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16-04-2015
Mots clés
Education
France
Reportage

Ils ont 10 ans et vont bientôt vous expliquer le climat !

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Ils ont 10 ans et vont bientôt vous expliquer le climat !
(Crédit photos : Amélie Mougey)
 
Forêts, disparition des espèces, changement climatique… Comment faire comprendre les enjeux environnementaux à des élèves de primaire ? A Paris, une institutrice, épaulée par une poignée d'apprentis ingénieurs, relève le défi.
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ÉCOLOGIE SOCIÉTÉ ÉCONOMIE
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« Savez-vous combien d’espèces d’arbres disparaissent chaque année ? » « Un milliard ! » « Cent mille ! » Dans la salle des CM1 et CM2 de l’école élémentaire Lesseps, dans le XXe arrondissement de Paris, « c’est un peu le juste prix ! », s’amuse Gaëtan, devant un parterre de bras levés. Du haut de ses 22 ans, le jeune homme, visage poupin sous ses cheveux longs, endosse l’habit de l’enseignant pour quelques heures seulement. Le reste de la semaine, il étudie à Polytech Paris-UPMC pour devenir ingénieur. Comme chaque jeudi après-midi, lui et trois acolytes de troisième année gravissent les marches du large escalier en bois qui mène à la salle de classe de Mme Herrero. Depuis la mi-novembre, chaque semaine, pendant une heure et demie, ils affrontent l’inépuisable curiosité de 27 élèves de dix ans leurs cadets.

« On est plus proches de leurs grands frères que de leurs parents, le courant passe bien », commente Marie-Pierre, étudiante à la tête de l’association Vert la science qui rassemble une vingtaine d’étudiants intervenant dans les écoles et les collèges pour vulgariser les connaissances scientifiques. En cette année de COP21, la conférence internationale sur le climat qui aura lieu à Paris en décembre prochain, leurs interventions font la part belle au développement durable et au climat. « On vient en complément de l’enseignement habituel. Les primaires ont tellement de maths et de français que les sciences passent un peu à la trappe », déplore Gaëtan. Quant à l’environnement, il a beau être au programme depuis dix ans, son approche reste disséminée entre les matières.

« La météo, c’est pas le climat »

« Cinq cents ! », « Dix mille ! »… Dans la salle de classe, d’où s’échappe un joyeux brouhaha, la loterie se poursuit. « Il faut faire plus imagé, conseille l’enseignante, en retrait au fond de la salle de classe. On a vu les grands nombres, mais là, ça ne leur parle pas. » Sur l’estrade, les étudiants acquiescent. « Une centaine d’espèces disparaît, mais si on regarde en superficie, c’est comme si tous les quatre ans le monde perdait une France entière de forêt », reprend Gaëtan. Lentement, l’attention revient. Profitant de l’accalmie, Céline embraye. « Et saviez-vous que la moitié des animaux sauvages ont déjà disparu ? », ajoute la jeune fille, lunettes fines sous sa frange brune. « C’est pas juste », lâche une voix fluette près de la fenêtre. « Les mammifères sont les plus menacés », précise l’étudiante. « Mais, nous, on est des mammifères ? », s’inquiète-t-on au premier rang. « Oui, mais on n’est pas vraiment en voie de disparition », reprend Gaëtan.

Dans la salle, les regards restent inquiets. « Il y en a qui sont vraiment préoccupés, même angoissés quand on aborde les questions d’environnement » observe Thomas, l’un des intervenants. Le changement climatique, surtout, trouble les esprits. « La météo, c’est ce qui nous dit s’il fait beau et comment s’habiller le matin », lance Amine sans reprendre son souffle, de peur de se faire voler la parole. « Oui, mais la météo, c’est pas le climat », précise Carmen, la bonne élève au bras droit constamment dans les airs. Abstrait, le sujet est le casse-tête des pédagogues. Pour l’aborder, les futurs ingénieurs misent sur les expériences : l’allumette qui forme un nuage dans une bouteille d’eau pour comprendre les émissions de CO2, le glaçon qui glisse dans un verre à moitié plein pour réaliser la hausse du niveau des mers

« Ensuite, c’est à nous d’apprendre aux autres, à nos parents »

Sur le bureau de l’institutrice trône un modèle réduit d’éolienne fabriqué par les étudiants. Patiente, Céline explique comment la rotation des pales produit de l’énergie. « C’est délicat de vulgariser. On est toujours en train de se demander : “est-ce qu’on les sous-estime ou est-ce qu’à l’inverse on n’utilise pas des mots trop compliqués ?” », s’inquiète la jeune fille.

A la fin de l’interrogation orale, les rôles s’inversent. Les étudiants ouvrent la « boîte à questions COP21 », alimentée par les enfants. Devant la boîte à chaussures, les étudiants sont soudain un peu fébriles. « Comment marche un barrage ? » « A quoi sert une éolienne quand il n’y a pas vent ? » « Qu’est qu’il y avait avant la Terre ? » La colle. Classique. « Pour eux, on est “les scientifiques”. Ils s’attendent donc à ce qu’on sache tout, qu’on ait réponse à tout, sinon il se sentent floués », soupire Camille, également membre de l’association. Au dernier rang, Merlin n’a pas de récriminations. « Les jeudis après-midi, c’est amusant, on apprend plein de choses, commente le blondinet aux allures de surfeur. Et ensuite, c’est à nous de les apprendre aux autres, à nos parents. »

De haut de leurs 10 ans, les futurs collégiens sont déjà incollables sur la formule chimique du méthane ou les dégâts de l’huile de palme. « On ne réalise pas le puits de connaissance que représente un enfant », commente l’institutrice, quotidiennement bluffée par la mémoire de son auditoire. « Les primaires sont plus réactifs que les collégiens. C’est à cet âge-là que ça se joue », estime Gaëtan, partageant comme ses camarades de promo l’admiration de l’enseignante. « Lorsqu’on a abordé la question du recyclage, c’est à peine s’ils ne nous ressortaient pas notre premier cours de chimie des matériaux », sourit Camille. La jeune fille ne s’étonne qu’à moitié. « Ici, il y a des boîtes pour les piles usagées, les enfants écrivent au verso des photocopies… On voit tout de suite que l’environnement est un sujet. »

« La meilleur sensibilisation, c’est l’action »

Dans la classe de Florence Herrero, les enfants sont à bonne école pour parler d’environnement. Affichée sur la porte, la fable du colibri chère à Pierre Rabhi, raconte que, si chacun fait sa part, les petits gestes ont de grands effets. Le seuil franchi, les murs sont tapissés d’abeilles sur papier glacé et de posters faisant l’éloge de la biodiversité. Depuis la fin de l’automne, la classe est investie dans deux projets en lien avec l’environnement : le concours de scénario de court métrage Script-en-Seine (l’appel à candidature en pdf est ici, lancé par l’ONG Wild Touch, et celui, régional, des ambassadeurs de la COP21. « La meilleure méthode pour sensibiliser les enfants, c’est de les engager dans l’action à travers des concours, des expos, la préparation de la Fête de la nature…, souligne l’institutrice. Pour que ça fonctionne, il faut un but, un projet concret qui va servir de point de départ à la réflexion et donner du sens à leurs recherches. »

Seconde tactique adoptée par l’enseignante : partir du vécu, du quotidien. « Pendant les pics de pollution, les enfants constatent qu’ils respirent mal. On en parle, ensuite, on élargit la réflexion », explique l’institutrice, fervente admiratrice de la démarche de l’expert en énergies Pierre Radanne.

Mais pour ressentir l’envie de protéger la nature, encore faut-il y être confronté. Pour donner aux jeunes citadins l’occasion de plonger les mains dans la terre, l’école élémentaire de Lesseps, épaulée par l’association Veni Verdi, a créé son jardin. Un déploiement d’énergie qui repose sur la bonne volonté de quelques enseignants. « C’est sûr que si l’on ne fait rien, il ne se passe rien », sourit Florence Herrero. « Certains collègues qui ont l’impression qu’on en demande toujours plus aux enseignants et deviennent allergique aux projets. Dans un sens, je les comprends, mais c’est surtout une question d’envie. Il existe des choses toutes simples à mettre en place. » Dans l’école, tous les rebuts de photocopie sont utilisés par les enfants. « Ils ont pris l’habitude de retourner la feuille pour voir s’il ne sont pas tombés sur un courrier du directeur ! » Ainsi, via la pratique, le partage des ressources devient un sujet de discussion. « En éduquant au développement durable, on ne travaille pas seulement sur l’environnement, souligne l’enseignante. C’est presque de la psychologie de groupe : on apprend le vivre-ensemble. »

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