Evolutionnaires

Sommes-nous des ânes parce que nous remplissons nos Caddie chez Carrefour ? Buvons du soda estampillé Coca ? Polluons avec notre automobile ? Non, revendiquent les fondateurs de l’association nantaise "elpueblo..." "Nous sommes nés dans une société de consommation. Il est impossible de changer les comportements du jour au lendemain", pose d’entrée de jeu Julien, l’un de ses cofondateurs. Avant de poursuivre : assumer le statut d’enfants des marques n’est pas non plus une invitation à ne rien faire. "Nous avons tous passé des soirées à refaire le monde autour d’une bouteille de vin rouge. Mais il y a un temps pour la réflexion et un temps pour l’action", enchaîne Loïc. elpueblo... a donc fait de l’action sa religion. L’idée a germé dans l’esprit de quelques amis il y a un an. En quelques semaines, une charte est édictée, un site Internet mis en place pour en relayer les fondamentaux : changer le monde passe, notamment, par une modification de nos modes de consommation.

L’événementiel - ici l’exposition Kilukru - est une des cordes à l’arc de l’association "elpueblo..." - DR

Dé-cul-pa-bi-li-sons !

Les alternatives existent : biologique, équitable, responsable... elpueblo... choisit de les faire connaître par "l’événementiel". Des rendez-vous festifs et artistiques, prétextes à poser les questions sur "le monde comme il va". Et au cours desquels l’association invite des groupes, associations, spécialistes d’un thème, à intervenir. Alimentation, transports, environnement, énergie : tous les actes du quotidien sont passés en revue. Pour montrer l’exemple, un bar propose bières et sodas produits localement, biologiquement ou selon les règles du commerce équitable. L’association envidsage d’élargir son champ d’action. Après les soirées, elle pourrait organiser prochainement des séances d’information dans les écoles.

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Car il s’agit de toucher un public le plus large possible, non initié de préférence. "Nous voulons dépasser le cercle des convertis. Toucher les autres", insiste Mathilde. Pour ce qui est du discours, elpueblo... préfère l’homéopathie aux slogans choc. Exit la révolution, bonjour l’évolution. En douceur, et dans un esprit de dialogue. "Si personne n’explique aux gens qu’ils ont le choix, comment pourraient-ils choisir de changer ? Notre objectif est de dédramatiser l’acte de consommation. D’une part en soulignant que l’on n’est pas coupable de vivre comme on le fait. D’autre part en expliquant qu’il existe des alternatives, que c’est faisable", poursuit Mathilde. "Car, en fait, tout le monde est écolo et humaniste en théorie. Le problème, c’est la pratique, le passage aux actes".

Ouverts, mais sans concession

Mais attention, préviennent ces révolutionnaires "soft" pas question de verser dans le consensus mou. "Nous sommes ouverts, mais sans concession". L’association, qui refuse les subventions, s’est offert un droit de réponse à Coca-Cola, qui avait en début d’année financé une résidence d’artistes internationaux au Lieu Unique de Nantes (voir Terra economica numéro 15, 6 mai 2004). "Le problème n’est pas qu’une entreprise finance des artistes. Ce n’est pas nouveau. Ce qui nous a choqués, c’est qu’une multinationale utilise l’aura nationale d’un lieu public à des fins de marketing". Culottée, l’association a obtenu du directeur des lieux, Jean Blaise, d’y organiser une contre-exposition libre "Kilukru", appuyée par une soirée Beuk Kola Night [1], durant laquelle seront servis bière locale et sodas équitables (le Beuk Kola). Dix-huit artistes y exposent leurs créations plastiques, sonores, vidéos, et sculptures. Est-ce une surprise ? Sans surprise, plusieurs d’entre elles égratignent la marque de soda, symbole de notre société de consommation.

Le site d’elpueblo... : http://elpueblo.free.fr