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5-05-2010
Mots clés
Politique
France
Reportage

Grenelle 2 : ma nuit avec un député

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Grenelle 2 : ma nuit avec un député
 
La « boîte à outils » du Grenelle ? Tu parles ! Le Grenelle 2, c'est d'abord une usine à gaz. Cette semaine, les députés examinent et amendent le texte : un marathon fait de stratégies et de petites querelles. « Terra eco » a emboîté le pas du député Vert François de Rugy.
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ÉCOLOGIE SOCIÉTÉ ÉCONOMIE
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16h30 : Pour s’échauffer, rien de mieux qu’une petit manif. Une trentaine de militants associatifs sont réunis devant l’Assemblée. Entre cris et sifflets, François de Rugy – teint bronzé et cravate colorée – annonce la couleur. L’examen du Grenelle 2, c’est un marathon de trente heures de discours à se répartir entre groupes : 11h25 pour le PS, 8h30 pour l’UMP, 5h45 pour la GDR, la Gauche démocrate et républicaine (Verts, PC et indépendantistes d’outre-mer) et 4h20 pour le Nouveau Centre. « Il n’y a aucune raison d’avoir imposé ce temps limité, grogne le député Vert. L’examen du Grenelle 1 avait pris deux semaines… » Du coup, il faudra être stra-té-gi-que avec le temps. Ne pas tout boulotter au début et garder du rab pour l’examen des articles.

17h25 : Jean-Louis Borloo grimpe au pupitre. Le ministre de l’Ecologie égrène les réussites du Grenelle : photovoltaïque en hausse de 600%, voitures moins polluantes, 660 kilomètres de ligne grande vitesse en construction, etc. « Il essaie de nous faire croire que plus il répète quelque chose, plus il va le faire. C’est la méthode Coué », s’agace François de Rugy, croisé dans la salle des quatre colonnes. Entre hémicycle, bureaux des députés et tribune de presse, c’est le carrefour stratégique de l’Assemblée.

18h00 : Certains plongent le nez dans leur journal. Au dernier rang, François Bayrou se marre avec un collègue. Les huissiers – nœud pap, plastron et chaîne en or – observent un curieux ballet. Ils portent de petits papiers pliés au chevet des députés. Des messages secrets ?

18h40 : Premier revirement. Patrick Ollier, président de la Commission des affaires économiques, promet de supprimer le seuil minimum de 15 mégawatts pour tout nouveau parc éolien. « On nous dit que quinze mégawatts, c’est inacceptable. Soit ! » A gauche, les députés s’interrogent du regard : « Du lard ou du cochon ? »

19h : C’est l’heure de la première « motion de renvoi en commission ». Si elle est adoptée, le débat devra s’interrompre. Mais on n’y croit guère. Jean-Louis Borloo s’est éclipsé, laissant derrière lui ses lunettes que Chantal Jouanno examine, l’air circonspect. Le député André Chassaigne (PC) à la tribune : « On pourrait dire qu’un fantôme parcourt les rues de Copenhague et je crois que ce fantôme rôde en silence dans cette salle. Ce fantôme effrayant, c’est le capitalisme ! ». Brrr…

19h30 : Malgré les remarques et les rires, le député du Puy-de-Dôme ne se démonte pas. Mais au fait, pourquoi les députés hurlent-ils comme des damnés ? Explication de François de Rugy : « On doit crier fort et au bon moment pour que ce soit repris au compte-rendu. C’est le moyen de prouver qu’on a bien participé au débat. D’ailleurs quand j’interviens, je jette toujours un coup d’œil pour voir si les agents notent. Mais ils n’entendent pas tout. Et Cochet et Mamère ont des voix qui portent plus que la mienne… »

20h : Les journalistes télé font leurs plateaux. D’autres descendent des bières à la buvette. Dans l’hémicycle, la motion d’André Chassaigne est rejetée. Le fantôme n’a pas effrayé grand-monde.

20h10 : Pause-dîner. Pendant la séance, le ministre Borloo a fait passer un petit mot (c’était donc ça !), et invité les députés à souper à ses frais. Au menu, buffet de crudités, plat de viande ou de poisson, dessert. « D’habitude, on se mélange. Mais là, chacun est resté un peu dans son coin. Nous entre Verts et communistes, Borloo et Jouanno avec l’UMP », raconte notre député Vert, une fois rassasié.

21h26 : Silence dans l’hémicycle. Un député communiste en interpelle un autre : « Pomponette, hé, Pomponette ». Etrange.

21h32 : Yves Cochet entame sa motion de renvoi et parle « d’enverdissement cosmétique » pour dénoncer le « greenwashing ». « Je l’avais prévenu : les anglicismes ne sont pas retenus dans le compte-rendu », sourit François de Rugy. Las, la motion est rejetée.

22h30 : « Chassaigne a déjà fait une heure, Cochet 30 minutes, Mamère 5… Après la discussion générale, il nous restera 3 heures. C’est jouable », se félicite le député Vert, les yeux rouges. A quand la fin du débat ce soir ? « Ça dépend des présidents. Certains sont des couche-tôt. D’autres ont tendance à pousser à la roue… » Seule exigence : garder huit heures entre cette séance et la prochaine. « Mais comme on ne reprend qu’à 15 heures demain, ça peut durer théoriquement jusqu’à 7 heures ! »

23h38 : Le député François Brottes (PS) plagie le Grand Jacques. « C’était au temps où Grenelle rêvait, (…) C’était au temps où Grenelle j’y croyais ! (…) Il y avait mon grand-père. Il y avait ma grand-mère. Il attendait la guerre. Elle attendait mon père ». « Elle attendait Mamère ? », s’époumone un député, remonté par son dîner. « Et on voudrait que j’aie le moral ? » , rétorque François Brottes.

23h29 : La tribune de presse est vide depuis longtemps. Dans le public, huit irréductibles, très concentrés.

00h07 : « On dit souvent que pour que les huissiers aient leur prime, il faut poursuivre les débats jusqu’à minuit cinq », confiait un peu plus tôt François de Rugy. Si c’est vrai, les huissiers ont gagné leur soirée. La vice-présidente feuillette un magazine. Ce n’est pas « Terra eco ».

00h09 : « La parole est maintenant à M. François de Rugy. » Accroché à la tribune, il expose sa théorie du Truman Show : « J’espère que l’Assemblée nationale n’est pas une sorte de théâtre d’ombres où l’on pourrait continuer à croire des choses en dépit de ce que tout le monde voit dans la réalité ». Devant lui, un compteur numérique affiche le temps qui passe. « Avant, on avait des lumières rouges. On n’y prêtait pas attention et tout d’un coup, elles se mettaient à clignoter de plus en plus vite ! » François de Rugy avait annoncé 10 minutes, il en fera 22.

1h : Une ombre de barbe sur les joues, le député Vert s’en va dormir à l’hôtel. La résidence de l’Assemblée et ses 50 chambres affiche complet. Dormir dans son bureau ? Le député l’a déjà fait. « Mais ce n’est pas très confortable, il n’y a pas de cabinet de toilettes. Et les femmes de ménage viennent faire leur travail tôt le matin. » Jeudi soir, il repartira vers la Loire-Atlantique même si le débat n’est pas fini. « On nous dit toujours que les députés sont flemmards. Qu’on n’est pas assez à l’Assemblée ou pas assez dans notre circonscription. Ce n’est pas facile de satisfaire tout le monde ».

2h25 : Fin de la séance.

Sources de cet article

- Le compte-rendu de la première séance à l’Assemblée nationale
- Le compte-rendu de la deuxième séance à l’Assemblée nationale
- Photo : La Chaîne parlementaire

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  • Bonjour à tous,
    Il aurait été sympa de préciser pourquoi "la trentaine de militants associatifs" présents depuis le matin manifestait devant l’Assemblée, et pourquoi FDG a pris la peine de venir les soutenir, d’autant que cela devrait interpeler un minimum Terra-Economica…

    C’est bien la coordination anti aéroport de Notre-Dame-des-Landes qui a affrété un car
    ce mercredi matin au départ d’Héric et Nantes pour emmener 45 personnes et
    "délocaliser" la vigie anti-aéroport devant l’Assemblée Nationale, profitant de l’actualité de l’examen du texte de loi Grenelle 2.

    Une délégation a d’ailleurs été reçue par des conseillers du ministre Borloo qui lui ont appris que les objectifs des porteurs du projet étaient maintenant de faire de Notre-Dame-des-Landes un aéroport "low-cost", pour atteindre 11 M. de passagers à l’horizon 2050, au lieu des 9 M. prévus initialement…

    Décidément ce projet d’aéroport low-cost devient plus que jamais "grenello-incompatible" !

    6.05 à 16h22 - Répondre - Alerter
  • équipe parlementaire FDR : Pour aller plus loin...

    ...et connaître, sur le fond, les propositions et interventions de François de Rugy dans le débat sur le projet de loi Grenelle 2 : www.francoisderugy.fr

    6.05 à 09h41 - Répondre - Alerter
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