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WIFU Project

Par WIFU
29-01-2014

De Quito à Bruxelles, sale temps pour les droits de la nature !

De Quito à Bruxelles, sale temps pour les droits de la nature !
(David Torres Costales / @DavoTC)

Droits bafoués et censure citoyenne en marche en Equateur.

A Quito, pour la première fois depuis 16 ans, ses portes sont closes et son équipe contrainte au chômage forcé. Nous sommes le 4 décembre 2013 et la fondation Pachamama (la "terre mère") vient d’être dissoute. Pour quel motif ? Avec la présomption de culpabilité pour étendard, l’Etat équatorien accuse certains de ses collaborateurs -sur ​​la base d’allégations- d’avoir molesté des dignitaires étrangers présents lors du round XI des négociations aux enchères de gisements pétroliers. Pourtant, les membres de Pachamama se sont toujours distingués par une lutte -pacifiste- sur le terrain juridique en faveur des peuples d’Amazonie. Et, les enjeux sont capitaux, car si la plus grande partie de la forêt amazonienne se trouve au Brésil, la majorité des peuples autochtones se trouve elle en Equateur et au Pérou. Parmi les faits d’armes marquants de Pachamama, il y a notamment l’inscription des droits de la nature dans la constitution équatorienne en 2008 - une première mondiale ! Il y a également certaines des plus belles victoires judiciaires des peuples indigènes d’Amazonie, au premier rang desquelles les cas Sarayaku et Chevron-Texaco. Dans ces deux procès historiques, des villageois ont obtenus réparation de préjudices faits à leur terre en condamnant, respectivement l’Etat équatorien et le groupe pétrolier Chevron, à des amandes records (7 milliards d’Euros à la charge du géant américain).

Magnanime, le président Correa n’a pas manqué de saluer ces victoires bien qu’elles compliquent prodigieusement sa tâche. Car les investisseurs étrangers qu’il tente de draguer craignent eux aussi de finir devant les tribunaux, ce qui contribue à ralentir les ventes de concessions d’hydrocarbures. A l’origine, Rafael Correa avait été élu sur l’engagement de “laisser le pétrole brut dans le sous-sol” équatorien. Il avait même imaginé un mécanisme -hélas infructueux- compensant le manque à gagner par une judicieuse levée de fonds auprès de la communauté internationale : le projet Yasuni ITT. Une initiative avant-gardiste que ne cesse de plébisciter Pachamama depuis ses prémices. Pourtant, en Août 2013, le président opte pour un revirement radical de stratégie -censé enrichir le peuple- en regrettant avoir à prendre “une des décisions les plus difficiles de tout [son] gouvernement”. Ce faisant, il ouvre la voie à une privatisation des territoires indigènes ancestraux et des ressources dont ils regorgent. De surcroît, Correa menace de bafouer les droits de la nature sur lesquels repose la constitution de son pays. Car cette mise aux enchères de pans entiers de l’Amazonie implique le sacrifice d’une partie du parc Yasuni, l’un des plus grands réservoirs de biodiversité mondial selon l’UNESCO. Bien entendu, l’irréductible fondation est depuis en première ligne pour dénoncer ce désastre annoncé. Mais, enchaînement hasardeux(? !), moins de quatre mois après, le gouvernement met un coup d’arrêt à son activité en exigeant sa dissolution pure et simple.

Au regard des faits, le bon sens inciterait à conclure à un vulgaire subterfuge visant à censurer définitivement la voix de Pachamama. Quoi qu’il en soit, le temps de la mobilisation est venue pour des ONGs telles qu’Amnesty International et Human Right Watch qui plaident ardemment pour le rétablissement de la fondation et la réouverture de ses bureaux. Si vous souhaitez en faire autant, n’hésitez pas à signer l’appel à soutien en suivant ce lien. Heureusement elle n’est pas seule à lutter, les organisations de défense des peuples indigènes continuent à s’élever contre la confiscation d’une partie de leur territoire. Elles ont d’ailleurs initié une procédure pour convoquer un référendum d’initiative populaire visant à collecter 600 000 signatures (soit 5 % de l’électorat équatorien) afin de trancher la question suivante : Etes-vous d’accord pour que le gouvernement équatorien maintienne indéfiniment sous terre le [pétrole] brut du bloc 43 regroupant Ishpingo, Tambococha et Tiputini (ITT) ?

Pour en savoir plus, visionnez le reportage WiFU sur Pachamama réalisé en novembre 2013 :

Interview WiFU de Nathalie Green, responsable du programme "Droits de la nature" pour Pachamama

Légiférer pour la nature en Europe : un non événement ?

Le 21 janvier 2014 correspond à la clôture des votes -ouverts depuis tout juste un an- pour l’appel "Arrêtons l’Ecocide en Europe, donnons des Droits à la Terre". L’objet de cette consultation citoyenne ? Rien de moins que l’octroi d’une équivalence juridique au génocide pour l’environnement. Cette Initiative Citoyenne Européenne (ICE) initiée par le mouvement endecocide reprend la proposition de loi faite à l’ONU en avril 2010 par l’avocate Polly Higgins. Celle-ci suggérait que le crime d’écocide devait devenir le 5ème crime contre la paix. Un bon moyen d’interpénétrer sur le plan juridique considérations écologiques et humanistes. Hélas, l’adhésion suscitée par ce vote aura été insuffisante pour qu’une directive puisse espérer voir le jour dans le cénacle bruxellois. Car pour que la commission européenne valide son enregistrement et puisse en tirer une directive, une ICE doit générer 1 million de votes. Celle-ci en aura récolté à peine plus de 10%. Faut-il y voir là un désaveu européen pour la cause écologiste ou bien une méfiance à l’égard de la e-démocratie ? Le récent ras de marée virtuel qui s’est abattu contre la pêche en eau profonde permet d’en douter. L’explication est peut-être à chercher ailleurs... du côté de la (non)médiatisation de l’événement.

Bien que ses chances de dépasser le stade de la commission fussent relativement faibles, si cette ICE avait atteint son objectif, le parlement européen aurait eu le choix d’imposer aux Etats membres un arsenal législatif révolutionnaire en matière d’écologie. Et, nouveauté, celui-ci aurait pu permettre de sanctionner des personnes physiques -principalement des donneurs d’ordre (banquiers, conseillers, dirigeants)- impliquées dans des décisions aux conséquences dévastatrices et "étendues" pour les écosystèmes. Car, comme le rappel le site endecocide.eu, "qu’il s’agisse des sables bitumineux d’Athabasca, des déversements de pétrole dans le delta du Niger ou de l’exploitation forestière intensive en Amazonie, ce sont bien les décisions et les choix des dirigeants qui ont été à l’origine de l’Écocide". Pour autant, avez-vous lu beaucoup d’articles sur cette démarche ? Durant l’année écoulée, pouvez-vous citer ne serait-ce qu’un seul "grand" média qui se soit épanché sur le sujet ? OGMs, pesticides, centrales nucléaire : combien d’experts se sont interrogés sur les répercutions économiques d’une telle directive pour ces filières à risque ? Hormis une tribune du journal le Monde concédée au trio formé par S. George, E. Morin et P. Rabhi, très peu de médias traditionnels ont, ne serait-ce que, révélé l’existence de ce vote européen.

En revanche, la détention de Serge le lama -grande cause écologique s’il en est- a fait l’unanimité dans les rédactions françaises. Un consensus qui aura offert à ce "phénomène" une audience à sa (dé)mesure, érigeant au rang de stars les ravisseurs éméchés d’un animal de cirque. Non pas que l’incongruité du sketch ne fasse pas sourire mais, une fois la représentation terminée, n’est-il pas sain que les clowns regagnent leur loge pour que le public reprenne pied dans le monde qui l’entoure ? "News", "buzz" et "Actus" opèrent une prédation dangereuse pour les sujets de fond et la démocratie en général. La conséquence pratique de cette dérive : en quelque semaines 835 mille internautes ont "soutenu" les geôliers du camélidé... soit huit fois plus que n’en ont mobilisé les droits de la nature dans toute l’Europe en un an ! Evidemment, la comparaison est hasardeuse et le tort ne revient pas uniquement aux receleurs d’informations mais bien aussi à ceux qui la consomment. Pour autant, le temps de l’introspection n’est-il pas venu pour ces médias qui auront leur part de responsabilité dans le sens de l’Histoire ?

Pour davantage de précisions sur le mouvement endecocide : https://www.endecocide.eu/

Sylvain Delavergne pour WiFU Project

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A PROPOS

Wifu pour Worldw’Ideas for the FUture, c’est à dire les solutions développées aujourd’hui à travers le monde, pour dessiner la société de demain. A l’origine de WIFU, trois amis passionnés de voyage, d’innovation sociétale et d’entrepreneuriat social, Marc Giraud, Sylvain Delavergne et Rémi Sierakowski, se sont rencontrés sur les bancs de l’école en Master stratégie du développement durable à sup de Co La Rochelle. Marc quitte son emploi de Chef de projet RSE pour monter le projet WIFU en janvier 2012 puis il est rejoint par Sylvain et Rémi.De juillet 2012 à juillet 2013, Rémi, Sylvain et Marc ont traversé 22 pays sur les continents américain, asiatique, africain et européen et rencontré 60 acteurs du changement : entrepreneurs /intrapreneurs sociaux, ONG, collectivités, philosophes qui ont développé des solutions durables. Le webdocumentaire WIFU gratuit et open source réalisé par Marc Giraud en partenariat avec la société FrapaDoc Productions et son spécialiste du webdoc Gaspard d’Ornano est disponible au public depuis le 23 juin 2014. Une version anglaise sera disponible en septembre 2014. Le livre WIFU sera édité par AFNOR Editions début 2015. Complémentaire du webdocumentaire, il analysera sur un ton dynamique et décontracté les solutions durables étudiées sur le terrain. En scannant les QR codes au fil des pages, le lecteur sera directement propulsé dans le webdoc interactif.

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