Terra eco : Les Nations Unies ont publié hier une liste d’engagements de réduction d’émissions pris par 55 pays. Certains chiffres vous ont-ils surpris ?
Pierre Radanne : "Non. La plupart des pays sont restés sur les chiffres qu’ils avaient annoncé auparavant. Et ceux qui avaient avancé des fourchettes les ont gardé. C’est notamment le cas de l’Union européenne. On pouvait espérer qu’elle trancherait en faveur d’un objectif de 30% mais elle a conservé sa fourchette de 20 à 30% par rapport au niveau de 1990. Certes, quelques pays ont un petit peu bougé. C’est notamment le cas du Canada ou de la Russie qui ont un peu resserré leurs chiffres initiaux. Mais en résumé, les choses n’ont pas franchement progressé pour les pays industriels par rapport à la situation d’avant Copenhague. C’est un peu différent pour la seconde liste publiée par les Nations Unies. Celle-là expose les objectifs de vingt pays émergents et en développement qui veulent agir dans le cadre du Namas [Actions nationales appropriées d’atténuation destinées à organiser la réduction des émissions tout en préservant le développement économique, social...]. Mais les propositions sont extrêmement différentes les unes des autres et difficilement comparables. Cette liste est très difficile à analyser. Nous sommes en train d’y travailler."
Avec les engagements de ces 55 pays, ce sont 78% des émissions du monde qui sont revues à la baisse. Cela suffira-t-il pour limiter l’augmentation de température à 2°C ?
"Non. On n’est pas ici sur une trajectoire de 2°C mais plutôt sur 3°C. Et encore... Si les objectifs réalisés suivent les objectifs annoncés. Sachant que pour certains pays, ça risque d’être très difficile. Sur la liste publiée par l’ONU, le Japon s’engage par exemple à une baisse de 25% de ses émissions d’ici à 2020 alors qu’elles ont augmenté de 8% depuis la signature de Kyoto [en 1997]. Est-ce qu’il va réussir ? Le problème ne se mesure pas seulement en terme de volontarisme politique mais de réalisme. Quand on voit la difficulté avec laquelle se mettent en place les politiques d’économie énergétiques, d’énergies renouvelables ou de transports, on peut avoir de sérieux doutes quant à la capacité de certains pays à atteindre leurs objectifs."Comment voyez-vous les prochains mois ?
"Aujourd’hui tout le monde est réellement dans le cirage. Sur un certain nombre de sujets, comme la déforestation ou la mobilisation des moyens financiers pour les pays pauvres, on risque d’avancer rapidement. Mais sur d’autres sujets, il faudra attendre un ou deux mois, histoire de clarifier les choses. La première urgence pour nous, c’est de décrypter, d’analyser les engagements soumis aux Nations Unies. Mais ce n’est pas simple. Notamment puisque beaucoup de pays ont maintenu des fourchettes ouvertes. Une chose est sûre : les négociations ne sont pas terminées."A lire aussi sur terraeco.net :
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