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5-10-2011
Mots clés
Société
Alimentation
Monde

Fat tax : « Peu efficace à long terme sur l’obésité »

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Fat tax : « Peu efficace à long terme sur l'obésité »
(Crédit photo : Puuikibeach - flickr)
 
Le Danemark vient introduire une taxe sur les graisses. Un bon outil pour lutter contre l'obésité ? Pas forcément, argumente l'économiste Olivier Allais pour qui cette mesure risque de pénaliser les plus démunis.
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ÉCOLOGIE SOCIÉTÉ ÉCONOMIE
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Olivier Allais est économiste à l’Institut national de recherche agronomique (Inra).

Terra eco : Comment fait-on pour mesurer l’efficacité d’une « fat tax » ?

Olivier Allais : Il faut arriver à mesurer ce qu’on appelle dans notre jargon l’élasticité-prix, c’est-à-dire la sensibilité des consommateurs aux variations de prix. S’ils sont très sensibles au coût d’un produit et que celui-ci augmente, la demande baisse fortement. Or, l’élasticité varie selon les familles de produits et même à l’intérieur de celles-ci. On va par exemple observer une inélasticité des consommateurs aux prix lorsque certains produits sont indispensables ou que les consommateurs y sont très attachés.

Une « fat tax », ou plus généralement une taxe sur les produits néfastes pour la santé, peut-elle agir sur la consommation et donc sur l’obésité ?

Il n’y a pas de consensus sur la question. Dans une de mes études, je suis arrivé à la conclusion qu’une taxe sur les produits gras aurait peu d’effets sur le nombre de calories achetées et pourrait à l’inverse réduire les apports en vitamine D, calcium, magnésium et fer. Et ce, tout particulièrement pour les ménages à revenu modeste.

Certes, si un yaourt à 40% de matière grasse est très taxé, alors le consommateur va acheter celui à 20% de matière grasse qui le sera moins ou celui à 0%, non taxé. Ainsi, dans une autre étude en cours (1), nous montrons que, dans un premier temps, la substitution, c’est-à-dire le passage vers des yaourts ou fromages blancs moins gras, est assez nette : le total de graisse achetée par les consommateurs pour ces produits baisserait de 36%. Mais dans un second temps, les industriels et les distributeurs auront tendance à grignoter sur leurs marges pour limiter l’augmentation des prix provoquée par la taxe. L’effet sur le nombre de calories achetées par le consommateur sera alors amoindri. Et l’effet de la taxe affaibli. A titre d’illustration, pour les yaourts et fromages blancs, nous montrons que les décisions stratégiques des entreprises sur leurs marges conduiraient à une baisse finale de 9% du total de graisse achetée, au lieu des 36% de base.

Toute la question est donc de savoir sur quels produits doit porter cette taxe. Si elle touche des aliments sur lesquels les industriels réalisent des marges élevées, ils vont avoir les moyens de la neutraliser. Le problème, c’est que les bénéfices réalisés sur les différents produits ne sont pas publics.

Justement la « fat tax » peut-elle nuire au pouvoir d’achat des plus démunis ?

Nous montrons dans l’étude que les ménages à revenu modeste souffrent le plus de cette politique à court terme, hors effets de santé plus difficilement mesurables. La taxe peut avoir également un effet néfaste lié à l’innovation sur cette catégorie de la population. Soumis à celle-ci, les industriels peuvent en effet inventer des produits avec moins de sel, de sucre ou de matières grasses. Des aliments qui exigent de nouvelles recettes sont plus complexes à concevoir et risquent donc d’être plus chers. Et qui va pouvoir se permettre de consommer ces produits meilleurs pour la santé ? A mon sens, cette innovation risque de se faire aux dépens des ménages les plus modestes. Et d’accentuer l’inégalité face à l’obésité.

Tous les produits peuvent-ils être taxés ?

A priori, la taxe est applicable à n’importe quel produit. Reste la question de l’acceptabilité. Il y a des denrées que le consommateur n’est pas prêt à voir imposer. Ça peut-être le cas du beurre et du fromage en France. Les politiciens doivent le prendre en compte.

La taxe peut-elle être une belle manne financière pour l’Etat ?

Oui, ça peut être une source de revenus assez importante. Nous avons estimé qu’avec une taxe de 10% sur les produits de la famille fromage/beurre/crème, on pouvait augmenter les recettes habituellement perçues de 16,3%.

La « fat tax » pourrait-elle par ailleurs pousser les industriels à changer de manière plus générale la teneur de leurs produits ?

On peut en effet imaginer une prise de conscience collective poussée par la demande du public. A mon sens, cela marcherait très bien. D’ailleurs on voit déjà une volonté de quelques industriels de réduire les teneurs des aliments. Certains ont même signé des chartes. Ce serait idéal si les consommateurs à panier identique pouvaient acheter moins gras, moins salé, moins sucré. Mais il y a un problème de faisabilité. Comment faire supporter le poids de ces innovations industrielles ? Pour cela, les produits gras (donc moins chers, ndlr) resteront sans doute sur le marché. Et le choix sera laissé aux consommateurs.

(1) menée avec Fabrice Etilé et Sébastien Lecocq

Et vous qu’en pensez-vous ? Taxer la malbouffe, êtes-vous pour ou contre ?

A lire aussi sur terraeco.net l’interview d’Olivier Andrault, de l’UFC Que Choisir
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