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Wifu Project

Par WIFU
21-02-2013
Mots clés
Société
France
BLOG

Triselec trie les déchets, pas les hommes

Triselec trie les déchets, pas les hommes
(Crédit photo : DR)
Triselec, premier centre de tri français, mêle méthodes de recrutement audacieuses et productivité.

Saviez-vous que la première poubelle française était une poubelle à tri sélectif ? Eugène-René Poubelle a tenté d’imposer à la population de Paris un bac à ordures à tri sélectif dès 1883. Un siècle plus tard, l’entreprise Triselec poursuit le travail de l’illustre Monsieur Poubelle et s’attaque à l’étape suivante du cycle de vie du déchet : sa valorisation.

La société d’économie mixte Triselec (société anonyme avec capitaux privés et publics) est le plus grand centre de tri de France en capacité de traitement. Elle récupère, trie et valorise les déchets ménagers de la métropole lilloise depuis plus de vingt ans. Triselec est un cas d’école de développement durable : cœur de métier répondant à un enjeu environnemental, résultats économiques probants, gestion du personnel audacieuse et sens aiguisé du défi.

(Vidéo réalisée par WIFU Project en juillet 2012)

1er pari – Combattre un a priori : « Les Français ne voudront jamais trier, il n’y a aucun avenir économique dans cette activité »

Triselec a créé le premier centre de tri des déchets en France en 1991. Avant cette date, les principales réponses au problème des déchets de nombreuses villes étaient l’incinération et la mise en décharge. « On a fait bouger la loi en 1992 pour que les collectivités aient les moyens financiers de mettre en place la collecte sélective », indique Patrick Vandamme, ancien directeur et cofondateur de Triselec. La société reçoit à cette occasion Brice Lalonde, alors ministre de l’Environnement, et fait du lobby pour arriver à la loi de 1992 qui stipule que les collectivités doivent désormais se munir d’infrastructures permettant l’élimination des déchets ménagers. C’est également dans cette loi qu’est utilisée pour la première fois dans la langue française l’expression valorisation des déchets, qui consiste dans « le réemploi, le recyclage ou toute autre action visant à obtenir, à partir de déchets, des matériaux réutilisables ou de l’énergie ». Une nouvelle ère dans les déchets est née, et Triselec en est le pionnier.

2ème pari - Aucune sélection à l’embauche

Triselec a développé un modèle de recrutement unique, en ne rejetant aucun opérateur de tri au moment de l’embauche. Ainsi, tout chercheur d’emploi qui se présente est mis sur liste d’attente. Dès qu’un poste se libère, il est immédiatement embauché. Outre le tri des déchets ménagers, la vocation de l’entreprise est l’insertion sociale et professionnelle, la lutte contre le chômage et l’exclusion sociale. Le tri manuel est un poste accessible aux personnes peu qualifiées. « En les accueillant dans l’entreprise, en leur donnant le statut de salariés, Triselec leur permet d’apprendre ou de réapprendre à travailler, avant de les accompagner individuellement dans la recherche d’un emploi stable ou d’une formation qualifiante », souligne Patrick Vandamme. L’entreprise embauche également des ex-détenus de la maison d’arrêt de Loos, dans le Nord. Ces derniers sont formés en prison et recrutés par la suite. Les résultats sont éloquents : « Le taux de récidive est de 10% chez ces ex-détenus contre 50% en moyenne(1) pour les autres », assure Patrick Vandamme.

Autre élément participant à l’insertion de ces salariés : la prise en charge du permis de conduire à hauteur de 900 euros par l’entreprise, avec cours et formation au code de la route sur le lieu de travail.

3ème pari - Lutte contre l’illettrisme par une pédagogie innovante. « On va les chercher là où ils sont, pour les emmener là où on veut qu’ils soient. »

20% des salariés chez Triselec sont illettrés. La société estime que la lecture et l’écriture sont les premiers pas vers la réinsertion. En 1997, s’inspirant des visioconférences alors encore réservées aux grands patrons, l’entreprise décide d’adapter cet outil pour ses employés illettrés, malgré les réserves émises par les chercheurs spécialisés dans les questions d’illettrisme.

« Le premier jour, vous imaginez l’état d’esprit du gars venant pour trier des déchets, et nous on le place devant un ordinateur. On veut tirer vers le haut nos salariés, les brutaliser intellectuellement », martèle Patrick Vandamme. C’est la première expérience de formation à distance pour illettrés en Europe. Les résultats ne se font pas attendre : valorisation et motivation des salariés et hausse de productivité.

L’entreprise est également à l’origine de la technique de formation à flux tendu : des salariés formés au compte-gouttes dans un centre de formation multimédia proche des lignes de production. Cette approche permet une formation de masse et continue, limite les désorganisations sur les lignes de production et permet de remédier à temps à toute erreur de la part d’un opérateur.

Oui mais... la productivité dans tout ça ?

Triselec n’a rien à envier aux mastodontes spécialisés dans le tri sélectif tels Veolia Propreté, Sita... Elle a longtemps bénéficié des meilleurs taux de valorisation européens (rapport entre les déchets entrants et les déchets valorisés). 92% des déchets qui entrent dans l’entreprise sont revendus à des entreprises de valorisation ; des résultats globalement supérieurs à ses concurrents européens. L’entreprise ne parle d’ailleurs pas de taux de refus comme ses concurrents mais de taux de valorisation « ce qui est nettement plus dynamique », assure l’ancien directeur. Comme quoi on peut faire social et efficace...

(1) 52% des sortants de prison (tous crimes ou délits confondus) ont commis une nouvelle infraction dans un délai de cinq ans après leur libération ; selon l’étude menée par Annie Kensey et Pierre Tournier, chercheurs spécialisés en démographie carcérale.

Mots-clés : Société
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A PROPOS

Wifu pour Worldw’Ideas for the FUture, c’est à dire les solutions développées aujourd’hui à travers le monde, pour dessiner la société de demain. A l’origine de WIFU, trois amis passionnés de voyage, d’innovation sociétale et d’entrepreneuriat social, Marc Giraud, Sylvain Delavergne et Rémi Sierakowski, se sont rencontrés sur les bancs de l’école en Master stratégie du développement durable à sup de Co La Rochelle. Marc quitte son emploi de Chef de projet RSE pour monter le projet WIFU en janvier 2012 puis il est rejoint par Sylvain et Rémi.De juillet 2012 à juillet 2013, Rémi, Sylvain et Marc ont traversé 22 pays sur les continents américain, asiatique, africain et européen et rencontré 60 acteurs du changement : entrepreneurs /intrapreneurs sociaux, ONG, collectivités, philosophes qui ont développé des solutions durables. Le webdocumentaire WIFU gratuit et open source réalisé par Marc Giraud en partenariat avec la société FrapaDoc Productions et son spécialiste du webdoc Gaspard d’Ornano est disponible au public depuis le 23 juin 2014. Une version anglaise sera disponible en septembre 2014. Le livre WIFU sera édité par AFNOR Editions début 2015. Complémentaire du webdocumentaire, il analysera sur un ton dynamique et décontracté les solutions durables étudiées sur le terrain. En scannant les QR codes au fil des pages, le lecteur sera directement propulsé dans le webdoc interactif.

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