se forme également autour d’une poly-catastrophe tragique, conjonction d’éléments concentrée sur le site de Fukushima qui, bien que sûr, n’a pas pu résister à un tel déchainement, imposant la théorie d’une conjonction improbable de catastrophes, seule à pouvoir submerger une centrale nucléaire.

On lit par exemple que « la centrale de Fukushima a résisté au séisme et a résisté au tsunami pris séparément. Il y a eu un problème parce que les deux événements survinrent en même temps, déferlant non seulement sur la centrale mais aussi en dévastant également les alentours ».

En plus du séisme et du tsunami, le réseau électrique desservant la Préfecture de Fukushima a simultanément cessé d’alimenter la centrale, faisant tomber une première barrière de sécurité, avant que les groupes diesel, noyés par le tsunami, n’en fassent tomber une deuxième.

Il faut donc rappeler, et bien que cela semble trivial, que les tsunamis surviennent en même temps que les séismes. Prendre chacune des conséquences du séisme séparément, afin par avance de mieux excuser l’échec des prévisions de sécurité, ne semble pas correspondre à une analyse globale et objective des risques pris en compte lors de la construction de la centrale de Fukushima.

Enfin, les données scientifiques quant à l’état de la centrale juste après le séisme, et juste avant le tsunami, manquent, ou du moins ne sont pas disponibles. Affirmer quelques jours après la première explosion que la centrale de Fukushima a résisté au séisme, mais pas au tsunami, comme on l’a beaucoup entendu dans la parole officielle, est donc un argument tout à fait fallacieux.

Quant à la « lueur d’espoir » très à la mode depuis quelques jours, elle semble à peu près aussi invisible qu’un rayon gamma, et il vaut mieux pour l’instant ne pas en parler.

COMMENTAIRES ( 3 )
Trier par : Plus récents | Plus anciens
Affichage : Voir tout | Réduire les discussions
  • Eh oui la technocratie a inventé la gestion du risque, et montre que le risque zéro n’existe pas, comme il est très faible cela reste un langage acceptable ; cela revient en fait à dire que la catastrophe nucléaire démesurée et non réparable est tout à fait possible et est ainsi assumée et acceptée par le grand public. Bravo !

    30.03 à 21h07 - Répondre - Alerter
  • Juste pour rebondir :)

    Le Point (p.80) à sortir demain consacre 6 pages aux 60 ans de mensonges d’Etat sur le nucléaire et met notamment en lumière, en exclusivité, les, non pas un, mais deux accidents majeurs qu’a connus la centrale de Saint-Laurent-des-Eaux, le 17 octobre 1969 et le 13 mars 1980, restés ignorés du grand public. Merci de l’évoquer ici.

    Le Point évoque aussi largement la catastrophe évitée de justesse à Blayais lors de la tempête de 1999.
    Par ailleurs, sur la sous-traitance du risque par EDF, l’Inserm y parle d’une véritable « hécatombe invisible ».

    — -

    Le Canard Enchaîné (p.4) consacre également une page aux conséquences de Fukushima, que je résiste pas à faire partager brièvement ici.
    "Pas même un atome d’inquiétude" : autour des centrales, tout est prévu… sauf le pire. Sur le risque sismique, il "n’ébranle guère EDF", titre Le Canard, relayant les propos d’un salarié d’EDF, qui pointe que "la sécurité des actionnaires compte encore plus que celles des centrales".

    Dans "L’apocalypse selon Areva", Le Canard Enchaîné rappelle que le sondage selon lequel 55 % des Français sont opposés à la sortie du nucléaire a été commandé et payé par EDF. Et c’est le client qui commande.

    "Renoncer au nucléaire ? Jamais !" Ils font tout. Leur lobby surpuissant, leurs experts, leur porte-parole, le gouvernement unanime, leurs "écolos" maison sortent du bois et ressortent les vieux arguments éculés.
    Non seulement EDF va continuer à coller des rustines sur ses réacteurs, mais en plus va en exporter "dans des pays ayant atteint un niveau de maîtrise de la technologie suffisant". Indiscutablement, comme au Japon, épingle Le Canard (p.5) (répondant à l’argumentaire de la mise en place de critères de sélection des acheteurs de centrales)...

    ...Ils se préparent déjà à ce que Fukushima soit leur plus belle victoire.

    — -

    Enfin, en effet, il y a différents types de risques, certains ne sont pas évoqués, sont balayés ou évacués. Mais le risque majeur est précisément celui qu’on ne peut pas nommer. La "gestion de crise" ne peut pas prendre en compte la nature fondamentalement inattendue, voire inconnue des accidents.
    (Au Japon, on a tout de même ouvert au-delà de 9 l’échelle de Richter après le séisme, espérons que ça ne sera pas le cas de "l’échelle-Tchernobyl" avec un maximum à 7)

    Donc, face à l’imprévisible, l’incalculable, le "catastrophique", il est bien sûr impossible d’affirmer que la probabilité est infinitésimale, alors qu’un accident nucléaire touche des populations et contamine des territoires pendant des (centaines de) millénaires.

    23.03 à 14h37 - Répondre - Alerter
  • J’ajouterais
    qu’un argumentaire se focalisant sur le "tremblement de terre +
    tsunami" passe complètement à coté d’une partie essentielle du
    problème : il existe de nombreuses autres causes possibles de
    défaillance du système de refroidissement ou des systèmes de sécurité.
    Rappelons pour mémoire que cela s’est produit notamment en Suède en
    juillet 2006 (on a frôlé la catastrophe de l’aveu même du directeur de
    la centrale) et en France à St-Laurent-des-eaux en 1980 (accident de
    niveau 4 ayant donné lieu à une fusion partielle du réacteur)...
    http://fr.wikipedia.org/wiki/Liste_d’accidents_nucl%C3%A9aires

    23.03 à 13h05 - Répondre - Alerter
PUBLIER UN COMMENTAIRE

Un message, un commentaire ?

  • Se connecter
  • Créer un compte
  • NEWSLETTERS
    Cochez les cases pour vous abonner à vos newsletters
SPIP | squelette | | Plan du site | Suivre la vie du site RSS 2.0
publicité
bas