C’est en lisant James Lovelock (1) que j’ai retrouvé, dans ses lignes, une vieille intuition d’enfance – lire, d’ailleurs, c’est souvent retrouver ce que l’on a pensé ; d’une certaine manière, toujours un peu de réminiscence. Donc, en lisant Lovelock et son « hypothèse Gaïa », j’ai ressenti ce lien inaugural que nous avons avec l’atmosphère. Celle-ci n’est pas simplement un produit biologique, explique-t-il, mais plus probablement une construction biologique, « non pas vivante, mais semblable à la fourrure d’un chat, aux plumes d’un oiseau ou au papier d’un guêpier, une extension d’un système vivant conçu pour réserver un environnement choisi ». L’atmosphère, en totale continuité avec le vivant qu’elle protège, indissociable, comme le halo qui termine la fine enveloppe des corps terrestres. Et l’on pourrait emprunter la formule de Peter Sloterdijk (2) lorsque qu’il définit l’homme comme un « designer d’atmosphère », celui-là même qui est susceptible de faire perdurer l’harmonie ou au contraire de la briser, et d’handicaper gravement tout le vivant, lui-même y compris. Nous avons cessé de croire à l’existence de l’âme collective. Pourtant, les notions d’histoire et de destin ne sont pas si éloignées d’elle que cela, et l’on sait notre peine à avancer, collectivement, en tant que société des individus, sans précisément la ruse du récit collectif. En revanche, renoncer à l’idée d’un corps collectif sera plus problématique encore, dans la mesure où
le climat, métaphore possible de ce corps collectif, contient les conditions mêmes de possibilité d’existence de nos corps individuels. —
(1) Ecologue anglais
(2) Philosophe allemand
Dernier ouvrage paru : Les irremplaçables (Gallimard, 2015)
Cet article est extrait du hors-série « Le climat de vous à moi », disponible en kiosque et sur commande, en suivant ce lien. Bonne lecture !
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