Verra-t-on un jour la mention « nuit gravement à la santé » barrer l’étiquette d’un pot de Nutella ou orner un paquet de chips ? A priori, ce n’est pas demain la veille. Tandis que les tours de taille gagnent dangereusement des centimètres sur le Vieux continent, l’affaire a longtemps fait débat au Parlement européen. Le 16 juin, les députés ont tranché : les aliments devront désormais préciser clairement la valeur énergétique mais aussi la teneur en glucides, lipides, acides gras saturés et sel des aliments. Et ce, en pourcentage sur 100 grammes ou 100 ml. A l’avenir – si la loi passe en deuxième lecture – vous devriez donc savoir à quoi vous en tenir. Sauf que voilà. Opter pour un paquet de céréales Trésor à 444 kcals pour 100 grammes plutôt que pour son cousin Chocapic à 380 kcals risque-t-il vraiment d’alourdir votre silhouette ? Pis, de mettre en danger votre santé ? Difficile à savoir sans plonger dans un bouquin de nutrition.
Aussi, les associations de consommateurs militent-elles depuis longtemps pour un système d’alerte aux sirènes plus ou moins hurlantes. « Au départ, les Britanniques voulaient quelque chose de très radical, se souvient Charles Pernin, chargé de mission nutrition à l’association de consommateurs CLCV. Ils voulaient mettre une grosse pastille rouge sur les produits les plus nocifs avec une mention "à ne manger que très rarement" ». Une mesure pareille et notre pot de Nutella aurait fini relégué au rayon des flasques de bourbon et des bouteilles de vodka. « C’est une proposition contre-productive qui ne nous rendrait pas crédible auprès des pouvoirs publics. Il faut trouver une position plus défendable », concède néanmoins Charles Pernin.
Cette position raisonnable, les associations pensaient l’avoir trouvée avec le « feu rouge ». Dans ce scénario, les teneurs en sel, en graisse ou en sucre sont non seulement mentionnées mais colorées de vert, d’orange ou de rouge. Verte, pour une quantité raisonnable au regard de la ration recommandée. Rouge, si elle menace de faire exploser le quota en sel – par exemple – d’un humain pour la journée. En Grande-Bretagne, le logo présenté sous forme de camembert est déjà largement répandu. « Parce qu’il a été soutenu par la FSA (l’équivalent britannique de l’Agence française de sécurité sanitaire des aliments, ndlr) et suivi par de grands distributeurs. » Comme Sainsbury’s ou Tesco. Mais les députés européens n’en ont pas voulu. « Ce système a été créé en Angleterre pour les produits cuisinés et il ne fonctionne pas pour les aliments de base, affirmait le 22 juin, la députée Renate Sommer sur le site duParlement européen Le Coca light obtiendrait ainsi un feu vert car il est élaboré avec des édulcorants à la place du sucre, alors que le jus de fruit sans sucres ajoutés obtiendrait un feu rouge du fait de ses sucres naturels. »
Des principes qui n’ont pas empêché Intermarché de se prêter – prudemment – à l’exercice. En 2006, le distributeur a en effet adopté son code couleur « Nutri-pass ». Un code couleur cantonné à l’arrière des produits, et qui bannit le rouge, regrettent néanmoins les associations. Si l’intention est louable, le principe ne pourra pas fonctionner sans généralisation à tous les distributeurs, ni règles strictes. Si c’était le cas, « c’est un outil qui pourrait permettre de faire pression sur les industriels. Ils seront ainsi obligés d’être transparents, de regarder ce que font les autres et d’améliorer leurs pratiques », rêve Charles Pernin.
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