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10-05-2012
Mots clés
Agriculture
France

Semences paysannes : un avenir sans pesticide et sans OGM est possible

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Semences paysannes : un avenir sans pesticide et sans OGM est possible
(Des semences paysannes de maïs (Photo Anaïs Gerbaud))
 
Y a-t-il un autre avenir que les OGM pour une agriculture sans pesticides ? Véronique Chable, ingénieur à l'INRA le pense. Pour elle, les semences paysannes permettraient de relever le défi du changement climatique et de rendre l'agriculture biologique viable.
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ÉCOLOGIE SOCIÉTÉ ÉCONOMIE
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Véronique Chable est ingénieur de recherche à l’Institut national de la recherche agronomique (Inra) SAD, à Rennes. Comme ses collègues, elle a commencé sa carrière par la recherche sur les semences commerciales. Mais face à leur pauvreté génétique et à leur incompatibilité avec l’agriculture biologique ou à faibles intrants, elle s’est tournée vers les semences paysannes il y a dix ans. Au même moment, des agriculteurs faisaient le même constat et commençaient à se regrouper pour réapprendre le travail de sélection et de recherche.

Le travail de Véronique Chable ? Donner un coup de pouce à ces agriculteurs en cherchant les ressources génétiques adaptées à leur terroir et approfondir la recherche sur la sélection à la ferme pour améliorer la performance des productions et leur capacité d’adaptation. Elle accompagne notamment des agriculteurs sur le développement des variétés paysannes de maïs. Un travail de recherche porté au niveau européen, comme au sein du programme SOLIBAM [1].

Terra eco : Quel est le problème des semences qu’on trouve dans le commerce ?

Les variétés majoritairement présentes dans le commerce sont issues des travaux de sélection de variétés hybrides F1 qui ont été conçues pour répondre aux exigences du marché des semences. Elles sont homogènes et stables pour être facilement protégées par leur obtenteur et identifiables lors de leur inscription au catalogue officiel des variétés. Elles ont été sélectionnées sur des terrains habitués aux intrants chimiques, engrais et pesticides, pour optimiser les pratiques de l’agriculture conventionnelle. Elles ne sont donc pas adaptées à l’agriculture biologique qui cherche à optimiser le terroir sans ces intrants.

Mais le rendement est plus faible avec des semences paysannes qu’avec des hybrides...

Le rendement n’est pas le critère premier, mais une stabilité des performances de la variété dans des conditions climatiques variables pour un terroir donné. Par exemple, les agriculteurs souhaitent que les variétés-populations soient moins gourmandes en eau, et puissent se passer d’irrigation.

Dans ce rapport de la FAO (Food and agriculture organization), on lit que « depuis le début [du XXe] siècle, quelques 75% de la diversité génétique des plantes cultivées ont été perdus », notamment à cause des pratiques de l’industrie semencière. Comment en est-on arrivé là ?

C’est simple : dans un hybride F1 (semence conventionnelle, ndlr), toutes les plantes sont identiques. S’il y a mille hectares d’un hybride F1 à 10 plantes au m² dans une région, cela représente 10 fois 10000 fois 1000 plantes identiques, donc aucune diversité ! C’est contre-nature. Et en plus, le fonds génétique des hybrides est moins diversifié que celui des populations. Au contraire, les variétés-populations (semences paysannes, ndlr) ont une base génétique très large.

Pourquoi, selon vous, les agriculteurs ont-ils intérêt à faire leurs semences ?

La sélection de populations est plus rapide et plus simple que les schémas de sélection de variété hybrides F1 des firmes semencières. Les agriculteurs peuvent espérer des premiers résultats satisfaisants au bout de trois ou quatre ans. Mon objectif est d’aider les agriculteurs pour qu’ils deviennent autonomes dans leur projet de sélection. Pour le maïs, nous nous intéressons particulièrement à la qualité du produit, notamment les qualités gustatives pour relancer cette plante en alimentation humaine.

Vous voulez dire qu’une semence paysanne de maïs peut donner un maïs plus savoureux ? Pour quelle raison ?

Dans les maïs populations, on trouve une diversité de variétés qu’on n’a plus chez les hybrides. Dans le Périgord, on travaille avec des chefs cuisiniers qui sont ravis de retrouver une qualité de semoule ou de farine, introuvable par ailleurs, pour des recettes traditionnelles.

Donc ce maïs n’a pas seulement un intérêt pour la biodiversité, ses qualités gustatives sont un argument commercial non négligeable...

On ne cherche pas la vente à tout prix : on cherche à développer des productions qui protègent l’environnement, font vivre les agriculteurs, satisfassent les consommateurs, locaux principalement et mettent en valeur la culture locale.

Quel est votre avis sur la dernière loi qui vise à taxer ou interdire la réutilisation des semences traditionnelles et potentiellement celle des semences paysannes ?

Les paysans doivent continuer à se battre pour l’abroger. Mais je ne pense pas qu’elle puisse réellement s’appliquer dans les champs. Mon but, en tant qu’ingénieur à l’INRA, est justement d’amener les décideurs à adapter la réglementation à la réalité des champs. Dans les années 60, les chercheurs ont aidé à la création du système réglementaire actuel pour favoriser le développement des variétés de l’agriculture conventionnelle. Aujourd’hui, le chercheur doit continuer à faciliter le dialogue entre les praticiens du terrain et les décideurs politiques, notamment en matière de réglementation.

En Europe on constate pourtant un essor des brevets accordés sur des plantes, que certains pays autorisent la culture du maïs OGM... Ne sentez-vous pas un décalage entre les moyens européens qui vous sont accordés et cette tendance ?

Les deux systèmes ne peuvent pas cohabiter, c’est évident. Si des cultures de maïs OGM sont autorisées, cela risque de contaminer nos semences paysannes et leur faire perdre leur identité. Elles deviendraient impropres à l’agriculture biologique pour laquelle les OGM sont interdits. Mais je crois à une évolution des mentalités. Le pétrole va devenir de plus en plus rare, les pesticides et les engrais de plus en plus chers. L’agriculture conventionnelle va se trouver confrontée à de plus en plus de difficultés économiques. Ce système sera amené à évoluer lui aussi.

Sentez-vous une réelle volonté politique ? Vos collègues de l’INRA partagent-ils votre opinion ?

Au niveau européen et international, certainement !

[1] « Développer des stratégies combinant la sélection végétale et l’innovation agronomique pour l’agriculture biologique et l’agriculture à faibles intrants ». Ce programme qui s’étend de 2010 à 2015 rassemble 12 pays européens et africains. Auparavant, Véronique Chable a participé au programme « Sélection conservatrice, amélioration génétique et production des semences », dont les objectifs et résultats sont consultables ici (http://www.farmseed.net/related_pub...)

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  • merci à gattaca pour sa longue réponse, espérant nous faire croire que l’agriculture de demain ne pourra se faire que avec les OGM ou GM. 

    Il oubli de dire que la moutarde (cousine du soja (ogm) a fait sa mutation génétique et résiste aux désherbants sensés la détruire. il oubli de dire que monsanto conseille aux agriculteurs subissant ce problème de désherber à la main (capacité germinative des graines de moutarde, 10 ans).
    il oubli de dire que le maïs est originaire d’un pays relativement aride ; le mexique
    il oubli de dire que ce sont les semenciers internationaux qui prônes les OGM. 
    il ne précise pas que la loi sur les semences paysannes vise tout simplement à interdire la vente de ces semences par les paysans. Des fois que les paysans se réveillent, entrent en résistance et se multiplient un peu trop.
    il oubli de dire qu’une plante qui produit son propre insecticide détruit tous les insectes (aériens et terriens).
    Il oubli de dire que la virale du maïs a fait sa mutation génétique et résiste au round up qui était sensé la détruire, sic.

     :-)

    25.03 à 10h27 - Répondre - Alerter
  • Beaucoup de points que, malheureusement, V Chable ne semble pas avoir compris dans la sélection et l’amélioration variétale.

    * « La pauvreté génétique » dit elle … mais jamais nous n’avons eu autant de variétés pour une même espèce au Catalogue officiel des espèces cultivées (plus de 600 variétés rien que pour le maïs). Autant on pouvait dire cela à la fin des années 70, autant cela n’a plus aucune valeur aujourd’hui.

    * « Ressources génétiques adaptées à leur terroir »… fidèle au concept de la notion de terroir (prôné depuis des années par l’Inra qui pour ce point fait -aussi- fausse route) qui introduit inconsciemment dans les esprits que ce qui est fait à un endroit est « mieux » que ce qui se fait ailleurs !
    Non, tout simplement, les améliorateurs se préoccupent, depuis toujours, à adapter les plantes à leur environnement (mais avec une dimension plus large que l’étroitesse du concept terroir). Inutile donc d’enfoncer des portes ouvertes !

    * Elle prône un mode de culture (variétés populations) qui peuvent répondre à des niches biologiques particulières mais qui ne pourrait satisfaire les besoins des industriels souhaitant prioritairement avoir une matière première de qualité constante et régulière pour leurs transformations. C’est impossible avec les variétés populations.

    * Les variétés commercialisées sous la forme d’hybrides F1 n’ont pas pour vocation de « répondre aux exigences du marché des semences » … rien compris !
    Elles ne sont pas « stables » (c’est pourquoi d’ailleurs il ne faut pas les ressemer). Elles sont seulement homogènes en tant qu’hybrides F1. Les lois de la génétique mendélienne ne semblent pas assimilées.
    Il faut faire en amont, le même travail que pour une plante autogame avant de réaliser l’hybride F1 !

    * Les objectifs de sélection avancés (« stabilité des performances dans des conditions climatiques variables … ») ne sont pas distincts de la sélection conventionnelle qui a exactement les mêmes.
    Pour des variétés moins gourmandes en eau, on peut attendre encore quelques décennies avant d’en voir avec les méthodes de sélection conventionnelles (cela fait des siècles que l’on essaye d’en obtenir sans succès !).

    * Vision partielle de la notion de biodiversité (au passage, il n’y a certainement pas 10 plantes au m2 mais au moins 10 fois plus !).
    Que vient faire cette notion anthropocentrique de « contre-nature » ?
    Une variété donnée peut avoir une origine génétique très large !
    Il y a très rarement un même génotype qui occupe 1000 ha.
    Encore une fois, il existe de nombreuses variétés de maïs disponibles au catalogue officiel.

    * On peut effectivement obtenir une année donnée une culture qui va donner des qualités gustatives supérieures à une autre variété … mais tentez d’obtenir cela de manière régulière et année après année avec des variétés populations qui « bougent » en permanence (car non fixées par définition) … impossible !

    * La dernière Loi ne vise pas à taxer ou interdire la réutilisation des semences de ferme ou des semences paysannes … relisez bien le texte et essayez d’en comprendre la portée.

    * Les brevets se développent plutôt dans les pays hors Europe. En Europe nous avons le système du COV qui s’applique d’ailleurs aux PGM qui pourraient être commercialisées en Europe.

    * Il est assez lamentable que VC utilise le vocabulaire des antis OGM lorsqu’elle parle de contamination par exemple. N’a t’elle pas suffisamment de connaissances en biologie florale, en sélection, pour simplement parler de dissémination, de pollinisation croisée voire dans certains cas de mélanges (récoltes) ? Madame VC, lorsqu’on sait de quoi on parle, on ne parle pas de maïs OGM mais de maïs GM, c’est amplement suffisant.

    * L’agriculture biologique s’est auto-interdit l’utilisation de PGM… c’est bien dommage, et le signe que les adeptes de cette idéologie n’ont toujours pas compris ce qu’est l’Ecologie.
    Ainsi, des variétés qui ont un meilleur EIQ que les autres ne doivent pas être utilisées … on rêve. Des variétés qui se défendent toutes seules (résistances à certains insectes ou virus, ou champignons) ne seraient pas écologiques ?
    Sans doute l’AB perçoit inconsciemment que les PGM font déjà mieux ce qu’elle essaye de faire (très) péniblement.

    * Peut-être plus simplement, dans le cas de VC, suit-elle les « consignes » de la hiérarchie INRA, qui fait tout depuis quasiment deux décennies pour empêcher le développement des biotechnologies végétales (dont font partie les PGM) et s’en vante même au travers des prises de parole de son ex-présidente.

    3.08 à 16h29 - Répondre - Alerter
  • on se rend compte que 10 000 ans de selection végétale humaine pour avoir le meilleur dans chaque terroir était finalement une bonne idée ?? Que l’important était de conserver des agriculteurs qui vivent de leur travail ( au lieu d’être " assimilés fonctionnaires" en vivant de subsides de l’état ?? ) n’était pas utopique ??? mais c’est subversif ça !

    30.07 à 12h31 - Répondre - Alerter
  • Ouf , un souffle d’air pur c’est rare dans nos campagnes et nos institutions de recherche et réglementaires. Généralement elles préfèrent appliquer la méthode Servier .

    20.05 à 15h17 - Répondre - Alerter
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