« Le nucléaire est une filière d’avenir. » Avec sa sortie pro-nucléaire dimanche soir sur BFMTV, Arnaud Montebourg, ministre du Redressement productif, a déclenché la première grande polémique de la rentrée au sein de la majorité. Et pour cause, cette prise de position très tranchée peut même faire figure de provocation à deux semaines de la très attendue conférence environnementale.
« Chacun sait bien qu’on en sortira »
Arnaud Montebourg n’a pourtant pas toujours été si catégorique. Il s’était même montré franchement défavorable à l’atome lors de la primaire socialiste [1], lorsqu’il défendait un projet « rose-vert » appelé Des idées et des rêves.Les arguments proposés par son site de campagne étaient très clairs :
« Le contexte énergétique français est marqué par une forte dépendance aux énergies fossiles (...) et une importance unique à l’échelle mondiale de l’énergie nucléaire dont les coûts et les dangers démontrent ses limites en tant que solution "miracle". »
« Il faut reconnaître que le nucléaire, comme toutes les autres sources d’énergies non reproductibles, ne peut qu’être une solution transitoire. Chacun sait bien qu’on en sortira, à un moment ou à l’autre. »
« Poser la question du nucléaire, c’est aussi briser le tabou d’une énergie bon marché. Coût du risque, de la construction des centrales, de leur démantèlement, de la gestion des déchets doivent être pris en compte. Il faut donc hisser notre société par-dessus l’horizon du nucléaire et envisager la suite car le nucléaire est dépassable. Tout ne se fera pas immédiatement, mais il est du rôle des transformateurs d’initier une politique du temps long. »
Des principes qui se traduisaient toutefois par des mesures non chiffrées, quand les autres candidats s’engageaient plus précisément soit sur une sortie progressive soit sur une diminution chiffrée.
« La priorité numéro un est la réduction de la demande en énergie qu’elle que soit la source de production. »
« Il faut à court terme organiser la transition énergétique. A l’horizon de la législature 2012-2017, cela signifie la diminution progressive de la part d’énergie d’origine nucléaire dans le mix énergétique. Il faut donc mettre un terme au « tout électrique », la conséquence historique du choix du nucléaire. »
En campagne de recrutement pour Areva
Ces opinions s’opposent bien sûr en tout point à celles que le ministre a exposé dimanche soir où il avançait qu’il « ne s’agit pas d’abandonner le nucléaire », mais de « rééquilibrer ». « Notre choix [est] d’avoir une énergie pas chère, abordable et en quantité est stratégique », rajoutait-il. La passade anti-nucléaire semble finalement n’avoir été qu’une courte parenthèse dans la carrière d’Arnaud Montebourg. Une parenthèse qui n’a duré que le temps de la primaire socialiste pour la présidentielle de 2012.
Avant la primaire, Arnaud Montebourg soutenait ainsi publiquement l’atome dans son département de Saône-et-Loire. L’Express rappelait par exemple en 2008 comment, alors Président du Conseil général de Saône-et-Loire, Arnaud Montebourg avait participé à une campagne de recrutement d’Areva. A bord d’un « bus pour l’emploi », il interpellait alors les passants : « Venez, mais venez donc ! Vous allez avoir une vraie formation, un emploi stable, une bonne retraite, c’est pas formidable, ça ? »
Et, dès la fin des primaires, Arnaud Montebourg était revenu à ses anciennes amours en lançant à une délégation syndicale d’Areva : « L’industrie nucléaire, en se diversifiant, en assurant le démantèlement d’un certain nombre de centrales arrivées en fin de vie, en assurant la transparence démocratique et la sûreté, est une industrie qui assurera encore longtemps l’avenir énergétique de notre pays (...). On ne peut pas bazarder une industrie qui marche, surtout quand on a rien pour la remplacer. Il serait irréaliste de fermer des centrales qui ne sont pas en fin de vie et de ne pas poursuivre l’EPR. »
Devenu ministre du Redressement Productif, Arnaud Montebourg avait ensuite tenu cette position, en arguant par exemple en juillet dernier devant un journaliste du Monde que « tout doit être fait pour reconquérir notre souveraineté énergétique ». « Pas question, donc, de remettre en cause la filière nucléaire », traduisait le journaliste. La sortie de dimanche soir n’avait, elle, pas besoin de traduction. Juste d’un petit rappel des faits.
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