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20-10-2010
Mots clés
Développement Durable
France
Interview

Sarkozy a-t-il rompu avec l’écologie ? L’avis des experts

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Sarkozy a-t-il rompu avec l'écologie ? L'avis des experts
(Crédit photo : Philippe Wojazer - Reuters)
 
Trois ans après le Grenelle, que pensent les spécialistes de la thématique environnementale de l’engagement sur la question du Président ?
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ÉCOLOGIE SOCIÉTÉ ÉCONOMIE
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JEAN-MARIE PELT

ARNAUD GOSSEMENT

ÉLOI LAURENT

JOHN LICHFIELD


«  Des marches arrière préjudiciables  »

Jean-Marie Pelt botaniste-écologiste, fondateur de l’Institut européen d’écologie et membre d’une Commission au Grenelle

« Après la succession inédite d’incidents climatiques cet été – au Pakistan, en Chine, en Russie, au Mexique… –, je suis surpris que la problématique environnementale ne soit pas davantage prise au sérieuse par les dirigeants. Les crises économique et écologique que nous venons de traverser doivent avoir servi à quelque chose. Or on constate un retrait général de l’Etat et des médias de la thématique environnementale. Après la médiatisation extrême de Copenhague, le soufflé est retombé. Le Grenelle de l’environnement connaît des marches arrière préjudiciables. Le rabotage récent des niches fiscales sur les énergies renouvelables est un nouveau coup dur. On peut raboter ailleurs, notamment sur le bouclier fiscal, non ? C’est une fâcheuse erreur. Dans ce Grenelle, Jean-Louis Borloo et Chantal Jouanno ont pourtant mouillé leurs chemises, mais ce ne sont pas eux qui décident. Nous devons donc être plus mobilisés que jamais. » —

«  Une première étape majeure  »

Arnaud Gossement avocat en droit de l’environnement, ex porte-parole de France Nature Environnement

« Le Grenelle de l’environnement a été un évènement majeur dans l’histoire de l’écologie en France. La première étape d’un dialogue environnemental entre tous les acteurs concernés qui a permis, non pas l’avènement d’un monde idéal, mais de réelles avancées, forcément trop lentes, forcément insuffisantes, pour celles et ceux qui ont conscience de l’urgence de sortir d’une économie ivre de pétrole.

Un exemple ? Le Grenelle a permis le décollage de l’éolien et du solaire. Des objectifs ambitieux ont été fixés : 25 000 MW pour l’éolien, 5 400 MW pour le solaire. Un décollage de ces filières a eu lieu depuis 2007 :+91% de production d’énergie du vent, +600% pour le solaire photovoltaïque.

Certes, l’avion des renouvelables connaît désormais un trou d’air. Le vieux modèle énergétique nucléaire fait de la résistance et le droit est devenu fou : 13 textes auront été écrits en 2010 pour définir les tarifs d’achat d’électricité solaire, pendant que les éoliennes plient sous les contraintes administratives ! Certes, la vague du Grenelle affronte aujourd’hui le mur des conservatismes de droite comme de gauche.

Mais je suis certain qu’elle ne se brisera pas sur l’écolo-scepticisme ambiant : trop de jeunes ont envie de donner un sens vert à leurs études et à leur métier pour que la dynamique du Grenelle meure. Au final, ce Grenelle n’aura pas été une baguette magique mais une ligne de départ d’une course qui hésite entre le sprint et l’endurance. Pour avancer encore, il faut refuser d’être des spectateurs bougons pour être des citoyens engagés, enthousiastes, motivés, qui saisissent toutes les opportunités pour ne pas léguer une poubelle à nos enfants. Le Grenelle en est une. » —

«  Un bilan substantiel et sulfureux  »

Eloi Laurent économiste à l’Observatoire français des conjonctures économiques (OFCE)

« Le bilan écologique de la présidence Sarkozy offre un visage paradoxal : c’est un des plus substantiels de la Ve République, mais c’est également le plus sulfureux. Il s’en dégage à la fois un irrésistible souffle d’énergie et un troublant parfum de manœuvre politique. Le bilan, assurément, n’est pas mince : les « Grenelle de l’environnement » comptent autant pour leur méthode que pour leurs résultats. Mais on est tenté d’attribuer cette indéniable réussite, hélas largement balafrée par la majorité parlementaire, à Nathalie Kosciusko-Morizet qui en conçut l’idée, à Jean-Louis Borloo qui en mena les négociations et à Chantal Jouanno qui en assure le suivi.

A cet égard, l’acquis le plus solide de la période est probablement l’assemblage du ministère de l’Ecologie, de l’Energie, du Développement durable et de la Mer, institution transversale, cohérente et robuste sur laquelle les gouvernements futurs devront s’appuyer, quelle que soit leur couleur politique. L’engagement personnel de Nicolas Sarkozy semble s’être limité au projet de taxe carbone, qui est justement l’échec écologique le plus cuisant de son mandat (c’est plus généralement le cas de la fiscalité environnementale, que la France ne parvient décidément pas à réformer intelligemment depuis près d’un demi-siècle).

Le seul véritable succès dont Nicolas Sarkozy puisse à bon droit s’attribuer la paternité est la signature du paquet climat-énergie au terme de la présidence française de l’Union européenne, en décembre 2008. Mais il faut rappeler que ce texte, qui souffre par ailleurs de graves défauts, avait été élaboré en amont par la Commission européenne et la présidence allemande dès le premier semestre 2007. Et que les concessions accordées in extremis notamment à l’Italie et à la Pologne par un « président papillon », maladivement calé sur le cycle médiatique, sont autant de boulets que l’Union européenne traînera longtemps dans sa lutte contre le changement climatique. Il y a enfin les précieux travaux de la Commission Stiglitz-Sen-Fitoussi, déjà devenus une référence mondiale, mais le mérite principal en revient à Jean-Paul Fitoussi.

Le malaise écologique de la Présidence Sarkozy tient en fait à une question simple : Nicolas Sarkozy ne croirait-il en l’écologie que dans la mesure où elle divise la gauche ? Le calcul de 2007 paraît transparent : prenant appui sur l’amertume de nombreuses associations après l’impasse du gouvernement Jospin sur l’écologie et le traitement indigne infligé à Dominique Voynet au sein de la « gauche plurielle », Nicolas Sarkozy leur propose le partenariat du « Grenelle » dans la foulée du succès du « Pacte écologique » de Nicolas Hulot. Ce faisant, il espère marginaliser les Verts et contrarier pour longtemps l’union de la gauche.

Faute de croire en l’écologie politique, Nicolas Sarkozy s’est ainsi lancé dans l’écologie politicienne. Qu’il est en train, de dépit, de jeter aux orties. Car son piège s’est refermé sur lui : Europe Ecologie est devenue le troisième parti de France et l’ambition social-écologique est aujourd’hui largement partagée à gauche, au point de pouvoir constituer le socle d’un futur programme commun. En somme, et c’est sans doute l’enseignement le plus profitable de ce bilan, l’écologie politicienne façon Sarkozy souffre d’un défaut majeur : elle n’est pas durable. » —

«  Le Grenelle est inconnu en Grande-Bretagne  »

John Lichfield correspondant en France du quotidien britannique The Independent

« Le Grenelle, on ne peut pas dire que les Britanniques soient vraiment au courant. Je peux vous donner un exemple assez parlant : récemment, Caroline Lucas, la première et la seule députée verte du parlement britannique, était interrogée sur le Grenelle. Et elle a avoué qu’elle n’en avait jamais entendu parler. Ce n’est pas pour la critiquer. Je pense qu’à part quelques hommes ou femmes plus expérimentés, personne en Grande-Bretagne ne sait grand chose des questions environnementales en France. C’est assez déprimant, mais c’est ainsi. Même si l’environnement est une question internationale et que le CO2 ne s’arrête pas aux frontières, tout le monde reste concentré sur les objectifs environnementaux nationaux.

Quand les Britanniques pensent à Sarkozy, ce n’est pas l’image environnementale qui leur vient en premier. En ce moment, ils pensent plutôt à son attitude vis-à-vis des Roms. Et en général, ils s’intéressent davantage à sa liaison avec Carla Bruni. J’ai écrit des articles pour mon journal à propos du Grenelle, mais ils n’ont pas vraiment été mis en avant.

Est-ce que la France est en avance sur les questions environnementales par rapport à la Grande-Bretagne ? Dans les grandes questions notamment sur les objectifs de réduction de gaz à effet de serre, les deux pays ont des positions sans doute assez proche. Même si la réduction est plus facile pour la France qui dispose d’une grande puissance nucléaire. Sur d’autres points, notamment les énergies renouvelables, la Grande Bretagne est plus en avance. Et sur d’autres, comme le système ferroviaire, la France est clairement devant. » —

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