Le jardinage pour écolos paresseux

Le prochain best-seller dans les potagers ? Il est signé Rodolphe Grosléziat et s’intitule Le Potager anti-crise (à paraître). Son auteur est un héros anonyme de 40 ans. Il est marié avec Virginie, prof comme lui, et père de trois enfants âgés de 7 à 10 ans (Loup, Lola et Léo). Sa grande aventure ? Cultiver son jardin en bio dans un coin venteux autour du Tréport, dans la Somme. Rodolphe s’est converti au binage en 2002, tout en construisant sa maison bioclimatique. Et il a pris des notes. A chaque récolte de courges ou de haricots verts, il est allé au supermarché du coin viser le prix des légumes. Bilan sur un an (31 août 2008 au 31 août 2009) : pour à peine plus d’une demi-heure de travail quotidien en moyenne, la famille a économisé 3 554,08 euros. Et s’est régalée de 150 kg de tomates, 12,1 kg de framboises, 4,2 kg de panais entre autres. A écouter Rodolphe, cette autosuffisance est à la portée de tous les paresseux et permet en prime de souder la famille. Le secret du bonheur écolo, en somme. Voici quelques-uns de ses conseils…

1/ Créer un écosystème varié

« Tous les étés, confie Rodolphe, j’ai peur pour mes tomates. C’est une de mes récoltes préférées. Je fais les semis en février, dans la maison. Je les sors en avril. En juin, je taille, je pose les tuteurs. Fin juillet-début août, c’est la récolte. » La première année, elle a été réduite à néant par la maladie, le mildiou en l’occurrence. D’où le traumatisme de Rodolphe. « Depuis, je surveille tous les jours et je coupe la moindre feuille attaquée. Mais surtout, j’ai amélioré l’écosystème du jardin. » Il a planté plus de 300 variétés différentes de fruits et légumes, dont 60 rien que pour ses chouchoutes, les tomates. Il a créé des haies, une prairie sauvage, creusé une mare qui accueille crapauds et libellules et même installé une ruche. L’équilibre vient de la variété : c’est le secret d’un potager zéro pesticide. Abondamment nourri de compost maison, il pète la santé : « L’an dernier, le jardin n’a eu besoin d’aucun médicament, même pas du purin d’ortie ».

2/ Programmer

« On dit que le potager rend son jardinier esclave… C’est faux ! s’insurge Rodolphe. Si l’on programme les récoltes, on peut partir en vacances sans problème. Les carottes mettent 110 jours à pousser, je ne les sème donc pas 110 jours avant le départ, c’est tout. » Parmi ses objectifs : passer encore moins de temps dans son potager tout en cultivant de plus en plus de variétés. Le secret ? Un calendrier efficace des semis.

3/ Ne pas rester seul

« On apprend beaucoup de choses dans les livres mais ça n’est pas suffisant. » Rodolphe était un citadin (d’Amiens) et n’a pas grandi les mains dans la terre. « Je suis allé voir une dame qui tient une ferme à 100 m de chez moi. Elle m’a appris des choses basiques. » Il a ensuite créé avec des habitants du coin une association, baptisée Les vers de terre. Ses 70 adhérents y causent écoconstruction et potager, organisent un écofestival à Caen. Et échangent problèmes existentiels de jardiniers, autant que graines et plants. « Moi je suis bon sur les plants de tomates, j’en fais pour tout le monde. J’ai une copine imbattable sur les choux. » Ils passent ensemble les commandes de graines (chez Biau Germe ou Kokopelli, des spécialistes des graines anciennes et bio), partagent les sachets.

4/ Récupérer

Quel que soit le domaine, Rodolphe pense récup’. Pour créer sa mare, il a déniché une vieille moquette. Même quand il projette de construire une serre, il accumule des vitres et du bois récupéré sur le chantier de son lycée en rénovation. Résultat : sur l’exercice 2008-2009, ses dépenses liées au jardin s’élèvent à 665 euros seulement, dont 239 pour la mare, 176 pour les graines et les plants, 90 pour le poulailler, 65 de matériel, 29 d’essence, etc. Rodolphe et sa famille, des champions de la décroissance ? « On n’est pas des militants, dit-il, mais dans les faits on est en plein dedans. » Ils vivent dans une maison couverte de panneaux solaires, fabriquent leur jus de pomme et leur cidre, n’ont qu’une seule voiture, des vélos, disposeront bientôt de toilettes sèches… Mais sa plus grande satisfaction dans tout ça ? « C’est qu’aucun de mes trois enfants ne rechigne à manger des légumes. » —

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LES BIBLES DES JARDINIERS BIO

Savoir chouchouter ses vers de terre ? Jardiner avec la lune ? Devenir un pro des associations en plantant des œillets d’Inde à côté des tomates (les racines des premiers repoussent les vers blancs friands de plants de tomates) ? Et le tout sans un gramme de chimie ? Pour tout cela, les éditions Terre vivante sont incontournables. Elles publient, depuis trente ans, des livres d’écologie pratique imprimés sur papier recyclé avec encre végétale, évidemment. A leur catalogue jardinage : Coccinelles, primevères, mésanges…, Une bonne terre pour un bon jardin, etc. Il y a aussi une revue (en kiosque depuis 2007), elle s’appelle Les 4 Saisons du jardin bio, et c’est un must pour les amateurs (30 000 abonnés). Et si vous avez un problème d’artichauts gelés ou de framboisiers sans framboises, vous trouverez plein de camarades prêts à vous aider sur les forums du site Internet.

Photo : Franck Boucourt