Du champ au steak, il n’y aura qu’un pas. Littéralement. Ce rêve des dirigeants du supermarché Super U de Devecey (Doubs) est sur le point de se réaliser. Il y a deux ans, ceux-là ont acheté une friche de cinq hectares à 500 mètres de leur supermarché. Un terrain « sur lequel il n’y a jamais eu un seul pesticide », insiste Rodolphe de Dreux-Brézé, le directeur du magasin. Nettoyé à la main, le champ attend désormais ses nouveaux locataires, des bœufs et des vaches qui seront engraissés sur place pour finir en steaks et rôtis au rayon boucherie du supermarché. L’élevage des bêtes, un agriculteur s’en chargera – l’enseigne est d’ailleurs à la recherche du bon candidat – car « chacun son métier, nous on est des épiciers, en aucun cas des agriculteurs », précise le directeur.
Un point de vue partagé par Philippe Monnet, responsable de la FDSEA (Fédération départementale des syndicats d’exploitants agricoles) du Doubs, très critique sur l’initiative : « Si la démarche, c’est d’acquérir du terrain pour le faire exploiter, ça ne nous va pas. Notre modèle agricole dans le Doubs, c’est que les agricultures sont propriétaires de leurs champs et de leur outil de travail. On ne veut pas un modèle comme en Argentine, où les riches propriétaires feraient travailler des paysans sur leurs champs. On ne veut pas que Carrefour, Leclerc viennent acheter des terres. »
Pour le supermarché, l’objectif est surtout de convaincre le client en poussant au plus fort la traçabilité des produits carnés, puisque les animaux seront visibles par tous avant de finir dans les rayons. Des produits traçables et en circuit court : « On ne peut guère plus court », s’amuse Rodolphe de Dreux-Brézé : les bœufs et vaches « engraissés sur place, seront abattus à Besançon (à 13 km de là, ndlr) et reviendront sous forme de viande au supermarché. En terme de bilan carbone, on sera très bons ! ». Critique là encore, Philippe Monnet dénonce une opération marketing : « Dans ses deux supermarchés, le directeur doit écouler 400, 500 animaux par an. Là, il va en élever combien ? 5 par an dans sa pâture. On a plein d’animaux dans le village. On est la région des vaches montbéliardes. Il y a déjà tout pour consommer sur place. D’ailleurs aujourd’hui le supermarché se fournit auprès de notre coopérative. » Mais le supermarché vise néanmoins une commercialisation de ces produits made in Devecey à Noël 2015. Une viande qui pourra aussi être affinée sur place.
Et demain, de la bière made in local ?
Car ce n’est pas la première fois que le supermarché du Doubs innove au rayon barbaque. Il y a un mois, le magasin a inauguré sa cave de maturation, un espace où la viande, à température et humidité données, s’affine et s’attendrit à souhait. « On travaille sept races de viande françaises et étrangères qui maturent pendant quarante-cinq jours. Au départ, elles ont un aspect visuel pas très beau, puisque la première tranche est noire. Mais à la demande du client, on retire cette tranche et on découvre une viande ultrasavoureuse. Ça marche très fort », souligne Rodolphe de Dreux-Brézé, qui précise que les dégustations ont lieu au magasin un week-end sur deux.
Et les dirigeants de ce petit magasin du Doubs n’ont pas fini de rêver. Puisque la prairie est traversée par un ruisseau, pourquoi ne pas « faire ici une microbrasserie et vendre notre propre bière » ?, s’interroge Olivier Duprez, le pédégé de l’enseigne, dans les colonnes de l’Est Républicain.
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