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7-12-2010
Mots clés
Finance
Politique
France
Monde
Chronique

Ne tuons pas les banques, cessons de vivre à crédit

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Ne tuons pas les banques, cessons de vivre à crédit
(Crédit photo : Andrew Eglinton/Flickr)
 
En temps de crise, les gouvernements continueront à choisir les établissements bancaires plutôt que les citoyens. Réaménageons donc notre rapport à la consommation. Une piste révolutionnaire.
Le Baromètre de cet article
ÉCOLOGIE SOCIÉTÉ ÉCONOMIE
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Depuis la révélation du scandale des subprimes, on a beaucoup glosé sur l’irresponsabilité des banques, leur capacité de nuisance sur l’économie réelle, l’impuissance du politique… On a beaucoup glosé mais de remise en cause, aucune. Rien n’a changé. Ou plus exactement, si, cela a changé… mais en pire. Depuis les plans de relance, les banques vont bien merci. C’est la société qui fait faillite.

C’est dans ce contexte d’injustice croissante qu’il faut comprendre la sortie d’Eric Cantona sur les banques. Et son idée de « bankrun » : Eric Cantona propose de faire la révolution en allant, comme d’un seul homme, retirer son argent des banques. L’appel a été relayé sur Facebook-te-voilà. Condamnation de l’opération à droite, malaise à gauche, même chez les plus à gauche de la gauche. Il faudrait 3 millions de personnes pour faire « sauter la banque ». Près de 40 000 âmes ont annoncé, sur les réseaux sociaux, leur intention de passer à l’acte. Les médias s’en sont donné à cœur joie, excitant le fantasme de révolte du peuple sur les technocrates. Seul le guichetier, témoin privilégié de cette haine du banquier, a risqué d’en faire les frais. Mais le « bankrun » de Cantona est un flop.

Irresponsable, inutile, démago… On peut donc se moquer de l’appel. Le balayer d’un revers de main. Sauf que Cantona a raison de rappeler aux citoyens, à chacun de nous donc, qu’il est acteur d’un système et que son pouvoir de subversion est décuplé par la technologie. Là aussi, c’est de saison. Car les moyens de lutter contre le pouvoir des banques existent.

Il y a d’abord des décisions radicales à prendre au niveau politique. Oui, les gouvernements vont devoir choisir entre les banques et les citoyens. Mais engoncés jusqu’au cou dans les questions de compétitivité nationale – ou de guerre économique pour le dire franchement –, ils semblent pour l’instant peu enclins – voire pas du tout équipés – pour assumer un choix en notre faveur. Alors en attendant, restent les décisions radicales au niveau personnel. Et c’est là, encore une fois, qu’Eric Cantona a raison sur le fond.

On peut commencer par changer de banque et privilégier les structures mutualistes comme La Nef. Pour les offres et produits de crédits, on peut court-circuiter les banques et miser sur les prêts de personne à personne. Quelques sites Internet commencent à proposer ces services : c’est le cas du Lending Club ou du philanthropique Kiva. De la même manière, pour certains achats on peut choisir de régler en monnaies sociales ou locales (voir les réseaux Sel ou Sol), voire se convertir au troc en privilégiant ainsi les activités de proximité et donc les liens.

Car enfin, enfin, la grande angoisse des politiques, la vraie bombe révolutionnaire, ce n’est pas que le peuple assaille les banques. Mais qu’il fasse la grève de la consommation. Elle est là, précisément la « bancocratie ». Là, la source de l’aliénation, la dépendance induite aux banques, et à leurs produits miracles attrape-débiles. Et leur corollaire : la spéculation. Nous avons vécu à crédit. End of the story. Il est là, le chantier politique, énorme : l’invention d’un projet de société sans crédit. Le cœur de la révolution, si on le cherche n’est donc pas dans la mise à mort des banques, mais dans le réaménagement de notre rapport à l’argent et donc au temps. Il ne s’agit pas tant de leur utilité sociale à elles, les banques. Mais de notre utilité sociale à nous, citoyens qui aimerions ne pas être QUE des consommateurs.

Mais tout cela est bien plus engageant que de faire une descente chez son banquier. Et encore plus que de l’annoncer sur Facebook.

Ce billet est originellement paru sur le blog de Flore Vasseur

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Entrepreneur, chroniqueuse sur France Culture, Flore Vasseur est aussi documentariste et romancière. Elle est notamment l’auteur du roman « Comment j’ai liquidé le siècle », une charge féroce contre l’oligarchie politico-financière.

5 commentaires
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  • Le message général que le citoyen/consommateur/épargnant/travailleur est l’acteur principal du système qu’il critique est salutaire. Mais il faut raison garder.
    Aucun économiste ne critique la spéculation en soi ni ne dénonce le recours au crédit. D’ailleurs ces deux outils ne sont absolument pas incompatibles avec la décroissance.
    Enfin, évoquer "la grande angoisse des politiques, la vraie bombe révolutionnaire" ne me semble pas d’une grande utilité dans un régime politique où nous choisissons nos dirigeants et où nos libertés fondamentales sont respectées.

    8.12 à 14h45 - Répondre - Alerter
    • Antoine, je vous remercie pour votre aimable conseil mais visiblement, nous n’avons pas les mêmes références. Et d’ailleurs, les économistes et leurs manuels ont montré à quel point ils étaient incapables de prévenir dans la situation actuelle. Paul Jorion, qui est a peu près le seul à avoir anticipé la crise des subprimes, propose de prendre des mesures drastiques pour lutter contre la spéculation. Connaissez vous son travail ? Quant aux politiques qu’ils ne serviraient à rien de remettre en cause sous prétexte qu’ils ont été démocratiquement élus selon vous, vous m’inquiétez. Beaucoup même.

      8.12 à 17h08 - Répondre - Alerter
      • Bonsoir,

        Le titre de mon premier commentaire vous a paru peut-être un peu agressif et je m’en excuse.

        L’incapacité des économistes "dominants" à prévenir la situation actuelle est mon principal cheval de batail. Mais pour les combattre (sur le terrain des idées, hein), il faut déjà bien comprendre ce qu’ils racontent. Je lis des opinions d’économistes de courants très variés, dont Paul Jorion, mais je ne prétends bien sûr pas tout connaître de la science économique. Je n’en connais aucun qui conteste l’utilité de la spéculation. Son ampleur actuelle est évidemment contestable, mais le principe est presque vieux comme le monde et a permis d’éviter nombre de pénuries par le passé. Je pense qu’il est dangereux de mettre tous les économistes dans le même panier, à moins d’être partisan d’une décroissance radicale qui prône la sortie de l’économie et de la politique, dont je n’ai toujours pas compris les valeurs.

        Je remets aussi beaucoup en cause les politiques, surtout ceux au pouvoir. Mais dans un régime aussi libre, je ne vois pas comment on peut mieux s’opposer qu’en faisant des propositions alternatives, et pour cela il n’y a pas besoin de révolution. Elle déboucherait sur quoi d’ailleurs ? Il vaut mieux bien y réfléchir avant, parce qu’accepter des violences maintenant pour ne rien gagner au final me paraît douteux.

        Antoine

        8.12 à 19h58 - Répondre - Alerter
      • Flore,

        il existe d’autres "alter-économistes" qui, comme Paul Jorion, avaient annoncé la crise financière de 2008 et proposent des "mesures drastiques pour lutter contre la spéculation". Beaucoup militent à Attac, d’autres viennent de publier un "manifeste des économistes atterrés"...

        Et je ne pense pas non plus que remettre en cause le crédit soit LA solution. Le crédit est un outil, dont l’utilité dépend de ce qu’on en fait. Il est utile quand utilisé pour financer des projets utiles, comme le fait la NEF, qui n’est pas seulement une banque "mutualiste", mais surtout une banque qui ne finance que des initiatives sociales et/ou écologiques. La NEF envoie d’ailleurs un descriptif détaillé des prêts accordés chaque année à ses sociétaires...

        D’autres exemples d’épargne (et donc de crédit) citoyens utiles : Terre de Liens, qui finance l’installation de paysans bio ou Energies partagées, pour un investissement citoyen au profit d’une gestion durable de l’énergie. Comment voudriez vous financer ce genre de projet sans crédit ?

        Alternativement,

        Mathieu

        9.12 à 10h22 - Répondre - Alerter
  • senzadkuna : a credit ?

    l’air que l’on respire est a credit nous n’avons pas le choix ...a moins de vivre en amazonie

    7.12 à 20h20 - Répondre - Alerter
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