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Emmanuel Guérin : "Le successeur d’Yvo de Boer devra redéfinir le rôle de l’Onu”
vendredi, 19 février 2010 / Karine Le Loët /

Rédactrice en chef à « Terra eco ».

Yvo de Boer a démissionné. Le secrétaire exécutif de la Convention de l’ONU sur les changements climatiques, en poste depuis 2006, quittera ses fonctions le 1er juillet. Son successeur aura une mission d’importance : redéfinir le rôle de l’Onu dans les négociations sur le climat, souligne Emmanuel Guérin, directeur du programme climat de l’Institut du développement durable et des relations internationales (Iddri).

Terra eco : La démission d’Yvo de Boer, est-ce une bonne ou une mauvaise nouvelle pour les négociations ?

Emmanuel Guérin : "Il arrivait au terme de son mandat en septembre. En somme, il n’a fait qu’accélérer son départ. Mais c’est bien qu’il parte à temps pour permettre à son successeur de gérer le rendez-vous de Mexico, fin novembre. A la limite début juillet, c’est même presqu’un peu tard... Par ailleurs, son départ est peut-être aussi l’occasion d’insuffler un nouveau souffle aux négociations. Bien sûr, Yvo de Boer n’est pas responsable de l’échec de Copenhague. Mais c’est difficile pour lui de porter le renouveau dont on a besoin cette année. A sa conférence de presse du 31 janvier, il n’a pas été particulièrement entraînant. Il ne voulait sans doute pas créer de nouvelles attentes. Mais on a besoin maintenant d’un peu de fraîcheur, de quelqu’un de plus combatif."

Qui voyez-vous lui succéder ?

"C’est difficile de jouer le jeu des pronostics. Jusqu’ici les secrétaires exécutifs ont été d’anciens négociateurs. Yvo de Boer était le négociateur néerlandais et Michael Cutajar [secrétaire exécutif jusqu’en 2002] avait été le négociateur maltais à Rio et Kyoto. Il y a une chose qui pourrait changer. Si les trois derniers secrétaires exécutifs étaient issus de Pays développés, ce serait pas mal de voir maintenant quelqu’un venu d’un pays en voie de développement ou pourquoi pas d’un pays émergent. Récemment, ces pays se sont en effet affirmés comme des acteurs importants avec lesquels il faut compter."

Le secrétaire exécutif aura-t-il toujours un rôle essentiel à jouer ?

"Il y a plein de façon d’occuper le poste. Michael Cutajar avait choisi de faire fonctionner la machine du secrétariat et de rester en retrait. Yvo de Boer, lui, a beaucoup parlé à la presse. Il a aussi beaucoup contribué à ce que la Conférence des Parties [COP] soit élevée au niveau des Grands de ce monde. Il y a différentes façons de peser. Évidemment si vous me demandez de comparer le poids d’Yvo de Boer, à celui d’Obama ou de Hu Jintao, je vous dirais qu’il pèse beaucoup moins. Mais le poids du secrétaire exécutif reste important. Même si après Copenhague, on peut le relativiser. L’accord de Copenhague a affaibli le processus onusien. Est-ce que maintenant les négociations se passeront à l’intérieur ou à l’extérieur de l’Onu, c’est difficile à dire. Peut-être un peu les deux. En tout cas, celui qui arrivera à la tête de ce secrétariat devra prouver que l’ONU peut être efficace pour parvenir à un accord ambitieux."

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