Et si... ? |
Par Penelope |
7-05-2013
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La voie du désencombrement... |
Il existe un certain nombre d’ouvrages, de sites, de blogs, d’articles traitant du désencombrement, art de diminuer le nombre d’affaires que l’on possède avec différents objectifs à la clé. Ces objectifs peuvent être aussi divers qu’il y a de raisons de se « désencombrer » : gain de place (ou déménagement dans un lieu avec moins de possibilité d’accumulation), tri dans des affaires dont on ne se sert plus, besoin de vendre des affaires pour aider côté financier, envie de tourner une page, besoin d’y voir plus clair (dans ses affaires comme dans son esprit), souhait de rééquilibrer entre ce que l’on a reçu et ce que l’on partage... Souvent l’objectif initial se mélange après coup avec les bénéfices secondaires d’autres objectifs.
Une amie m’a parlé d’un livre qu’elle a trouvé très bien, « L’art de l’essentiel » si je me souviens bien. J’avoue ne pas avoir eu l’occasion de le lire, la nécessité de faire du tri dans mes affaires m’étant tombée dessus en cours de route de changement de vie. En 3 ans je suis en effet passée d’une maison de 100m2 à un appartement de 30 m2 puis à un « studio flottant » équivalent habitable 18m2. J’ai eu la chance de pouvoir stocker des cartons dans une cave de qualité le temps de gérer la transition à mon rythme. Le temps de faire le point sur ce que je « possède », sur ces affaires que je transporte avec moi, souvenirs, livres, vêtements, mobilier...
Et de remettre au goût du jour quelques questions existentialo-pratiques : qu’est-ce que c’est « posséder » quelque chose ? De quoi ai-je besoin pour vivre au quotidien ? De quoi ai-je besoin occasionnellement ? A quoi me sert le reste ? Est-ce que cela pourrait être plus utile à quelqu’un d’autre ? Quelles ressources ont été nécessaires pour que je puisse disposer de tout cela ? A quelles émotions m’accroche-je à travers certains objets/livres/et autres « souvenirs » ? Quelle est la place que je veux donner à ces souvenirs ? Quelle place est-ce que j’accepte de donner dans ma vie aux « objets matériels » ?
Je ne pensais pas que me retrouver à faire du tri dans mes affaires me plongerait dans une telle introspection questionnant aussi bien mes valeurs que le sens de la société dans laquelle j’ai grandit.
L’avantage d’avoir déménagé rapidement et d’avoir du mettre ¾ de mes affaires dans des cartons qui sont restés 1 an dans une cave est que quand on rouvre les cartons, non seulement on ne se souvient plus trop ce qu’il y a dedans, mais surtout on se rend compte de tout ce qui n’a pas « manqué ». Les livres sont fait pour être lus le plus largement possible, j’en ai donc remis une bonne partie en circulation, via des amis (j’ai lancé une collection « Biblio-Nomade : des livres à partager » ;) ), des bouquineries (Oxfam notamment), et j’en ai vendu certains également. Beaucoup de mes vêtements ne me correspondaient plus, j’ai décidé d’arrêter de garder tout ce qui était « au cas où » sans pour autant chercher à « remplacer », même chose pour le reste d’ailleurs, à quelques exceptions près.
L’avantage de vivre dans un espace réduit est que cela oblige à réfléchir à 2 fois sur chaque chose qu’on y introduit. Les 2 premières questions étant :
Si l’une des 2 questions obtient pour réponse un non (ou un doute), alors on ne regarde plus l’objet de la même façon. S’il y a résistance, la 3ème question peut être : à quel besoin répond cette envie ? Cela peut tout à fait être une influence externe ou une compensation émotionnelle...
Forcément avec mon parcours récent j’ajoute l’interrogation sur ce que la fabrication de cet objet a pu coûter en termes éthiques (exploitation de la nature/planète au-delà de ses capacités de régénération autant qu’exploitation humaine ?...). Je l’avoue ici et maintenant : il m’arrive encore parfois de faire l’autruche. De savoir mais de ne pas vouloir voir. De ne pas accepter que la société ait atteint de tels extrêmes de non respect de la vie, de l’humain, de la Terre. De vouloir oublier ce que j’ai appris et redevenir une enfant qui fait entièrement confiance en ce qu’on lui dit. Mais je me rappelle bien vite la réalité, le chemin que j’ai parcouru pour ouvrir les yeux, et mes rêves qui m’orientent et me guident vers une vie plus en accord avec mes aspirations profondes. Ce malaise, cette dissociation, s’ils ne me permettent pas encore d’être 100% en accord avec ces valeurs qui me guident, me poussent toujours plus à faire de mon mieux et me permettent de continuer à évoluer. Je m’éloigne un peu du sujet ? Peut-être pas tant que ça.
La sobriété heureuse de Pierre Rabhi, la décroissance, la simplicité volontaire, et tant d’autres... Tout cela m’était étranger il y a encore si peu de temps. Je connaissais les concepts, j’avais lu et compris tout cela intellectuellement, j’adhérais au propos sur le principe, mais cela restait « hors de moi ». À présent je peux dire que je le vis, le ressens, que c’est intégré en moi... Je me sens sur le chemin et il m’en reste encore beaucoup à parcourir, quelle joie !
Joie d’avoir découvert que mon identité ne dépend pas des biens que je possède. De ne plus accorder d’importance à « l’image », à l’apparence, au-delà de ce qui me paraît juste intérieurement. Joie d’avoir réduit l’écart que je percevais entre moi et d’autres. Joie de retrouver des plaisirs autres que la consommation (je ne mets plus les pieds dans les magasins - sauf alimentaire - et je passe beaucoup plus de temps dans la nature par exemple !). Joie d’apprendre à me connaître, ce qui est si facile à contourner quand on était comme moi une acheteuse pour compenser. Joie d’apprendre à faire moi-même quand c’est possible, d’oser demander à d’autres sinon, pour apprendre ou juste pour de l’aide selon les cas. (C’est encore dur pour moi ayant tellement grandi coupée des autres, à se demander si ce n’est pas la raison première de mon passage sur Terre dans cette vie : récréer du lien... !)
(Re)découvrir d’autres façons de vivre qui commencent enfin doucement à être médiatisées et dont j’ai déjà largement parlé dans d’autres articles (Terra Eco aborde ces sujets depuis longtemps merci à eux !) : la consommation collaborative, les Incroyables Comestibles, le partage, l’échange, le don... Il y a tant à faire ! Tant à apprendre ! Tant de peurs à lâcher aussi... Car au final, pour chaque carton vidé dans cette fameuse cave, c’est autant de mes forces et faiblesses que j’ai mis en lumière. Pour chaque objet donné, j’ai reçu beaucoup plus. Pour chaque souvenir transmuté, j’ai dépassé l’équivalent de peurs.
La raison d’être d’une peur c’est de prévenir d’un danger. Sauf que les dangers et notre capacité à y faire face évoluent avec les années, il est donc sain que les peurs évoluent aussi. Il faut croire que les miennes s’étaient un peu enkystées en cours de route ;)
Bref... Il est à mon avis toujours bon de se rappeler que l’on n’emporte rien avec nous au moment de la mort, à part éventuellement le résultat de nos expériences. Etrangement plus j’ai trié mes affaires, plus j’ai trouvé que j’en avais trop. J’ai réussi à tout faire tenir là où je vis. Cela me paraissait tout simplement inimaginable il y a encore 1 an ! Et s’il est vrai que ma vie a beaucoup évolué entre temps, il est indéniable que dans cette histoire, c’est surtout mon regard qui a changé... Je remercie chaque pas qui m’a permis de réaliser ce challenge, et regarde avec curiosité et pas après pas ce que va m’apporter la suite du chemin.
Post-scriptum :
Je viens de voir ledéfi du mois des ambassadeurs de la transition, jolie coïncidence !! :) Pour une fois que je suis synchrone entre l’inspiration et le défi, j’adore...
Quelques ajouts de liens qui m’ont été utiles :
Tout ceci bien sûr sans oublier en parallèle la famille, les amis, les rencontres... partout où partager ce qui peut être utile à d’autres sans ajouter trop de contenu aux décharges et incinérateurs !
Note concernant la photo : il y a deux semaines j’ai mis dans de la terre les pépins d’une pomme que je venais de manger... Voici la suprise que j’ai eu en rentrant chez moi après quelques jours d’absence. :) Etape suivante trouver où replanter ce potentiel futur pommier ! Le lien avec l’article ? Le désencombrement m’a nettement permis de laisser de la place pour des plaisirs différents...
En plein apprentissage d’un "autre monde" possible depuis 2010... A chaque nouvelle découverte, info, rencontre, je teste, j’expérimente, je m’approprie de nouveaux savoirs et mode de vie, et réalise à quel point j’ai vécu "conditionnée" sans remettre "mes bases" en question pendant 30 ans. Ces bases étaient pourtant si faussées, et les conséquences si peu en accord avec mes croyances profondes... De prises de conscience en expériences, peu à peu j’ai lâché plein de peurs inutiles et me sens ainsi de plus en plus vivante et cohérente, consciente de chaque pas sur ce chemin. Et reconnaissante de toutes les rencontres et expériences qu’il m’apporte ! |
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