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Les OGM sont plantés (suite)

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La fronde des agriculteurs canadiens

...Franchissons maintenant l’Atlantique, direction le continent américain, qui concentre 94% des cultures OGM de la planète (voir encadré). Celles-ci y coulaient des jours heureux. Mais tout récemment, les affaires se sont compliquées. Au Canada tout d’abord, Monsanto avait présenté en décembre 2002 une demande d’homologation de son blé transgénique, résistant à l’herbicide RoundUp (également produit par Monsanto). C’était sans compter sur la puissante Commission canadienne du blé (CWB), opposée à l’introduction de cette plante. La CWB craignait de voir se fermer les portes des marchés d’exportation européen et japonais, si réticents aux OGM. A coup de pages de publicité dans la presse agricole, la CWB a rejoint le combat des écologistes et agriculteurs bio... Et contraint Monsanto à suspendre son projet avant même d’en obtenir l’homologation. "Pour la première fois, une compagnie agrochimique et semencière se trouve en opposition avec ses clients agriculteurs, qui la soutenaient jusqu’ici", observe Arnaud Apoteker, chargé de campagne OGM pour Greenpeace France.

L’Argentine conquise

Complications également plus au Sud, en Argentine, où poussent 20% des PGM de la planète. Là-bas, le maïs, le coton et, surtout, le soja font fureur. Le gain économique pour les grands agriculteurs est manifeste, eux qui exportent massivement ce soja, y compris vers l’Europe. La production a triplé entre 1997 et 2002, et occupe désormais la moitié des surfaces cultivées. Mais à quel prix ? Selon un chercheur de l’université de Buenos Aires, cité dans un papier du New scientist [1], les cultures intensives de ce soja nécessitent un recours croissant aux herbicides : selon des estimations, les ventes de glyphosate ont décuplé entre 1997 et 2003. Avec des conséquences inquiétantes pour les sols et pour la santé des habitants vivant dans le voisinage des cultures. Au point qu’une partie de la population commence à dénoncer la "sojaïsation" de l’économie. Le problème, ce ne sont pas les OGM, mais l’utilisation qui en est faite par les agriculteurs, rétorquent les semenciers.

Aux Etats-Unis, les premiers doutes

Enfin, aux Etats-Unis, patrie des cultures OGM, quelques micro-fissures lézardent l’édifice. Des études, dont celles de Charles Benbrook, ex-secrétaire de l’Académie des Sciences, ont été menées pour évaluer l’impact de ces cultures. Aussitôt contredites par celles des semenciers, elles minimisent l’apport économique des OGM et montrent que le débat scientifique n’est pas clos. Fait nouveau, une partie de la population s’interroge elle aussi. Pourquoi diable ces Européens refusent-ils les OGM, alors que les plaines américaines en foisonnent et qu’on les trouve en tête de gondole des supermarchés, sans le moindre étiquetage ?

Thomas Hoban, un chercheur spécialisé en sociologie et en sciences de l’alimentation, a mené une étude sur l’évolution récente de l’opinion américaine [2]. Trois informations ressortent de ses travaux. D’abord, le fait que deux-tiers des Américains ne savent pas qu’ils mangent des aliments issus de l’agriculture transgénique... Ensuite, le soutien du public aux PGM s’érode avec le temps. Enfin, les Américains s’inquiètent de l’introduction dans la chaîne alimentaire d’animaux génétiquement modifiés comme le saumon. "Les Etats-Unis ont-ils attrapé la maladie européenne ?", interrogeait il y a quelques jours Cynthia Schneider, l’ancienne ambassadrice des Etats-Unis aux Pays-Bas, en ouverture de Bio 2004, la grand-messe internationale des biotechnologies. En Californie, deux comtés viennent ainsi d’interdire les cultures génétiquement modifiées, pour préserver leur agriculture biologique. Et une dizaine d’Etats américains ont proposé en 2003 des lois allant de l’étiquetage à un moratoire sur les OGM.

"Semi-produits"

En conclusion, pour les semenciers, ce n’est peut-être pas la déroute, mais la victoire annoncée n’est pas au rendez-vous, parce que les promesses n’y sont pas. Pas pour le consommateur, on l’a compris. Mais surtout, pas forcément pour les agriculteurs. Bernard Le Buanec, secrétaire général de l’International Seed Federation reconnaît lui-même "qu’à part sur le coton, pour lequel les gains sont évidents, les études sur les rendements des OGM sont contradictoires. En fait, cela dépend des cas." Et aujourd’hui, les représentants de Syngenta, Limagrain, Monsanto et Bayer Cropscience, que nous avons interrogés, rétrogradent les OGM au rang "d’outils parmi d’autres." Envolée, la "révolution." "Le développement de leurs graines a coûté très cher. Ces entreprises ont dû emprunter beaucoup d’argent sur les marchés financiers, qui leur ont demandé un retour sur investissement. C’est pour cela qu’elles ont mis sur le marché des ‘semi-produits’, qui n’ont pas tenu leurs promesses", résume Thierry Hommel, économiste à l’Institut du développement durable et des relations internationales (IDDRI).

Bientôt, la revanche des OGM ?

Quant à l’argument de l’éradication de la faim dans le monde... "Ces entreprises ont en partie bâti leur image sur cette belle idée. Mais on se rend compte qu’elles concentrent leur recherches sur les produits destinés aux marchés solvables, comme le maïs ou le soja. En réalité, elles n’ont rien à proposer à l’Afrique", poursuit Thierry Hommel.
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S’ils ont perdu une bataille, les semenciers n’entendent pas renoncer. "Quelle que soit l’opposition qu’elles rencontrent, ces sociétés ne peuvent revenir en arrière. Elles ont investi des années de bénéfices dans les plantes transgéniques. Soit elles gagnent, soit elles coulent, estime Gilles-Eric Séralini. Leur stratégie commerciale consiste à étoffer leur catalogue en graines transgéniques, au détriment des graines conventionnelles. Ainsi, petit à petit, même en Europe, elles parviendront peut-être à imposer leurs produits."

Un traité contre un autre

Pour ce faire, elles bénéficient du soutien sans faille de l’administration américaine. Avec l’Argentine et le Canada, l’oncle Sam a déposé une plainte à l’Organisation mondiale du commerce (OMC) contre l’Europe, pour le moratoire appliqué ces dernières années. Mais elle trouveront sur leur chemin des populations et des gouvernements aux aguets. Aujourd’hui, une soixantaine de pays pratiquent l’étiquetage. Et le Protocole sur la biosécurité de Carthagène compte une centaine de pays signataires. Entré en vigueur en septembre 2003, il a valeur de traité international... Autant que les accords de l’OMC, dont se réclament les croisés des OGM.

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[1] Argentina’s Bitter Harvest (En Argentine, une récolte au goût amer), New Scientist, 17 avril 2004

[2] Public Perceptions of Biotechnology, Dr Thomas J. Hoban, juin 2003

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