Vise le green |
Par Benjamin Cliquet |
24-10-2010
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Le paradoxe finlandais |
D’abord, ne vous étonnez pas si je suis un peu lèche-bottes envers les Finlandais : je suis lu (observé, épié !) par les personnes qui m’hébergent chez eux, ici, à Helsinki. Joël, Tarja et leurs trois enfants m’ont, plus sérieusement, extrêmement bien accueilli (et je ne parle pas de Caramel, le chien, pour qui je fais déjà partie de la famille…). Merci à eux. L’adaptation au mode de vie se fait en douceur et j’ai quand-même quelques repères : la passion du foot, la pluie (celle de l’ouest, que j’ai importée de Nantes et de Caen…) et la bière (je n’ai pas encore touché à la vodka, qui a beaucoup de succès ici). Mais tout ne ressemble pas à la France :
Le rythme des repas est bien différent puisqu’ils mangent plus tôt mais peu le midi (parfois dès 10h30 pour les écoliers), puis remangent une à deux fois avant le dîner ;
Dans ce pays d’à peine plus de 5 millions d’habitants, la religion est bien plus présente. Je ne rentrerai pas dans les détails car je n’ai pas étudié le sujet, mais je me permets d’évoquer un évènement qui dérange beaucoup : à plusieurs reprises et à la télévision (et encore ce matin à la radio), des pasteurs et évêques finlandais ont tenu des propos homophobes. Conséquences, plusieurs dizaines de milliers de croyants ont déjà quitté l’Eglise protestante. Dommage, car ces personnes médiatisées ne représentent que la partie extrémiste de l’Eglise ;
Le climat froid de la Finlande empêche de cultiver certains fruits et légumes. Seuls les fruits ou légumes poussant sous terre peuvent pousser en période hivernal. La solution pour faire pousser des tomates ou de la salade au mois d’octobre est donc les serres, solution qui coûte cher à l’environnement. Alors si l’on veut consommer local (donc « responsable »), il ne faut pas manger de tomate en hiver (vous connaissez la chanson…) ;
Par ailleurs, on trouve beaucoup plus de labels Commerce Equitable. Ainsi, les bananes ne viennent pas de Martinique mais sont très souvent labellisées Fairtrade. Les labels « bio » sont également plus présents ;
Enfin, la nature est omniprésente. Je loge à moins de 10km du centre-ville et je vois la forêt depuis ma fenêtre. L’urbanisation s’est faite ici dans le respect total de la nature, ce qui permet à la ville de rester un site exceptionnel.
Après ces généralités, je tenais à parler d’un phénomène particulier vis-à-vis de l’environnement : si la Finlande est un des pays avant-gardistes en matière de lutte contre le réchauffement climatique, les habitants ont des habitudes peu économes en énergie. En effet, la Finlande n’est pas les Iles Tuvalu, le dérèglement climatique n’est que peu visible, les hivers restent très froids et, comme je l’ai dit plus haut, la nature est préservée en excellente santé. Dès lors, il n’est pas simple de convaincre les Finlandais de changer leurs habitudes pour lutter contre un phénomène invisible (ou presque). C’est donc notamment parce que le pays gère bien la crise environnementale que les gens ont des pratiques souvent peu économes en énergie. Paradoxe. De quelles pratiques parle-je ? Des maisons chauffées à 22°, 23° et parfois plus. Une utilisation de l’eau (notamment de l’eau chaude, en abondance grâce à l’excellent réseau de chaleur) comme si le monde n’en manquait pas. Ou encore, des trottoirs d’une grande rue commerçante chauffés (tuyaux d’eau chaude enterrés) pour éviter que ça ne gèle et importune les piétons venus faire leurs courses.
Pour autant, ne croyez pas trop vite que les Finlandais sont des cancres (en ne parlant, bien sûr, que des habitudes de consommation, du confort auquel ils sont habitués…). En effet, je m’apprêtais à vous raconter avec une très grande fierté que je vais en ce moment au travail en vélo, malgré la pluie continue de jeudi et les 2° de vendredi. Mais ici, aller au travail en vélo n’est pas récompensé de la Légion d’Honneur du Développement Durable, c’est extrêmement fréquent, même en hiver. Sur les 9.3km qui me séparent du centre où je travaille, au moins 8.5km se font sur piste cyclable. Et on voit que c’est une habitude ancienne car les pistes cyclables font souvent partie des très larges trottoirs, les rues et les villes en général se sont construites en prenant en compte ce moyen de transport. En outre, si l’on a trop froid pour le vélo, ce sera le train que l’on empruntera (et très peu la voiture), dont le réseau n’est pas sans cesse perturbé par des grèves ou des problèmes techniques.
Je ne peux pas conclure ce premier post sur Helsinki sans parler du sauna. Une petite pièce chauffée à environ 80° et de l’eau régulièrement jetée sur les pierres qui créé une énorme vague de chaleur (sous forme de vapeur). Un sauna dans chaque maison, des saunas publics (notamment à la piscine), des saunas au bord des rivières (l’hiver, un trou est fait dans la glace et ils vont se rafraîchir dans l’eau plutôt que sous la douche !)… Et, en tant que Normand, je me sens davantage prêt à survivre aux vagues de froid qu’à la pratique intensive du sauna.
Pour la suite des réjouissances, je vous donne rendez-vous le week-end prochain pour un compte-rendu de mes deux semaines de bénévolat au centre de recyclage de Vantaa (banlieue d’Helsinki). Mon enquête va s’orienter, en plus de la gestion des déchets, vers la compréhension du réseau de chaleur et des énergies utilisées. Je visiterai jeudi 28 une partie des installations du réseau de chaleur qui, d’après mes lectures, est un des plus efficaces au monde. Comprenez mon impatience…
A bientôt, Visez l’green, Ben
PS : le logo de l’article est une photo de la magnifique cathédrale protestante d’Helsinki, dans laquelle j’ai eu l’honneur de suivre une messe ce matin
Piste cyclable devant la maison et le long de la voie ferrée
Vue d’un petit pont sur lequel je passe en vélo, à 5 minutes de la maison
Depuis un observatoire un oiseaux, étendue située à moins de 10km du centre ville qui abritait il y a peu encore des troupeaux de moutons et de vaches
Chemin pour atteindre l’observatoire
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