Les vaches bio verront passer les trains écolos

Pour les apôtres du développement durable, l’année 2007 marquera un tournant. Il y a encore un an, ceux-là préchaient dans le désert. Face à eux, bien peu des Français étaient capables de définir ce qu’était ce « machin durable ».

Un an plus tard, le documentaire choc de l’ex vice-président des Etats-Unis (Al Gore) a conquis les foules ; des centaines de villes et plusieurs Etats américains – dont la Californie de Schwarzenegger – ont décidé de s’appliquer les objectifs du protocole de Kyoto ; l’Europe a fait du changement climatique une de ses priorités ; il y a quelques jours, enfin, l’empire médiatique News Corp – qui contrôle la célèbre chaîne Fox News – a annoncé vouloir présenter un bilan énergétique « neutre en CO2 » d’ici à 2010.

En France, à revers des pronostics hâtifs, Nicolas Hulot et les ONG ont montré qu’ils pouvaient peser sur la décision politique. A tel point que l’inimaginable se produit : le numéro 2 du gouvernement, Alain Juppé, inaugure un ministère d’Etat de l’Ecologie, du développement et de l’aménagement durables. Ses prérogatives sont articulées autour de deux priorités : la lutte contre le changement climatique – transports, énergie, aménagement du territoire – et la biodiversité.

Changement de civilisation

Les chantiers qui attendent la France apparaissent colossaux. Pour lutter contre le changement climatique, la solution la plus efficace à court terme consiste à puiser massivement dans les réserves d’économies d’énergie, en lançant un programme systématique d’isolation des logements. La politique des transports est à repenser en privilégiant le train et les transports collectifs urbains, au détriment de l’avion et de la voiture.

Il apparaît inévitable de réformer la Politique agricole commune européenne pour permettre à la filière biologique de se développer et pour stopper enfin les subventions à l’exportation, qui empêchent les pays économiquement moins avancés d’organiser leur autosuffisance alimentaire.

Il faudra du courage pour entrer de plain-pied dans la civilisation du développement durable car des pans entiers de l’économie seront mis en danger. Au profit d’autres, plus verts, qui créeront de l’emploi.

Il faudra bien, enfin, poser sereinement la question des migrations internationales. Selon les prévisions, les changements climatiques pourraient contraindre à l’exil 150 millions à 1milliard de personnes d’ici à 2050, des pays du Sud vers le Sud, mais aussi vers le Nord. Dans la mesure où les pays riches sont largement responsables des émissions de gaz à effet de serre à l’origine du réchauffement de la planète, nous ne pourrons décemment rester les bras croisés face à ce phénomène.

La vie en vert ne s’annonce pas nécessairement rose. Mais nous devons y entrer de plain-pied.