Les produits chimiques envahissent notre quotidien. Il suffit de se souvenir de la campagne lancée par l’ONG WWF : elle a procédé aux prélèvements et aux analyses de sang de 39 députés européens, de 14 ministres européens (dont l’ancien ministre français de l’Ecologie Serge Lepeltier), et de 12 familles européennes, pour mettre en évidence la transmission de substances chimiques d’une génération à la suivante. On trouve ainsi dans nos sang toutes sortes de substances chimiques plus ou moins nocives qui proviennent pour la plupart de notre environnement domestique…
Une grande avancée au niveau européen
Jusqu’à présent, seuls les substances nouvellement créées doivent être déclarées et testées. C’est évidemment beaucoup trop restrictif, puisqu’on considère qu’il existe une centaine de milliers de substances qui échappent à cette procédure. Il était donc grand temps de passer à la vitesse supérieure.Le 1er juin est donc entré en vigueur le règlement européen Reach (acronyme pour enregistrement, évaluation et autorisation des produits chimiques). Souhaité de longues dates par les ONG et par tous les citoyens inquiets à juste titre pour leur santé, cette « loi » doit permettre des avancées majeures suivant un calendrier fixé sur 11 ans :
1er juin 2007 : création d’une agence européenne des produits chimiques
1er juin 2008 : Début de l’enregistrement des nouvelles substances dont l’utilisation dépasse une tonne par an auprès de cette agence
décembre 2010 : toutes les substances importées ou produites pour un total de 1000 tonnes au moins, par an, devront être enregistrées
juin 2018 : fin du délai accordé pour les substances utilisées en faibles quantités
En complément, de ce calendrier, les tests de toxicité devront désormais se porter sur tout le cycle de vie du produit, depuis l’élaboration jusqu’à leur utilisation finale. Cela devrait ainsi permettre de repérer les substances toxiques dans les jouets, les cosmétiques .
Les limites du règlement Reach
On voit donc immédiatement qu’il s’agit là d’une grande avancée dans le cadre de la Santé publique et du développement durable. Néanmoins, faut-il rappeler que les textes européens sont réputés pour leur complexité ? Celui-ci ne déroge pas à la règle puisqu’il fait 900 pages, et que les annexes censées en permettre la compréhension et l’application effective atteignent 10 000 pages (sic !). En outre, elles ne sont pas encore entièrement terminées, ni même traduites dans toutes les langues de l’Union européenne.Si cette réglementation est indéniablement un progrès, elle n’en comporte pas moins de grandes failles comme le fait remarquer Yannick Vicaire, responsable campagne Toxiques de Greenpeace France : « De nombreux produits chimiques toxiques, susceptibles de provoquer des cancers, des malformations congénitales ou des troubles de la reproduction pourront tout de même obtenir une autorisation permettant leur fabrication et leur incorporation dans des articles de consommation courantes. ». Cela est dû au lobbying intense mené par les industries chimiques. En effet, ces nouvelles contraintes ont un coût, que les entreprises veulent minimiser : embauche d’experts en toxicologie, coût d’enregistrement,…
Espérons donc que ce texte permettra de clarifier les moyens d’action, et qu’il ne deviendra pas une coquille vide de la technocratie européenne.
Crédit Photo : Parlement européen
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