Les gagnants
- Les scientifiques :
L’accord de Copenhague donne raison aux travaux du Giec. Cette déclaration fige à 2 degrés la hausse maximum des températures moyennes à la surface du globe. Malheureusement, le texte ne fixe aucune échéance à cette limitation du réchauffement. Un vrai problème quand on sait que ces 2° de hausse des températures constitue l’un des scénarios les plus optimistes construits par les scientifiques.
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- Les lobbies :
La fête peut continuer ! Plutôt discrets pendant l’ensemble de la Conférence, les industriels liés notamment au pétrole ou au charbon, rentrent chez eux avec la banane. Ils n’ont pas eu à se faire plus pressants pendant la négociation tant les dirigeants des pays les plus polluants (Chine, États-unis, Russie, Inde notamment) avaient intégré dans leurs positions ces arguments économiques. Transports aériens et maritimes eux aussi peuvent continuer leurs affaires sereinement.
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- La Chine et l’Inde :
Pas de manifestation de joie, certes. Mais ces 15 jours à Copenhague ont célébré l’intransigeance de la Chine qui n’a pas voulu céder sur les contrôles des émissions de gaz à effet de serre sur son sol par des entités extérieures. Ces deux pays qui avaient placé leur croissance économique au premier rang de leurs priorités repartent satisfaits. L’accord n’est pas contraignant, Pékin et New Delhi, sans la ramener, s’en sortent bien.
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- Les Etats-Unis
Obama est reparti avec ce qu’il voulait : peu d’engagement et surtout pas de contrainte. Il va donc pouvoir se présenter décontracté devant son Sénat qu’il ne devrait pas froisser. Obama a en effet d’autres chats à fouetter comme l’épineux dossier de l’assurance maladie. Dernier arrivé à Copenhague, l’homme a semble-t-il mené les négociations comme il l’entendait bien aidé par Hillary Clinton et son négociateur Todd Stern. Barack Obama perd en revanche beaucoup de crédit ici en Europe notamment vis-à-vis de la société civile et des ONG qui avaient placé en lui beaucoup d’espoir, il y a seulement quelques mois.
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- Sarkozy :
Le chef d’État français n’a pas tout perdu à Copenhague. Il devrait bénéficier d’un bon retour auprès de l’opinion publique hexagonale. Auteur d’un discours bien ficelé sur la forme jeudi lors de la Conférence, il a réussi avec l’aide du Brésil, à provoquer des réunions à huis clos dans la nuit suivante qui ont abouti à l’accord. Son style, impétueux et hors norme, a sans doute permis d’accélérer les choses, même si le résultat final (voir ci-dessous) n’est pas à la hauteur des espérances.
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Les perdants
- Les états insulaires :
Une augmentation de la température de +2°C selon les scientifiques du Giec aura pour conséquence une montée du niveau des océans qui va directement menacer et forcer à migrer les populations de ces îles dont les terres seront largement submergées. Jusqu’au bout de la conférence de Copenhague, Tuvalu s’est énergiquement opposé au texte, exigeant un objectif maximum de +1,5°C. Ce qui n’a pas empêché les Maldives de supplier les pays du Sud du G77 de ne pas « faire sombrer l’accord ». Un texte qui, en l’état, ne reconnaît pas le statut des réfugiés climatiques.
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- Les anticapitalistes et les alters : Les leaders anticapitalistes, Evo Morales (Bolivie) ou Hugo Chavez (Vénézuela) en tête, ne sont parvenus à embarquer les pays du Sud - en dehors du Soudan et du Nicaragua - notamment les plus pauvres et vulnérables d’entre-eux, malgré leurs diatribes répétées contres les États-Unis. Côté manifestants, les activistes les plus radicaux - qui espéraient bloquer le déroulement de la conférence - ont échoué, et les alter-mondialistes n’ont pas mobilisé leurs troupes au niveau de ce qu’il avait réussi à faire contre l’OMC à Seattle il y a 10 ans ou à Gêne (Italie) en 2001. Mais l’accord à minima validé à Copenhague pourrait exacerber les opposants au prochain round de négociations, à Bonn ou Mexico.
- L’Afrique :
Selon la Pan African Climate Justice Alliance, une organisation anglophone basée auprès de la Conférence des Églises africaines), avec une hausse des températures moyennes de 2 degrés, 55 millions de personnes de plus pourraient souffrir de famine et 350 à 600 millions de personnes supplémentaires manquer d’eau. Le texte d’accord prévoit que les aides à l’adaptation et à l’atténuation du changement climatique soient prioritairement allouées aux pays les plus vulnérables, mais les 100 milliards de dollars promis par les pays développés seront-ils suffisants ?
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- Le Danemark :
Pendant toute la conférence, le pays hôte a donné le sentiment de jouer le jeu américain, irritant les états du G77 qui l’ont accusé de faire circuler des textes « sous le manteau » et dénoncé un « manque de transparence » dans les négociations. A titre plus personnel, la ministre de l’environnement danoise, Connie Hedeggaard - fraîchement nommée commissaire européenne aux affaires climatiques – en a fait les frais, laissant sa place au premier ministre danois Rasmussen pour présider les dernières séances plénières.
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- L’ONU :
Elle sort forcément perdante de Copenhague puisque les négociations se sont enlisées jusqu’à l’arrivée des chefs d’État. Par ailleurs, si le Néerlandais Yvo de Boer, secrétaire général de l’UNFCCC, s’est d’abord vanté de la dimension "très démocratique" de cette conférence internationale, ouverte à plus de 21 000 « observateurs », ces derniers ont vu leurs accréditations fondre comme neige pendant les derniers jours de négociations et les ONG ont crié au scandale.
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- Les ONG :
Elles s’étaient déplacées en force à Copenhague et ont réussi la manifestation pacifique du samedi 12 décembre : 50 000 personnes ont défilé et les incidents sont restés limités. Mais elles ont été mises sur la touche dans la dernière ligne droite et il est peu probable qu’elles puissent bénéficier dans un avenir proche d’une caisse de résonance aussi inouïe que l’a été ce sommet de Copenhague. Pour les ONG, la difficulté sera d’enrayer la démobilisation possible des militants, tout en évitant le catastrophisme et l’écueil d’une radicalisation extrême.
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- L’Europe : Elle voulait prendre la tête des négociations et tirer les autres pays vers des objectifs plus hauts, avec un cadre plus contraignant en matière de réduction des émissions de gaz à effet de serre (à hauteur de -50% d’ici 2050). C’est raté. Mais au moins l’Europe le reconnait. « C’est mieux que pas d’accord du tout, mais je ne peux pas cacher ma déception », a avoué José Manuel Barroso devant la presse avant de conclure : « c’est un premier pas et il faudra en faire bien d’autres. »
- Les climato-sceptiques :
La reconnaissance par tous les pays participants à cette conférence, de la réalité du changement climatique, et l’intégration dans le texte final de l’objectif de limiter le réchauffement à +2°C, est un camouflet sans précédent pour ceux qui nient encore les études de la communauté scientifique sur le climat, réunie au sien du Giec.
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